Publié le 23 Oct 2024 - 12:14
NON-PAIEMENT DE 44 AGENTS DU FONDS MINIER

Une affaire d’irrégularités contractuelles et financières

 

Le Ministère de l’Énergie, du Pétrole et des Mines a réagi hier dans un communiqué aux informations concernant le non-paiement de 44 agents du Fonds minier. La tutelle a tenu à apporter quelques clarifications face à cette situation qui soulève des interrogations.

 

Le « Collectif des 44 Agents en Cessation d’Activités du Ministère de l’Énergie, du Pétrole et des Mines (CACAMEPM) » accuse le Ministère de l’Énergie, du Pétrole et des Mines de « licenciement abusif ». Dans un mémorandum adressé au président de la République, ces anciens agents du fonds minier réclament : « le paiement total et intégral de tous leurs arriérés de salaires du mois de juin 2024 à ce jour ; le paiement total et intégral de tous leurs arriérés d’indemnités supplémentaires du mois d’avril 2024 à ce jour ; la reprise de leur travail avec l’amélioration de leurs conditions de travail sur le plan moral, matériel et social ; et (leur) intégration dans la fonction publique ».

Ce n’est pas tout, ils demandent aussi « le paiement de dommages et intérêts pour réparation des préjudices subis durant cette période de cessation d’activités illégale » ; le respect total de leurs contrats qui, selon eux, ne souffrent d’aucune irrégularité. Mieux encore, ils réclament l’augmentation de leurs salaires et des indemnités pour chacun des 44 agents.

Mais le ministère de tutelle ne l’entend pas de cette oreille. Il a publié, hier, une note explicative dans laquelle on apprend que « le Fonds de Développement Minier a été créé par l'arrêté n° 12581/MEF/DGT/TG du 26 octobre 1981 portant création d'une caisse d'avance dénommée « Fonds de Développement Minier », dont le plafond est fixé à cinquante millions (50 000 000) de francs CFA ». Ce fonds, poursuit la note, a pour objectif de financer diverses dépenses liées aux activités minières, telles que l’achat de matériel géologique, les frais d’analyses ou les salaires des personnels temporaires et journaliers affectés au contrôle des carrières.

Toutefois, avec le temps, souligne-t-on, les besoins ont largement dépassé le plafond initialement fixé et la gestion des ressources humaines via ce fonds a montré d’importantes limites, car il y avait des implications financières. « Actuellement, les ressources allouées audit Fonds s'élèvent à 818 000 000 francs CFA, ce qui ne couvre même pas le montant requis pour la prise en charge annuelle de tous les agents, qui est de 1 056 012 064 francs CFA, soit un dépassement de 238 012 064 francs CFA pour lesquels un autre Fonds, non destiné au paiement de salaires, a été activé », informe la tutelle.

À cela s’ajoute le fait qu’un Fonds non destiné aux paiements de salaires des permanents a été utilisé et qu’un autre, tout aussi inapproprié à ces paiements, a également été mobilisé pour solder le différentiel, renseigne le ministère. D'ailleurs, poursuit-il, « l'analyse des dossiers trouvés sur place montre que des opérations financières consistant à recourir à d'autres sources de financement non autorisées ont été effectuées pour payer les agents jusqu'à la fin de l'année ».

En outre, pour compenser ce déficit, dit-on, d'autres fonds non destinés au paiement de salaires ont été utilisés, une pratique jugée non conforme au droit budgétaire. Sans oublier des dettes sociales importantes, dépassant les 100 millions de francs CFA, dues à l'Institution de Prévoyance Retraite du Sénégal (IPRES) et à la Caisse de Sécurité sociale, ajoutant ainsi une autre couche de complexité à la situation financière du Fonds minier et exposant « le gestionnaire du Fonds à d'éventuels risques ».

Des contrats jugés irréguliers

D’après le ministère, « le récapitulatif du personnel montre que 290 personnes avec des contrats à durée indéterminée sont payées à travers ledit Fonds. Par ailleurs, les 44 nouveaux contrats signés entre la fin 2023 et mars 2024 n’ont pas été validés par les autorités compétentes ».

Pour une meilleure appréciation, renseigne la note, l'autorité a saisi respectivement l'Agent judiciaire de l'État et le Ministre chargé du travail par lettres n° 00100/MEPM/SG/CN/sst du 20 juillet 2024 et n° 5777/MEPM/SP du 13 juin 2024 sur la prérogative du Ministre chargé des Mines à signer des contrats de travail au titre du Fonds de Développement Minier.

Or, les deux autorités sollicitées « sont unanimes sur l'irrégularité de ces contrats ». Le ministère en profite pour rappeler que, selon le Code du Travail, le secteur des Mines est soumis à des dérogations spécifiques qui interdisent la signature de CDI en raison du caractère temporaire des activités. De plus, le Fonds étant dépourvu de personnalité morale, il ne peut être reconnu comme employeur permanent.

Ainsi, face à ces difficultés, le Ministère de l’Énergie, du Pétrole et des Mines a annoncé une série de mesures pour régulariser la situation, à savoir : « la cessation du paiement des 44 agents dont les contrats sont jugés irréguliers et non validés par l’inspection du travail ; la mise en place d’un diagnostic approfondi des recrutements antérieurs afin d’identifier les profils inadéquats et d’évaluer les besoins réels des services ; et enfin, une demande de rallonge budgétaire qui a été adressée au Ministère des Finances pour couvrir les salaires jusqu’à la fin de l’année et régler une partie des dettes sociales ».

THECIA P. NYOMBA EKOMIE

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