Publié le 25 Feb 2023 - 20:36
DÉRIVES RACISTES ET XÉNOPHOBES DU PRÉSIDENT TUNISIEN

La situation s’envenime pour les Sénégalais et les noirs

 

Guy Marius Sagna, dans une question adressée au gouvernement, s’est indigné du manque de réaction des autorités sénégalaises face aux propos scandaleux de Kais Saied sur l’émigration des noirs en Tunisie. Sur place, les Sénégalais sollicitent l’aide des autorités sénégalaises.  

 

‘’Qu'attend le gouvernement du Sénégal pour convoquer l'ambassadeur de la Tunisie au Sénégal et condamner les propos du président tunisien afin que la dignité et les droits des africains noirs soient respectés ?’’ La question a été posée hier au ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, Aminata Tall Sall, par l’honorable Guy Marius Sagna. Le député de la 14eme législature pose ainsi une nouvelle question au Gouvernement du Sénégal et rejoint ainsi la liste des Africains indignés par les propos tenus, mardi dernier, par le chef de l'État de la Tunisie.

S'exprimant lors d'une réunion du Conseil de sécurité nationale "consacrée aux mesures urgentes qui doivent être prises pour faire face à l'arrivée en Tunisie d'un grand nombre de migrants clandestins en provenance d'Afrique subsaharienne", le président tunisien Kais Saied a prôné en début de semaine des "mesures urgentes" contre l'immigration clandestine de ressortissants de pays d'Afrique subsaharienne, affirmant que leur présence en Tunisie était source de "violence, de crimes et d'actes inacceptables".

Guy Marius Sagna demande la convocation de l’ambassadeur de la Tunisie à Dakar

Après l’arrivée d’au moins 138 migrants clandestins qui avaient été arrêtés ou interceptés en mer, dans la nuit de mardi à mercredi (chiffres officiels), le président Saied a tenu des propos très durs sur l'arrivée de "hordes de migrants clandestins" et insisté sur "la nécessité de mettre rapidement fin" à cette immigration. Il a en outre soutenu que cette immigration clandestine relevait d'une "entreprise criminelle ourdie à l'orée de ce siècle pour changer la composition démographique de la Tunisie", afin qu'elle soit considérée comme un pays "africain seulement" et estomper son caractère "arabo-musulman".

Face à cette situation, le député activiste s’indigne que les autorités sénégalaises gardent encore le silence sur ce qui est assimilé à un véritable scandale, pour un pays qui vient de céder la présidence de l’Union Africaine. D’autant plus que ces propos ont donné suite à des agressions contre les Africains et Sénégalais en Tunisie. Ainsi, Guy Marius Sagna a exprimé toute sa préoccupation ‘’par la situation des africains noirs en Tunisie, avec la récente sortie raciste et haineuse du président tunisien sur les hordes des migrants clandestins".

Cela se matérialise, selon lui, par ‘’des bailleurs tunisiens (qui) sont en train d'expulser des Sénégalais ; dans les transports, certains conducteurs refusent que des noirs montent dans les bus ; des arrestations arbitraires sont en cours ; des étudiants qui ne peuvent plus rejoindre leur établissement universitaire de peur d'être agressés.’’

 

Les Sénégalais sollicitent l’aide des autorités

Jeudi, le porte-parole de la Garde nationale, le général de brigade Hossam Eddine Jebabli, a déclaré dans les médias que des amendes et des condamnations attendent les Tunisiens qui hébergent ou emploient illégalement des étrangers, en donnant des sommations pour leur expulsion et leur licenciement. Les conséquences de cette sortie sont immédiates pour les ressortissants sénégalais en Tunisie dont certains appellent les autorités sénégalaises à l’aide, relatant des tracasseries de la police et des populations elles-mêmes.

Malgré tout, l'ambassade du Sénégal à Tunis reste muet. ‘’On a besoin de la présence de nos autorités pour nous rassurer et mettre à notre disposition un avion pour ceux qui veulent rentrer, parce qu'on en a marre de subir le racisme et la ségrégation’’, souffle une source sous anonymat.  

Cheikh Issa Ly a quitté la Tunisie en janvier dernier, où il a obtenu son diplôme en architecture. Pour lui, il n’y a rien de surprenant dans ce qui se passe là-bas, car la discrimination contre les noirs est présente partout. ‘’Tout le monde savait que ça allait dégénérer, d’un jour à l’autre. Les mots du président de la République ont pratiquement donné le feu vert aux racistes et haineux.’’

Cheikh Issa Ly : ‘’Tout le monde savait que ça allait dégénérer d’un jour à l'autre…’’.

Les conséquences de la covid-19 et de la guerre en Ukraine sur l’économie nationale tunisienne en pleine crise ont été portées sur le dos des étrangers et particulièrement des subsahariens. L’étudiant Cheikh Issa Ly en a fait l’amère expérience. ‘’Nous avons subi une attaque en décembre 2022, avec deux compatriotes et un congolais, par un groupe de Tunisiens. La police peut vous arrêter sans raison. La carte de séjour est difficile à obtenir, même avant, tous les documents demandés.’’

Le député de la coalition Yewwi Askan n’est pas la seule personnalité politique sénégalaise à condamner les propos jugés racistes du président Tunisien. Aminata Touré, ex premier ministre et députée déchue de son mandat pour avoir démissionné de son parti (pouvoir), en a fait de même en se demandant : ‘’Qu’attendent les présidents africains pour condamner avec la dernière énergie les propos racistes et haineux du président tunisien Kais Saied envers les migrants africains ?’’ L’ancienne présidente du Conseil économique social et environnemental interpelle le président de la République Macky Sall sur des propos ‘’simplement scandaleux venant du président d’un pays membre de l’Union Africaine’’.

Ce scandale intervient alors que des ONG tunisiennes alertent sur "la montée du discours haineux et raciste sur les réseaux sociaux et dans certains médias", ainsi que sur "les violations des droits humains" des migrants. La Tunisie, où le président Saied concentre tous les pouvoirs, après avoir suspendu en juillet 2021 le Parlement et limogé le gouvernement, traverse une grave crise économique marquée par des pénuries récurrentes de produits de base, sur fond de tensions politiques.

Les Syndicalistes sénégalais soutiennent leurs camarades tunisiens

Selon M. Ben Amor, porte-parole du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), "le président instrumentalise la crise des migrants pour détourner l'attention de l'opinion publique des questions économiques et sociales en inventant un nouveau danger".  D’après des chiffres officiels cités par le FTDES, sur 12 millions d'habitants, le pays compte plus de 21 000 ressortissants de pays d'Afrique subsaharienne, en majorité en situation irrégulière.

Ces tensions s’exécutent également dans le mouvement syndical. Dans un communiqué rendu publique hier, la Confédération Nationale des Travailleurs du Sénégal (CNTS) dénonce ‘’avec une grande consternation, les tentatives de musèlement du mouvement syndical tunisien par des violations des droits syndicaux, des tentatives de remise en cause du droit de grève, des agressions, des arrestations et des emprisonnements.’’

Les syndicalistes sénégalais apportent leur soutien à leurs camarades tunisiens en condamnant énergiquement cette situation. La CNTS demande au gouvernement tunisien ‘’d’arrêter cette persécution sur les représentants des travailleurs et de respecter les libertés et droits syndicaux, conformément à ses engagements auprès de l’OIT (organisation international du travail) par la ratification des conventions 87 et 98 sur la liberté syndicale et le droit de négociation.’’

La CNTS s’associe également aux ‘’mouvements d’indignation suite au discours raciste, xénophobe et haineux du président tunisien contre les migrants subsahariens installés en Tunisie et alerte sur les dérives que de tels propos peuvent avoir sur leur sécurité.’’

Lamine Diouf 

 

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