Le retour aux sources
Le textile africain a été mis à l’honneur par six designers de trois pays (Sénégal, Côte d’Ivoire, Allemagne) à travers des créations originales, pour montrer leur appartenance et le retour à la tradition africaine. Un projet de Baobab créations pour la revalorisation de la mode et de la culture du continent noir.
Le musée des femmes Henriette Bathily accueille l’exposition de Baobab créations qui veut valoriser le textile africain, du 2 au 18 novembre 2023. Le vernissage a été marqué par des tableaux qui ont montré la façon dont les six designers ont travaillé le tissu. Il s’en est suivi un défilé avec leurs créations textiles. Chacune porte une histoire sur le patrimoine ancestral et conscientise pour un éveil culturel. Il y a aussi eu une démonstration sur la façon de tisser un pagne.
Ce projet a été pensé avant la Covid-19, selon Maimouna Dembélé, l’une des initiatrices. ‘’On a démarré, il y a un an et demi de cela. Il y a eu l’appel à la candidature. Le Sénégal a été choisi, mais on voulait aussi la participation d’autres pays africains. Vu que le budget est un peu chaud, on a pris la Côte d’Ivoire pour tout ce nous lie avec ce pays et il y a aussi eu l’Allemagne, car il a financé ce projet’’, renseigne-t-elle.
Elle est revenue sur le concept Wulinas : ‘’Wulinas, c’est six designers qui ont été retenus qui ont ressorti cette histoire. C’est un royaume imaginaire. Ils se sont posé la question de savoir comment auraient évolué nos pagnes, si nous n’avions pas été colonisés ? Wulinas appelle les gens à retourner à la source’’, souligne-t-elle.
Madame Dembélé d’ajouter : ‘’Ce qui a été très important pendant ces un an et demi, c’est la transmission. Aujourd’hui, on se rend compte que les gens de la vieille génération se souviennent que nos mamans avaient des tisserands devant leurs portes. Cette transmission, c’était un métier noble qui était là, qui se faisait et, malheureusement, si on ne prend pas garde, disparaitra. C’était une façon de sublimer les héritages que nous ont laissés nos arrière-grands-parents’’.
Pour sa partenaire de projet, Myriam Ciré Camara, le tissu est très important dans toutes les sociétés africaines. ‘’Le tissu représente beaucoup de choses. Il est utilisé dans beaucoup de situations, des moments clés dans la vie, comme la naissance, le mariage, le décès. Le tissu transporte les valeurs, la spiritualité, l’histoire. Nous avons choisi de travailler avec les pagnes tissés, surtout celles des Mandjacks, car c’est une culture très riche. Tous les designers ont travaillé sur de nouveaux designs, en employant les anciennes techniques et traditions, et en gardant aussi cet esprit’’, dit-elle.
D’après elle, il est important d’écouter et de travailler avec la nouvelle génération, de pouvoir jouir de leur inspiration, de leur créativité. Elle révèle que c’est un projet panafricain. ‘’L’Afrique est un continent très riche et nous savons qu’il y a beaucoup de choses sur lesquelles nous pouvons nous entendre, même si l’on ne parle pas la même langue. Le tissu permet d’exprimer cela. Nous avons pu créer ce projet panafricain avec beaucoup d’amour. Les six designers ne viennent pas seulement de différents pays d’Afrique, mais avec des histoires et biographies différentes. Ils sont tous pour une nouvelle d’Afrique’’, lance Mme Camara. Ajoutant que décoloniser, c’est le faire avec ce que l’on porte.
Maicha Marylise Konaté est designer textile et artiste peintre. Elle vient de la Côte d’Ivoire et fait partie des six choisis. La demoiselle dit avoir appris beaucoup de choses à travers ce projet, comme l’humilité, la teinture textile, la broderie et aussi de nouvelles personnes. ‘’J’ai envie de créer mon propre pagne et c’est que j’ai voulu montrer par mes créations. J’ai eu envie de montrer ma diversité’’, déclare la jeune Ivoirienne.
Kamal, lui, fait partie de ceux qui ont encadré les jeunes. Il appelle à la valorisation du textile artisanal. ‘’Toutes ces créations, c’est pour montrer que l’on doit croire en l’artisanat local, pour le valoriser. Et pour le promouvoir, on doit faire ces créations. Cela demande de la formation, des échanges. Le domaine artisanal est colossal. Les autorités doivent permettre à nos artisans d’aller dans des zones comme l’Asie ou l’Océanie, pour échanger sur les techniques, pour pouvoir réaliser des pagnes. C’est l’objectif de ce projet de valoriser le textile africain et de l’exposer’’, dit-il.
NDEYE KHOUDIA DIENG (STAGIAIRE)