Ndèye Marième Fall connaitra son sort vendredi prochain
Depuis le 27 août dernier, l’affaire Mouhamed Diagne fait couler beaucoup d’encre et de salive. Cette histoire de torture, qui a tenu en haleine tout le peuple sénégalais, va connaitre enfin son épilogue. En effet, dans ses travaux de vendredi, le tribunal de grande instance de Mbour a mis l’affaire en délibéré au vendredi prochain. Car les versions s’entrechoquent.
Suite aux plaidoiries des avocats des deux parties, le ministère public n'a pas eu assez d'éléments pour entrer en voie de condamnation contre Ndèye Marième Fall, poursuivie pour violence sur le fils de son mari. Le procureur a signalé une contradiction dans les déclarations du petit Mouhamed qui revient indexer sa tante comme responsable de ses lésions, après avoir déclaré avoir subi une chute lors de l’enquête.
Il considère ainsi que les paroles sont polluées, puisqu’il ne retrouve pas d’objectivité sur le fond des déclarations de ce dernier. De plus, il indique que le médecin traitant, dans cette affaire, n’a pas reçu la formation idoine pour donner son avis dans le cas du jeune. Donc, son rapport n’a pas de valeur.
Dans sa plaidoirie, l’avocat de Ndèye Marième Fall a demandé la relaxe pure et simple de sa cliente. Il fonde sa requête sur le dépôt de deux certificats. Selon Me Amadou Diallo, celui qui parle de la strangulation de l'enfant porterait deux noms différents et n'aurait pas de date. Ce qui l’amène à percevoir une manipulation dans cette affaire.
‘’La partie civile tente de faire impression en jouant sur les mots’’, indique l’avocat de la défense. Selon qui ‘’Mouhamed Diagne a été victime du sort. La première déclaration de Mouhamed était qu'il était tombé dans les toilettes. Il tient un discours figé et linéaire.’’ Pour l’avocat, un enfant ne peut pas dire spontanément à sa mère qu'elle ne lui avait pas appris à mentir.
Dans le même cadre, il a déploré l’attitude de Gagnesiry Diallo, la maman du gamin qui n'a pas protégé l'image de son enfant, à son avis. En fait, tout part d’une vidéo qui a été postée le 27 août dernier. Dans cette dernière, on pouvait y voir clairement l’enfant de 5 ans, Mouhamed Diagne, accuser l’épouse de son père de l’avoir soumis à des actes de maltraitance.
Ainsi, selon l’avocat de la défense, Me Amadou Diallo, le droit à l’image de l’enfant a été violé par sa maman par le partage de cette vidéo qui est devenue aussitôt virale. ‘’Elle a violé le droit à l'image de son enfant. Il a été victime des agissements de sa mère qui a partagé ces vidéos’’. Il ajoute : ‘’C'est un enfant manipulé par sa mère. L'enfant a été victime d'un accident. On peut épiloguer sur la négligence. On ne peut que reprocher à sa tante d'avoir fait preuve de négligence. Lorsque l'enfant est tombé pour la seconde fois, elle dormait’’, a-t-il défendu sa cliente.
Du côté de la partie civile, Me Deh estime qu’il ne faudrait pas accorder beaucoup de crédit aux déclarations de Ndèye Marième Fall. ‘’Il faut prendre avec des pincettes les déclarations de la tante. Pour toutes les blessures, elle trouve toujours des explications. Cette blessure au dos a été faite délibérément’’, fait savoir l’avocat. Qui demande le maintien de Ndèye Marième Fall en prévention.
Enfin, pour tous les préjudices confondus, il a demandé un million de francs Cfa de dommages et intérêts.
Le père de l’enfant : ‘’On nous a jetés en pâture’’
Pour sa défense, Ndèye Marième Fall s’est contentée de plaider non coupable des coups et blessures sur son beau-fils Mouhamed Diagne. Toutefois, elle se désole que ces faits soient survenus à l’enfant chez elle. ‘’Je regrette ce qui lui est arrivé chez moi. Il m'a dit qu'il voulait aller aux toilettes, parce qu'il avait la diarrhée. J'étais en train de lui faire le petit-déjeuner. J'aurais préféré que cela arrive à mon propre fils, parce que c'est l'enfant d'une autre’’. La prévenue de 33 ans d’ajouter : ‘’Quelques jours après, on a vu que son bras était enflé, on l'a emmené voir un médecin. Les écorchures sur son visage, c'est parce qu'il se grattait. Son père lui a acheté des médicaments contre les vers. Je ne l'ai jamais battu.’’
Devant autant de déclarations contradictoires, la juge a voulu y voir plus clair. Elle a alors procédé à l’interrogatoire de la victime de 5 ans. Le jeune Mouhamed a clairement indiqué que sa tante lui a d’abord compressé le bras fortement, avant de lui frapper sur la tête avec un bâton. Il a également accusé sa tante de l’avoir griffé. Le juge lui a rappelé sa déclaration faite devant les gendarmes qu’il s’était blessé dans les toilettes. Mais Mouhamed Diagne, très rassuré, malgré le plâtre qui entoure son bras, a soutenu mordicus que sa tante lui infligeait ces maltraitances. D’ailleurs, il a confié, à propos de ses déclarations antérieures : ‘’C'est ma tante qui m'a dit de dire ça.’’
Revenant sur les faits, son père Gora Diagne a, pour sa part, indiqué : ‘’J'étais au boulot, quand un de mes voisins m'a appelé pour me demander d'aller voir mon fils, parce qu’il avait fait un accident. Par la suite, on l'a emmené voir un médecin. J'ai fait tout ce qui était nécessaire pour son bien-être. Quatre jours après, on avait constaté que son bras était enflé.’’ On pouvait lire toute sa meurtrissure, quand le papa de la victime déclarait : ‘’Mon enfant a plus de valeur, à mes yeux, que ma femme. On nous a jetés en pâture. Les gens nous jugent, alors qu'ils ne savent rien de nous.’’
Gagnesiry Diallo, la mère de l’enfant, donne sa version des faits
‘’C’est un mardi, très tôt le matin, que Gora m'a appelée pour me demander de le rejoindre à l'hôpital Fann. A mon arrivée, je lui ai demandé où était mon enfant. Je ne reconnaissais plus Mouhamed qui, aussitôt, m'a appelée pour m’assurer que c'était bien lui. Du coup, je me suis mise à pleurer. C’est là que mon enfant m'a dit : ’Maman, si tu pleures, moi aussi je vais me mettre à pleurer.’ Par la suite, le médecin m'a révélé que l'enfant a été maltraité. Trois jours après, Mouhamed lui-même m'a dit : ’Maman, tu m'as éduqué à toujours dire la vérité. C'est ma tante qui m'a réellement maltraité.’ Il m'a également confié que sa tante lui avait interdit de révéler ce qui s’est passé et que le jour où il raconterait à qui que ce soit, elle le tuerait. Le médecin m'a dit que la gorge de Mouhamed avait des problèmes, parce qu'il a subi une strangulation.’’
IDRISSA AMINATA NIANG (MBOUR)