Les jakartamen se désolidarisent et se frottent les mains
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La grève des transporteurs routiers à bien été suivie, hier mercredi à Thiès. Seuls les jakartamen et les calèches ont occupé la circulation. Les syndicats de motos-Jakarta de Thiès fustigent ce mouvement d’humeur. Ils y voient une manière de combattre ce mode de transport.
A hauteur du collège Saint-Gabriel, la circulation est fluide sur l’axe Thiès - Mont Rolland. Il est 18 h. D’habitude, à cette heure, piétons, taxis, cars ‘’Ndiaga Ndiaye’’, bus Tata, véhicules particuliers et motos-Jakarta se disputent la route. La zone regroupe les plus grandes écoles privées catholique de Thiès, en plus d’abriter le marché central. A cette heure de descente des élèves, la circulation y est souvent infernale. Hier, aucune difficulté à circuler. Du coup, la grève des transporteurs a été du pain béni pour la plupart des jakartamen.
Théodore Thiaw, affublé d’un maillot de Chelsea bleu, affiche le sourire. Derrière sa moto, deux élèves. «’’Aujourd’hui, les affaires marchent bien. Je n’ai eu qu’un seul abonnement, depuis l’ouverture des classes. Mais là, avec la grève, je transporte deux personnes en même temps, depuis ce matin’’, confie-t-il. Théo a vu son chiffre d’affaires passer de 10 mille à plus de 20 mille F CFA. Amadou Ba, la vingtaine, trouvé au garage Jakarta du quartier Thialy, n’est pas aussi chanceux. Il n’a pas senti un changement dans son travail. ‘’C’est vrai qu’il y a grève, mais les choses n’ont pas marché comme on le pensait. Les gens sont restés chez eux. Du coup, pas de clients. Seuls ceux qui ont fait de longs trajets comme Thiès - Tivaouane ont eu des bénéfices’’, déclare Amadou.
Autre son de cloche chez son camarade assis près de lui. ‘’Moi, je préfère circuler dans Thiès que de faire les longs trajets. Ce n’est pas avantageux, car au retour, on n’a pas de client et on brûle de l’essence gratuitement’’, explique-t-il.
La gare Thiès-Tivaouane est moins animée que d’habitude. Pas de voiture. Le prix proposé par les jakartamen est trop élevé, selon les quelques clients trouvés sur place. Il est passé de 1 500 à 2 500 F CFA.
Griefs
Cette grève des transporteurs routiers est donc largement suivie à Thiès. Mais elle n’est pas au goût des syndicats de Jakartamen, même si leurs adhérents y trouvent leur compte. ‘’Nous n’avons pas participé à cette grève, car nous avons été écartés des concertations. Pire, ces transporteurs nous combattent. Dans leurs revendications, ils parlent de problèmes Gemalto, des carte grises et plaques, des tracasseries policières et du transport irrégulier, c’est-à-dire nous les jakartamen, les Tiak-Tiak et les «Wor Gaindé». Ils ne peuvent pas nous combattre et vouloir qu’on les soutienne dans leur mouvement’’, explique Issa Dièye, le secrétaire général du Syndicat autonome démocratique et indépendant des chauffeurs du Sénégal, un syndicat affilié à l’Unsas.
Pour Issa Dièye, il y a plus d’anomalies dans ce transport dit légal que chez eux. ‘’Quand ils sont en discussion avec l’Etat, ils ne parlent pas de l’essentiel. Ils doivent reconnaitre leurs fautes. On ne peut pas combattre l’illégalité et ne pas être en règle. Il y a beaucoup de véhicules dont la durée de vie est dépassée, il y a longtemps. Ils ne doivent plus être assurés, ni passer à la visite technique. Et les bus Tata prennent beaucoup plus que le nombre autorisé’’, enfonce Issa Dieye.
Autre problème soulevé par le secrétaire général Sadics : celui des gares routières du Sénégal. ‘’Ils parlent de transport irrégulier, alors que seule la gare des Baux Maraichers est en règle, si on se fie à la nouvelle réforme des gares routières. Et le mandat des «7 places» qui circulent actuellement est expiré, il y a fort longtemps’’, ajoute Issa Dièye.
Pour lui, il n’est pas question de se laisser faire. Ils vont bientôt, à leur tour, entamer un mouvement d’humeur pour, dit-il, faire face à ‘’ceux qui veulent les éliminer’’ de la circulation.
Cette grève de deux jours des transporteurs routiers a créé donc beaucoup de désagréments, surtout chez les potaches. Jeanine est élève en classe de 3e au collège Sainte-Ursule. Elle a préféré rentrer à pied, car n’ayant pas confiance aux motos-Jakarta. ’’J’habite le quartier Fahu. Je prenais le bus tata 1. Mais j’ai dû marcher ce matin et à la descente, car je ne veux pas prendre de Jakarta. Ils roulent n’importe comment et ce n’est pas sûr. C’est pourquoi je préfère marcher, même si c’est loin’’, a-t-elle avoué.
JEANNE SAGNA (THIES)