‘’L’État doit proposer enfin quelque chose de consistant au Mfdc’’
Le militaire à la retraite, Abdoulaye Fall dit ‘’Mao’’, recommande à l’État du Sénégal ‘’de proposer enfin quelque chose de consistant au Mfdc’’, en vue de trouver une paix définitive en Casamance. Celui qui s’est confié hier à ‘’EnQuête’’, suite à la tuerie survenue samedi dernier dans le département de Ziguinchor (13 morts) estime que le gouvernement tâtonne dans l’obscurité.
Alors que la traque aux assassins est lancée hier par le président de la République Macky Sall, suite à la tuerie survenue dans la forêt de Boffa (Ziguinchor), pour certaines personnalités, c’est l’occasion pour donner sa lecture de la situation en Casamance. Abdoulaye Fall ‘’Mao’’, ancien militaire, attend de l’État des négociations concrètes pour désamorcer la crise. D’après lui, l’autorité doit entamer des ‘’négociations sérieuses’’ avec le Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc) et arrêter de dialoguer seulement avec Salif Sadio. ‘’Dans la crise en Casamance, l’État a tout simplement noué des dialogues et des concertations avec le Mfdc et non des négociations concrètes. La preuve, il dialogue avec Salif Sadio. Il faut que l’État se rende compte qu’il n’est responsable et ne représente plus rien dans le maquis. Il me semble que l’État tâtonne dans l’obscurité. L’heure a enfin sonné pour qu’il propose quelque chose de consistant au Mfdc et de cesser tout dialogue avec Salif Sadio’’, préconise l’ancien homme de troupes.
A propos des actes ‘’odieux’’ de samedi dernier, cet interlocuteur ne se fait aucun doute sur les coupables. Il s’est déjà fait sa religion. ‘’Je vous dis très sincèrement que c’est le Mfdc qui a commis ces crimes. Ce sont les rebelles qui les ont faits. Un point, un trait. Quand on écoute leur porte-parole qui n’a pas même pas 30 ans, on comprend tout. Je prends toutes mes responsabilités en disant que ce sont les rebelles qui ont commis cette tuerie. Aujourd’hui, au sein du Mfdc, chacun fait ce qu’il veut. Personne ne commande personne’’, indique-t-il.
Pour parvenir à une paix définitive dans cette partie méridionale du pays, Abdoulaye Fall ‘’Mao’’ trouve qu’il est important de ‘’dissoudre’’ la commission que gère l’ancien maire de Ziguinchor Robert Sagna. De l’avis du militaire à la retraite, l’ex-ministre d’État est dans une situation de ‘’déclin’’. ‘’Robert Sagna a fait plus de 20 ans (24 ans : Ndlr) à la tête de la mairie de Ziguinchor. Il y a plus de 80 communes en Casamance et Robert Sagna ne connaît que celle de Ziguinchor qu’il a eu à gérer. Donc, il ne peut pas gérer une commission ou une plateforme qui s’occupe du retour de la paix définitive en Casamance. Le président de la République doit dissoudre cette commission et impliquer les cadres de l’armée et les enseignants qui connaissent bien la Casamance. On ne peut pas mettre cinq personnes là-dessus et dire qu’on veut régler ce conflit de façon définitive. Ce n’est pas possible et c’est inconcevable’’, se désole l’ancien militaire de rang qui a vécu plusieurs années en Casamance.
Les précisions de Robert Sagna
Si Abdoulaye Fall ‘’Mao’’ pointe du doigt le Mfdc qui, selon lui, en est le principal acteur de cette attaque, le leader du Groupe de recherche pour la paix en Casamance (Grpc) nie tout en bloc. Robert Sagna précise que ce qui s’est passé dans la forêt de Boffa (Niaguis, Ziguinchor) samedi dernier, n’est aucunement lié à la revendication pour l’indépendance de la Casamance. Aussi, rappelle-t-il, cela ne saurait contraindre le processus de paix en Casamance. ‘’Les deux événements ne sont pas liés. Ce n’est pas une conséquence de la guerre revendicative pour l’indépendance de la Casamance.
Il s’agit-là d’un fait isolé qui est lié à l’exploitation sauvage du bois dans la forêt de Basse-Casamance. C’est une réaction contre les coupeurs clandestins’’, a d’abord réagi l’ancien ministre de l’Agriculture sur ‘’Dakar matin’’. Avant de poursuivre : ‘’C’est une bande armée d’une vingtaine d’hommes qui a sévi dans cette forêt, commanditée par je ne sais qui, et qui a causé la mort de 13 jeunes. C’est un événement malheureux qu’il ne faut pas intégrer de manière directe comme un moyen de lutte pour l’indépendance de la Casamance. C’est différent. Il faut savoir raison garder. Je pense que le président (Macky Sall) sera le premier à en tirer les leçons’’, lance-t-il.
Ainsi, Robert Sagna estime que cette tuerie ne saurait être un frein au processus de paix définitive en Casamance. ‘’Le Mfdc est conscient de sa fragilité. La division ralentit le processus. Mais le Mfdc est en train de faire des efforts pour se retrouver’’, note l’ex-député socialiste.
GAUSTIN DIATTA (THIES)