Publié le 9 Feb 2024 - 13:37

Rejetez cette loi anticonstitutionnelle pendant qu’il est encore temps !

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Nul n’a droit qu’à faire son devoir !

Mesdames, Messieurs les sages, membres du Conseil constitutionnel,

Permettez-nous un rappel

Le peuple sénégalais  conscient de la gravité  de la question de la  démocratie et de l'intégrité électorale dans notre nation  appelle fermement le Conseil constitutionnel à rejeter la loi visant à reporter l'élection présidentielle. Cette loi, présentée comme une mesure de nécessité face à des circonstances de « crises » a été adoptée dans  une confusion certaine. Des députés femmes et hommes ont été évacués manu militari de l’hémicycle. Une image déroutante digne d’un vieil autoritarisme. Il est donc d’une évidence que ce projet porte en lui de funestes menaces pour nos institutions et nos valeurs sociétales fondamentales.

Ce texte viole les principes démocratiques

Le droit de chaque citoyen à choisir ses représentants par le biais d'élections libres et équitables est un pilier fondamental de toute démocratie. En repoussant l'élection présidentielle, le gouvernement menace directement ce principe républicain inamovible, en privant le peuple de son droit souverain de choisir son chef de l’État de façon non héréditaire par la voie électorale qui se tient selon une durée de mandat de 5 ans, à partir du dernier dimanche du mois de février.

Mesdames, Messieurs les sages, vous devez la vérité au peuple sénégalais, à l’histoire de  notre cher nation. Faisant référence à la jurisprudence du 18 janvier 2006, cette loi peut bel et bien faire l’objet de contrôle constitutionnel puisqu’étant du domaine de l’intangibilité. Ne rompez point de manière définitive la confiance du peuple avec ce qui reste de certaines institutions ! Vous avez un rendez-vous inratable avec l’histoire du Sénégal.

Risque d'Abus de Pouvoir

Le report de l'élection présidentielle ouvre la porte à des abus accrus de pouvoir. Un de plus entacherait à vie, l’illustre réputation d’exemple d’une démocratie réadaptée et inclusive . Celle dans laquelle les discussions, la conformité avec les institutions cultuelles et religieuses était de rigueur. La suspension de ce processus électoral crée un vide politique prolongé qui pourrait être exploité pour des gains  partisans, menaçant ainsi l'équité du processus électoral ainsi que sa légitimité. De plus, cela pourrait permettre à l'exécutif de prolonger indûment son mandat, violant ainsi le respect de la Constitution et celui de la souveraineté populaire.

Danger pour la Stabilité Politique et Sociale

Le prolongement anticonstitutionnel du mandat du président de la République laisserait entrevoir  des tensions politiques et sociales, compromettant ainsi, la stabilité, déjà menacée du pays. Un report imprévu pourrait déstabiliser les institutions et conduire à des troubles civiles, mettant en péril la paix et la cohésion nationale. Mesdames, Messieurs les sages, ne cédez pas aux caprices dialogiques et à la polyphonie d’un chef de l’État. Ipso facto, il devra faire ses adieux au peuple le 2 avril 2024. Mesdames, Messieurs les sages, en dehors de toute considération juridique mettant en exergue la clause d’éternité sur laquelle porte la durée du mandat du Président, défendez la sacralité de l’unicité de la parole donnée, une valeur intrinsèquement liée à nos référentiels. 

 Outre cette part sacro-sainte, la stabilité politique et sociale  est essentielle au développement socio-économique et à la prospérité du Sénégal. Elle permet  à la jeunesse à laquelle, nous devons une éducation, de rejoindre les salles de cours du primaire au cycle universitaire, perturbé depuis plusieurs mois. Presque une année de plus déstabiliserait davantage notre pays qui vacille déjà  depuis 2021. Inutile de rappeler les dessous d’un tel cataclysme. Restant dans la légalité,  il n’est pas question d’anticiper le départ du chef de l’État. Il relève d’une organisation de scrutin calme, sécurisé et démocratique auquel il ne participera, s’il veut bien, qu’en tant qu’électeur. Le chantier de la reconstruction des valeurs institutionnelles, celui du « resserrage » des liens concitoyens parallèlement aux édifices qu’il nous aura laissés comme réalisations, appartiendront au peuple et à son successeur.

Affaiblissement de la Confiance Publique

La décision de reporter l'élection présidentielle risque de miner la confiance du peuple sénégalais dans le processus démocratique et dans les institutions chargées de le protéger. Mesdames, Messieurs les sept sages, vous en représentez une et pas n’importe laquelle : le Conseil constitutionnel.

Une fois piétinée,  la confiance restante serait difficile à restaurer et pourrait avoir des conséquences durables sur l'engagement citoyen et la participation électorale. L'intégrité du processus électoral doit être préservée pour garantir la représentativité et la légitimité du gouvernement.

Précédent Dangereux

Mesdames, Messieurs les sages, le Conseil constitutionnel à compétence à contrôler cette loi. Encore une fois, les articles sur lesquelles elle porte, relèvent d’une intangibilité. Le Conseil constitutionnel est d’ordre public. Dites le droit sur l’inconstitutionnalité de cette loi. La Constitution fixe et réglemente l’élection présidentielle, il n’est pas du  ressort de l’Assemblée nationale. Ainsi, accepter le report de l'élection présidentielle crée un périlleux précédent qui pourrait être invoqué à l'avenir pour justifier d'autres atteintes à la démocratie, aux droits des citoyens et à une suite de coups d’État. Avènement que notre histoire politique ignorait jusqu’ici. Il est impératif de résister à toute tentative de normaliser de telles pratiques anti-démocratiques. Le respect des normes et des principes constitutionnels est essentiel pour assurer l'avenir de notre chère nation et préserver les acquis démocratiques durement gagnés.

Mesdames, Messieurs les sept sages, nous vous exhortons à prendre un rendez-vous symbolique et honorable  avec le peuple sénégalais. Défendez avec lui, les principes démocratiques, la primauté du droit, la vérité que vous serez prêts à soutenir de nouveau, le jour du jugement, celle de la  volonté populaire.

 Mesdames, Messieurs, le Sénégal a toute son image flétrie ces derniers jours au niveau international, à redorer. La balle est dans votre camp. Le respect du texte fondamental, des droits principiel et de la volonté du peuple sénégalais doit rester la pierre angulaire du système politique sénégalais. Les hommes et femmes passent, les institutions demeurent ! À l’instar de certains, faites le choix d’être cités en bon exemple. Le temps le rappellera.

Nous appelons à l'unité et à la vigilance de tout le peuple, véritable gardien de la Constitution pour défendre la démocratie et les valeurs qui nous unissent en tant que nation sénégalaise.

Un peuple-Un but- Une foi ! « Senegal moy njëk, moy mudj”

 

Ndeye Astou Ndiaye
Maitresse de conférences titulaire
Science politique
UCAD/FSJP
S.E Nubianlane IRAP

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