Publié le 3 Oct 2024 - 16:41
LUTTE CONTRE L’INSÉCURITÉ DANS LE CENTRE DU PAYS

La recette du général de brigade Jean Diémé 

 

Conflits entre agriculteurs et éleveurs, cambriolages de domiciles et de magasins de stockage de récoltes, attaques récurrentes contre des services publics. Voilà quelques-uns des cas d’insécurité observés dans la zone centrale du pays. Pour y faire face, selon le général de brigade Jean Diémé, le directeur général du Centre des hautes études de défense et de sécurité (CHEDS), il est nécessaire de bâtir de nouvelles synergies, particulièrement en matière de prévention.

 

Le général de brigade Jean Diémé, directeur général du Centre des hautes études de défense et de sécurité (CHEDS), a présidé, hier, à Kaolack, le séminaire de lancement du Programme collectivités territoriales, défense, sécurité et paix (PCTDSP) dans la zone Centre. Selon lui, ce programme, fruit d’un partenariat fécond entre la fondation Konrad Adenauer (FKA) et le CHEDS, vise à renforcer les capacités des collectivités territoriales sénégalaises en matière de sécurité pour l’édification et le maintien d’environnements sécurisés propices à la cohésion sociale et au développement. Il a été lancé en juillet 2021 à Dakar et a, depuis, couvert les quatre autres localités du pays, notamment les zones Ouest (2021), Nord (2021), Est (2022), Sud (2023) et, hier, c'était la zone Centre, permettant un maillage complet du territoire national.

‘’Le contexte sécuritaire actuel, marqué par l’apparition de nouvelles menaces et l’enchevêtrement de celles-ci, a conduit inéluctablement à une redéfinition de la sécurité, avec la nécessaire prise en compte de nouveaux acteurs : les jeunes, les femmes et les autorités administratives déconcentrées et décentralisées. Si l’individu est à la fois considéré comme sujet et acteur de l’insécurité, les collectivités territoriales dans lesquelles il vit doivent être en mesure d’apporter une réponse adéquate à toutes les formes d’insécurité qui en émanent. C’est la raison pour laquelle le CHEDS, dans sa mission de concrétisation de cette nouvelle approche de sécurité dite 'inclusive', s’évertue, depuis sa création en 2013, à jeter les bases d’une réflexion stratégique à travers des canaux concertés de prise en charge adéquate et adaptée des problèmes liés à la sécurité’’, souligne le général Diémé.

Selon le DG du CHEDS, avec ce programme, le centre accompagne les collectivités territoriales dans la prise de conscience de leurs rôles et leurs responsabilités en matière de sécurité, puis dans le développement de leurs aptitudes à être initiateurs de changement et garants de stabilité. ‘’Cette démarche, explique-t-il, s’inscrit dans la dynamique propulsée par l’Acte III de la décentralisation pour faire de nos collectivités des territoires 'viables, compétitifs et porteurs de développement durable'. À l’instar des autres zones où se sont tenus des séminaires de lancement du PCTDSP, la rencontre d’aujourd’hui (hier) est l’occasion de réfléchir ensemble sur les défis sécuritaires auxquels font face les populations de la zone Centre".

Les tensions liées à la gestion de la frontière entre le Sénégal et la Gambie

En effet, dans cette zone Centre, qui regroupe les régions de Diourbel, Fatick, Kaffrine et Kaolack, les défis sécuritaires sont nombreux et multiformes. ‘’Aux tensions récurrentes liées à la gestion de la frontière entre le Sénégal et la Gambie, indique le général Diémé, viennent se greffer les conflits entre agriculteurs et éleveurs, du fait de l’absence, de la mauvaise délimitation ou de la méconnaissance par les pasteurs des couloirs de passage’’.

La zone, poursuit le patron du CHEDS, fait également face à des cambriolages de domiciles et de magasins de stockage de récoltes ainsi qu'à des attaques récurrentes contre des services publics. À côté de cela, le trafic et la circulation d’armes à feu sur l’axe Touba, Kaffrine et Koungheul, le vol de bétail, les litiges fonciers, les conflits communautaires, sans oublier la problématique du trafic de bois, plus particulièrement dans la zone Koungheul et Ida Mouride, contribuent, entre autres, à l’insécurité de la zone.

"Dans ces conditions, il nous est apparu important d’inviter les acteurs majeurs que vous êtes : collectivités territoriales, forces de défense et de sécurité et membres d’organisations de la société civile, à bâtir de nouvelles synergies, particulièrement en matière de prévention. C’est donc tout naturellement que les regards pourraient se tourner vers les maires en tant qu’élus locaux et promoteurs des dynamiques sociales et associatives des communes, dans cette construction de la sécurité collaborative. Ma conviction est qu’en réalité, l’heure est venue d’envisager une forme de co-production de la sécurité dans nos territoires. Une fois cette conviction partagée, il ne restera alors qu’à en définir les contours à travers des questions non exhaustives, mais factuelles que sont : sur quelles bases juridiques et sociales ? Avec quels acteurs clés ? À travers quels mécanismes ?", s'interroge le général Diémé.

De son côté, Fatoumata Sy Guèye de la fondation Konrad Adenauer, est d’avis qu’aujourd’hui, on parle plutôt de gestion sécuritaire participative et inclusive ou bien de sécurité collaborative, justement parce que différents acteurs peuvent et doivent contribuer, chacun avec son expertise de la région et du contexte. "Ce n’est plus seulement l’État le détenteur du monopole de la sécurité. Cette réorientation stratégique va vers le renforcement des mécanismes de prévention de la délinquance de manière globale. Elle s’articule beaucoup plus autour des autorités territoriales et des organisations sur place.

Donc, ce programme vient à son heure, avec l’objectif de faire un état des lieux de la connaissance sur les causes de l’insécurité, sur le rôle et les missions des différents acteurs, et sur un modèle de gouvernance locale des questions de sécurité adossé à des outils pratiques", a confié Mme Sy.

CHEIKH THIAM

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