Publié le 5 Nov 2017 - 08:02
FILMS EN COMPETITION

Sélection panoramique

 

Le 22e Festival international du cinéma d’auteur de Rabat tire à sa fin. Ce samedi seront connus les résultats. En attendant, ‘’EnQuête’’ revient sur quelques-uns d’entre eux projetés entre mercredi et vendredi.

 

Les jurys de la 22e édition du Festival international du cinéma d’auteur de Rabat ont du pain sur la planche. Ils ont déjà vu les 13 films en compétition, tous projetés au cinéma Renaissance. Tous sont très beaux et sont très particuliers. Particuliers comme ‘’Des rêves sans étoiles’’ de Mehrad Oskouei. ‘’Il m’a fallu sept ans pour obtenir l’autorisation de tournage. Mais je ne voulais pas que ces jeunes délinquantes nous restent invisibles et j’espère que mon film pourra contribuer à changer le point de vue du public sur elles’’, dit son auteur à la fin du synopsis. On peut dire sans risque de se tromper que son objectif est atteint et ce qu’il a fait, il fallait vraiment que quelqu’un le fasse.

Mehrad Oskouei plonge les spectateurs dans le quotidien de jeunes Iraniennes. Elles sont à peine sorties de l’adolescence, que dis-je, de l’enfance. Chacune d’elles, en racontant son histoire, n’essaie pas de se dédouaner, mais l’on sent qu’elles sont victimes d’un système. L’essentiel des filles interviewées viennent de familles de toxicomanes. Il y a toujours la mère, le frère ou le beau-père qui se drogue et les a poussées à en vendre. Soit elles viennent de familles dont les parents sont dépressifs et passent leur temps à les battre. Elles fuient leur maison et se retrouvent dans la rue. Commence alors, pour elles, une vie de débauche qu’elles racontent au réalisateur.   

651, par exemple - c’est le nom d’une d’entre elles - se fait appeler ainsi parce qu’au moment de son arrestation, elle détenait par-devers elle 651 grammes de cocaïne. Elle vient d’une famille où tous les membres sont soit des dealers, soit des voleurs. Khetareh, elle, s’est retrouvée dans la rue et a été arrêtée pour vagabondage, parce que son oncle abusait d’elle. Sa famille n’a pas voulu la croire. Pour ne pas qu’elle fuie, on l’attachait. Quand elle en a eu l’occasion, elle a fugué. Dans cette prison, une jeune fille de 17 ans y vit avec son fils. Elle est mariée et a deux enfants. Elle a été arrêtée au cours d’un vol. Elle voulait 1 000 euros pour payer l’opération de son mari resté dans le coma, après une bagarre.

Ce qui transparaît dans ce film documentaire, c’est la sexualité précoce de ces enfants. Toutes sont mariées ou vivaient avec leurs petits-amis. A l’exception d’une d’entre elles qui s’est retrouvée dans cette prison pour avoir tué son père. Ce dernier battait tous les soirs sa mère. Elle ne pouvait plus le supporter. Avec sa sœur et sa mère, elles ont décidé de monter un complot et de le tuer. Après le meurtre, leurs propres frères les dénoncent et elles ont toutes été arrêtées. Elle ne regrette pas son geste qu’elle explique par la dure situation qu’elle a vécue.

Malgré toute cette tristesse, ce vécu lugubre, règne dans la prison une certaine gaieté. Certaines d’ailleurs des détenues ne veulent pas la quitter. Elles sont mieux traitées ici qu’au sein de leurs familles. Il y a, comme vous pouvez l’imaginez, une bonne dose d’émotions dans ce documentaire, même si, par moments, son auteur a été très pudique sur les questions. Devant des filles assez ouvertes, les questions pouvaient être plus corsées, plus précises, cela ne donnerait à la pellicule que plus de sens.

‘’Endless Poetry’’

La direction artistique du 22e Festival du cinéma d’auteur de Rabat a offert aux festivaliers un grand moment de cinéma en projetant ‘’Endless Poetry’’ d’Alejandro Jodorowsky. Du grand art, gâché par des coupures, des censures. Parce qu’on est au royaume chérifien, tout doit être publiquement ‘’halal’’. C’est ainsi que des scènes jugées trop érotiques ou choquantes ont été coupées, sans aucune forme de protocole. Il n’enlève en rien la beauté et le grand art de la pellicule de ce cinéaste franco-chilien au sens de la provocation légendaire. Il en a mis une bonne dose dans ‘’Endless Poetry’’ qui ressemble à une autobiographie filmée.

 ‘’Dans l’effervescence de la capitale chilienne Santiago, pendant les années 1940 et 1950, ‘’Alejandrito’’ Jodorowsky, âgée d’une vingtaine d’années, décide de devenir poète contre la volonté de sa famille. Il est introduit dans le cœur de la bohème artistique et intellectuelle de l’époque et y rencontre Enrique Lihn, Stella Diaz, Nicannor Parra et tant d’autres jeunes poètes prometteurs et anonymes qui deviendront les maitres de la littérature moderne de l’Amérique latine. Immergé dans cet univers d’expérimentation poétique, il vit à leurs côtés comme, peu avant, eux avaient osé le faire sensuellement, authentiquement, follement’’, décrit-on dans le synopsis. La famille de Jodorowsky n’était pas d’accord, parce que son père était d’avis que les ‘’poètes’’ étaient des ‘’pédés’’. Lui rêvait que son fils devienne médecin. Il y a beaucoup de dérision et de folie dans l’histoire. Ce qui la rend singulière.

‘’Milla’’

Un autre film particulier et très provocateur, ‘’Milla’’ de Jorge Thiellen Armand. Un film froid, très froid. Rien n’est simple pour la jeune Milla qui semble être seule sur terre avec son petit-ami Léo. A la disparition de ce dernier, elle se retrouve obligée de faire le ménage, alors qu’elle est enceinte. Avec un enfant ensuite, elle se battra tous les jours pour le nourrir. Un enfant capricieux et au caractère assez trempé, malgré son jeune âge. Il est comme ce peuple égyptien décrit par Tamer El Said. Il conteste le régime de Hosni Moubarak. D’où d’ailleurs le titre du film ‘’Les derniers jours d’une ville’’.

Ici, l’histoire est contée à travers celle d’un réalisateur qui veut faire un film, mais qui a du mal à camper son sujet. Il valse entre le vécu de sa mère, celui d’un professeur de théâtre, les actes banals filmés dans la rue, mais également ses amis vivant à Beyrouth, à Bagdad et à Berlin filment leurs villes et lui envoient des images. Que faire de tous ces rushs ? Des images collectées au beau milieu de la révolution. Seulement, le jeune homme, Khalid, ne semble pas ébranlé, ni touché par ce qui se passe dans sa ville. Il ne filme pas cela.    

BIGUE BOB

Section: 
PREMIÈRE ÉDITION SOTILAC : Le Sénégal hisse les voiles du tourisme de croisière
ATELIER ‘’DAKAR AU FIL DES ARTS’’ À L’IFD : Une ville contée en sonorités
EXPO "TRAITS ET LETTRES" AU CARRÉ CULTUREL : Le pouvoir de l'art dans l'éducation et la transformation sociale
AVANT-PREMIÈRE « AMOONAFI » DE BARA DIOKHANE : L'art, l'histoire et le droit au service de la mémoire
EXPOSITION "SYMBOLES DE LA VIE : AU-DELÀ DU REGARD" : Réflexions sur la condition humaine
LE SYNPICS ET CONI IA LANCENT UNE FORMATION : Vers une révolution technologique du secteur médiatique
LIBERTÉ DE PRESSE ET DROIT À L’INFORMATION : RSF appelle les députés à instaurer quatre réformes
BIENNALE OFF : L'Orchestre national raconté à Douta Seck
EXPOSITION FALIA La Femme dans toutes ses facettes
MUSIQUE À L’IMAGE : Plusieurs jeunes formés au Sénégal
CÉLÉBRATION 50 ANS DE CARRIÈRE : L’Orchestra Baobab enflamme l’Institut français de Dakar
15e ÉDITION DE LA BIENNALE DE DAKAR : Seulement deux prix remportés par le Sénégal
BIENNALE DE DAKAR : Un éveil artistique, selon Bassirou Diomaye Faye
CÉRÉMONIE D'OUVERTURE DE LA 15e ÉDITION DE LA BIENNALE DE DAKAR : Dak’Art pour un voyage culturel
EXPOSITION ‘’FAIRE LIEU’’ À DAKAR : Cinq lieux africains comme espaces de transformation
BIENNALE DE DAKAR   - EXPO ‘’DEVOIR DE MÉMOIRE’’ : Un modèle d’engagement culturel
Goncourt 2024
PRÉSENTATION TAARU SÉNÉGAL : La première Symphonie d'Amadeus
PARTICIPATION DES USA À LA BIENNALE DE DAKAR : Mettre en lumière l’influence de la culture africaine sur l'art américain
MARIAM SELLY KANE - JOURNALISTE : Une voix pour les femmes et les enfants