Au menu, «coups de poings, matraques, suffocation...»
La journée internationale de soutien aux victimes de la torture célébrée hier, a été l’occasion pour les défenseurs des droits de l’homme de se défoncer sur policiers, gendarmes et magistrats Sénégalais. De véritables ‘’tortionnaires’’ !
Il n'y aurait plus l’ombre d’un doute, le Sénégal est une terre de torture. Après un bilan macabre déroulé hier, les défenseurs des droits de l’homme se sont défoncés sur le trio de «Tortionnaires» qui serait constitué par les policiers, les gendarmes et les magistrats. Ils sont plus d’une dizaine d’individus gardés à vue ici bas et déférés à l’au-delà au cours de ces douze dernières années. Des personnes bafouées dans leur dignité avant d’être torturés à mort. Toujours indexés, policiers et gendarmes ont toujours bénéficié d’une «impunité déconcertante». Pourtant, le Dr. Assane Diouf est formel : «les cas de tortures notés au Sénégal l’ont été lors des gardes à vue». Et mieux (ou pire) encore, les victimes ont souvent été soumises à des «coups de poing violents», à des «coups de matraques» ou alors à des «suffocations», c’est-à-dire la tête trempée dans une bassine d’eau pour arracher quelque information à la victime.
Si l’aveu est souvent considéré comme la reine des preuves, rien ne justifie qu’il soit arraché à la personne à tout prix. Malheureusement, constate Me Demba Ciré Bathily (Amnesty international), «les policiers et les gendarmes pensent que torturer les gens est toujours efficace». Bien au contraire, ceux qui le font récoltent toujours des informations «erronées», poursuit-il. Me Yaré Fall (Avocats sans frontière) informe d’ailleurs que 99% des procès-verbaux ne sont pas reconnus par les mis en cause, une fois devant la barre.
«Me, arrêtez votre cinéma»
Pour Me Bathily, il temps que policiers et gendarmes soient formés aux droits humains, de même que les magistrats «qui ne comprennent souvent rien sur ces questions.» L’avocat poursuit, très en colère : «plus on s’éloigne de Dakar, plus on entre dans des zones de non droit où policiers et gendarmes font ce qu’ils veulent comme des sortes de rois locaux». Me Assane Dioma Ndiaye (Ligue Sénégalaise des droits humains) se rappelle avec «beaucoup d’amertume» les propos tenus par le Procureur de Kédougou lors du procès d’élèves violentés lors d’une grève. Exhibant le corps des élèves torturés par les forces de l’ordre comme preuve, il s’est vu interpeller de manière «vulgaire» par ledit procureur en ces termes : «Maître, vous n’avez pas encore terminé avec votre cinéma ?» Ce magistrat n’avait rien perçu de la douleur des victimes, renchérit Me Bathily. Aujourd'hui, avocats, médecins et militants des droits de l’homme se sont accordés pour solliciter la présence d'un avocat pour tout mis en cause aux premières heures de garde à vue. «Cela aiderait à prévenir les cas de torture». Surtout, indiquent-ils, si les procureurs acceptent de s’auto-saisir afin de rendre possibles le déclenchement de poursuites contre ceux qui...torturent.
La journée de réflexion d’hier a été mise en œuvre par la Raddho, Amnesty international, la Ligue sénégalaise des droits de l’homme et l’Action des Chrétiens pour l’abolition de la torture.
AMADOU NDIAYE