Publié le 20 Feb 2023 - 21:49
PRÉSIDENCE DE L’UNION AFRICAINE

Azali Assoumani des Comores prend la suite de Macky Sall

 

Les chefs d'État et de gouvernement de l'Union africaine (UA) ont élu, hier, Azali Assoumani, Président de l'Union des Comores, comme nouveau président de l'Union africaine pour l'année 2023, lors de l'ouverture officielle de la 36e session ordinaire de la Conférence de l'UA, tenue à son siège à Addis-Abeba.

 

Le président Azali des Comores prend le relais du commandement de Macky Sall, qui a achevé samedi son mandat de président de l'Union africaine pour l'année 2022. La cérémonie symbolique s'est déroulée en présence du président de la Commission de l'UA, Moussa Faki Mahamat, du vice-président de la CUA, Dr Monique Nsanzabaganwa, du secrétaire général des Nations Unies (ONU), des représentants de la Commission économique régionale, des dignitaires et des invités, ainsi que le personnel de l'UA.

Dans son discours de remise, le président Macky Sall a souhaité au nouveau président de l'UA une présidence réussie et a remercié les chefs d'État des États membres de l'UA ainsi que le bureau sortant de l'UA, pour leur soutien pendant la durée de son mandat qui, dit-il, a été marquée par la crise sanitaire provoquée par la pandémie de Covid-19.

Macky Sall a souligné certaines des réalisations sous sa présidence de l'UA, notamment l'autonomisation économique des femmes et des jeunes, le renforcement de la démocratie et de la bonne gouvernance, entre autres programmes de développement dans le cadre de l'Agenda 2063.

Le président sortant de l'UA a remercié le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, pour son leadership et son soutien, y compris tous les membres de la Commission. ‘’Servir notre continent a été un privilège et une grande fierté, car je crois en une Afrique unie, une Afrique debout, une Afrique au travail, une Afrique en paix et confiante en son avenir’’, a souligné Macky Sall, ajoutant que cela l'a rendu plus déterminé et encore plus motivé, ‘’au front du combat pour l'Afrique, partout, pour tout et tout le temps, car c'est la responsabilité qui nous est conférée par l'héritage du panafricanisme, de réaliser le rêve des pères fondateurs et les aspirations de nos peuples’’.

Dans son discours, le président Azali Assoumani a apprécié ‘’l'honneur associé à la responsabilité et à la confiance investie’’ en sa personne et les membres du nouveau bureau, pour diriger le destin de l'organisation pour l'année à venir. "Je vous remercie et vous assure de notre engagement à travailler avec tous les pays membres dans l'exercice de notre mandat’’, a-t-il indiqué.

Pour le président comorien, ‘’en succédant, en ce lieu sacré, à mon frère le président Macky Sall, en tant que président en exercice de l'Union africaine, c'est avec le poids de la responsabilité continentale sur mes épaules que j'entends assumer, dès aujourd'hui, les fonctions de président de l'Union africaine, en cette 36e session ordinaire. Il ne sera pas facile de lui succéder, mais je ferai de mon mieux pour poursuivre son travail et, entre autres, en privilégiant comme il a toujours su le faire, le dialogue, l'écoute et le rassemblement, conditions indispensables pour faire ce mandat, celle de la réussite de notre continent’’.

Une diplomate israélienne expulsée par l’UA

L’ouverture du 36e Sommet de l'Union africaine à Addis-Abeba a été marquée par un incident diplomatique.  La directrice adjointe du ministère israélien des Affaires étrangères pour l'Afrique, Sharon Bar-li a été expulsée de la cérémonie. Dans une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux, on y voit la sécurité escorter la diplomate afin de la sortir de la salle.

Selon le porte-parole du président de la Commission de l'UA, Ebba Kalondo, Sharon Bar-li n’avait pas été invitée et que seul l'ambassadeur d'Israël accrédité auprès de l'organisation, Aleli Admasu, avait reçu une invitation nominative. Une thèse rejetée par les autorités israéliennes qui ont assuré que la mise en cause disposait d’une ‘’accréditation en bonne et due forme, en qualité d'observateur ".

L’incident n’a pas été du goût d’Israël qui a dénoncé une expulsion grave, dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères. Selon le document, il est regrettable de voir que l'UA a été prise en otage par un petit nombre de pays extrémistes comme l'Algérie et l'Afrique du Sud, motivés par la haine et contrôlés par l'Iran.

Lors du 37e Sommet de l’UA, le président de la Commission, Moussa Faki, a accordé le statut d'observateur à Israël. Une décision contestée qui a mené à la mise en place d’une commission pour régler cette question sensible.

Toutefois, elle ne s'est jamais réunie. Le conflit israélo-palestinien s’invite évidemment sur le continent africain.  


BILAN À LA TÊTE DE L’UNION AFRICAINE

Macky Sall, un goût d’inachevé

Difficile, en une année, de résoudre tous les défis auxquels font face les pays africains dans un contexte international marqué par des crises multiformes. Après avoir initié de nombreuses batailles pour plus de souveraineté de l’Afrique, le président sénégalais quitte la présidence de l’Union africaine.  

‘’Il ne sera pas facile de lui succéder’’. Les mots du nouveau président  de l’Union africaine (UA), Azali Assoumani, à l’endroit de son prédécesseur, le président Macky  Sall, à la tête de l’organisation continentale, témoignent de l'empreinte laissée par le chef d’État sénégalais. Le président de l'Union des Comores s’exprimait au moment de l’ouverture, samedi, de la 36e session ordinaire de la Conférence de l'Union africaine à Addis-Abeba. Ceci, avant de promettre de faire de son mieux pour continuer les chantiers entamés par Macky Sall entre février 2022 et février 2023 à la tête de l’UA.

Au plan international, un des moments forts de la présidence de Macky Sall restera le plaidoyer pour l’intégration de l’Afrique au G20. Le Groupe des vingt est composé de dix-neuf des pays aux économies les plus développées et de l'Union européenne, dont les chefs d'État, chefs de gouvernement, ministres des Finances et chefs des banques centrales se réunissent annuellement. Souvent invité à ces réunions, le continent noir n’y dispose pas d’un pouvoir décisionnel.

Lors du dernier sommet organisé  du 15 au 16 novembre 2022 à Bali (Indonésie), le président de l’UA d’alors avait réitéré son appel pour un statut de membre permanent à l’Afrique au sein de cette structure : ‘’Je voudrais souligner que dans ce renouveau du multilatéralisme auquel nous nous sommes engagés à Bali, l’Afrique reste un partenaire incontournable sur la scène internationale. Elle est la 8e puissance économique par son PIB, possède plus de 60 % des terres arables avec une population estimée à près de 2,5 milliards d’ici 2050. Elle peut, par conséquent, nourrir une juste ambition d’être intégrée comme un membre permanent au Forum du G20 et j’aimerais inviter mes pairs à y procéder’’.

Depuis, ce discours fait son chemin. En passant le témoin au président de l’Union des Comores, Macky Sall a soutenu que ce souhait pourrait bientôt se réaliser.

En effet, retient-il, ‘’sur la gouvernance mondiale, il est clair que la réforme du Conseil de sécurité ne connaît pas encore d’évolution significative. Par contre, s’agissant de la gouvernance économique et financière mondiale, je suis heureux d’annoncer que le processus d’adhésion de l’Afrique comme membre de plein droit du G20 est en bonne voie, suite aux démarches que j’ai effectuées dans ce sens aussitôt après ma prise de fonction. À ce jour, 10 des 20 membres du groupe nous ont exprimé leur soutien’’. Ces pays incluent les États-Unis d’Amérique, la France, l’Union européenne, etc.

Terrorisme : Rendre opérationnelle la Force africaine en attente

Prenant fonction à la tête de l’UA, Macky Sall a énuméré quelques-unes des nombreuses urgences qui freinent l’émergence du continent africain. Parmi elles, la lutte contre le terrorisme, la paix et la sécurité, la protection de l’environnement, le développement, etc., mais également la lutte contre l’instabilité institutionnelle en Afrique. Les nombreux coups d’État en sont l’illustration parfaite. Le président sortant de l’UA invite son successeur à faire de cette sécurisation du continent  une priorité.

En effet, insiste le président Sénégalais, ‘’j’appelle instamment à la mise en œuvre des engagements du Sommet extraordinaire de Malabo de mai 2022, à savoir rendre opérationnelle la Force africaine en attente, créer une unité de lutte contre le terrorisme... et financer de façon plus conséquente et plus prévisible nos efforts de lutte contre ce fléau".

À côté de la puissance militaire, Macky Sall estime que le défi de la paix, de la sécurité et de la stabilité du continent ‘’nous engage à déposer les armes et à trouver des solutions pacifiques à nos différends afin de mieux nous consacrer aux tâches de développement économique et social. Avec la reconfiguration géopolitique du monde, une opportunité historique s’offre à nous de fermer l’ère de l’Afrique des problèmes et d'ouvrir la voie de l’Afrique des solutions".

Convoitise et lutte d’influence des grandes puissances

Ce sommet se tient alors que l’Afrique suscite les convoitises et subit la lutte d’influence entre les grandes puissances internationales telles que la Chine, la Turquie, la Russie, la France et de plus en plus les États-Unis.

La présidence de Macky Sall, c’est également la lutte pour la réallocation des droits de tirages spéciaux (DTS), face aux crises provoquées par la Covid-19 sur le continent. Avant sa prise de fonction, le FMI a approuvé, en août 2021, le décaissement effectif de 650 milliards de dollars de ces actifs de réserve internationale. ‘’C’est un acquis considérable.  Mais au regard de l’impact profond de la crise, l’Afrique a besoin d’un financement additionnel d’au moins 252 milliards de dollars d’ici à 2025 pour contenir le choc et amorcer sa relance économique’’, disait-il en promettant de poursuivre le plaidoyer pour la réallocation des DTS. 

Malgré tout, c’est l’un des points sur lesquels il n’y a pas eu d’avancées majeures.

En juin 2022, le président Macky Sall s’est rendu en Russie pour ‘’contribuer à l'accalmie dans la guerre en Ukraine et à la libération des stocks de céréales et de fertilisants dont le blocage affecte particulièrement les pays africains". La manière dont il avait été reçu en tête-à-tête par le président Vladimir Poutine, en comparaison avec l’énorme table qui séparait ce dernier d’Emmanuel Macron, lors de la visite du chef d’État français quelques jours avant, avait amusé le monde. Cela fut moins drôle pour des activistes et membres de la société civile africaine qui estiment indigne qu’un continent qui dispose de 60 % des terres arables dans le monde soit obligé d’aller négocier de quoi alimenter sa population.

Alors que beaucoup de pays africains se sont abstenus, lors de votes de condamnation de la Russie pour son attaque en Ukraine, Macky Sall a déclaré à la 8e édition du Forum international de Dakar : ‘’Il ne faut pas qu’on ait l’impression que les Africains sont insensibles à la situation de l’Ukraine. Ce n’est pas ça du tout. Mais les Africains disent qu’au même moment où l’Ukraine est en guerre, est envahie, est agressée, l’Afrique est en permanence agressée par le terrorisme.’’

 D’autres dossiers ont été sujets à controverses lors du passage du président sénégalais à la tête  de l’UA, dont les sanctions contre la junte au pouvoir Mali.

Lamine Diouf

 

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