Publié le 8 Jun 2023 - 12:22
NOTE DE L’ÉDITEUR

“EnQuête” a 12 ans…

 

Les 12 ans de votre journal auraient dû évoquer une adolescence insouciance et guillerette, sans feuille de route ni exigence de rendre compte. Ils nous trouvent, au contraire, dans une séquence adulte et responsable, l’âge de la maturité pour faire simple. Simple comme la manière dont nous comptons fêter cet anniversaire, en attendant que la tension politique retombe et que les esprits soient mieux disposés à écouter la redondance de notre viatique éditorial, à savoir que c’est dans le pluralisme d’idées que se déploie la République et que c’est la presse qui doit être la courroie de transmission de nos contradictions, pourvu qu’elles tendent toutes à satisfaire l’intérêt général.

Mais justement, par les temps qui courent, il est difficile de faire simple, car nos paradigmes sont ébranlés par les mutations de la société sénégalaise de moins en moins tolérante, où le débat est de moins en moins célébré, mais le repli sur soi de plus en plus suggéré et les crispations de plus en plus étalées.

Mais on va quand même fêter, car nous préférons célébrer de modestes acquis plutôt que de pleurer sur un sort que nous estimons dépendre essentiellement de notre capacité à performer auprès du public dans le service qui est le nôtre. Des équilibres donc mis à mal, mais pas nos convictions du début qui, elles, restent intactes. Ces convictions portent sur le processus démocratique et sa nécessaire animation par le débat d’idées, le régime des libertés publiques sans quoi nous ne serions pas, elles portent sur l’idée que le Sénégal est un pays de gens conscients de leurs droits et devoirs, à l’esprit ouvert et porté vers le progrès, dans une solidarité agissante tout en ajustant leurs pas à la marche du monde. Et surtout en suivant le rythme des pulsations collectives des Sénégalais.

Or, que révèle cet électrocardiogramme ? Son tracé révèle un corps social agité par des soubresauts politiques liés principalement à la fin du consensus électoral qui prévalait depuis les années 90. Les lignes révèlent surtout de grands malentendus intergénérationnels au sujet de la marche de nos institutions, de l’histoire de nos acquis démocratiques, de notre système de dévolution du pouvoir politique, voire de la mystique du travail et du mérite et, in fine, au sujet de la conversation propre aux communautés où les gens se parlent, car ils sont des hommes tout simplement. Les anniversaires ne valent que s’ils constituent des ponts jetés vers l’avenir.

Notre grand corps est pris d’arythmie et c’est par la circulation de valeurs vivifiantes comme l’innovation, la réforme, la justice sociale, le refus de la médiocrité, l’amour de soi que nos canaux vivifiants seront à nouveau irrigués. C’est à la restitution de ce récit constitutif du visage du Sénégal de 2023 et de son avenir que s’attèle ‘’EnQuête’’ tous les jours.

Douze ans donc. Les enjeux du dehors comme ceux propres à la presse nous font apprécier le chemin parcouru, avec la perspective d’un basculement digital vers la plate-forme ‘’EnQuête+’’, jumelle d’un journal formulant au quotidien une offre informée, explicative et investigatrice. La presse est malmenée, son crédit entamé, son environnement économique hostile et le public de plus en plus ‘’numérisé’’. Ceux qui lisent sont donc motivés. Ils sont certes connectés comme tout le monde, mais ils ne sont pas encore happés par les écrans. La lecture, a dit quelqu’un, c’est la volupté des temps incertains.  

 

Section: