Le sud du pays, zone de résistance
Dans le cadre de la lutte contre la mortalité maternelle et néonatale, des efforts ont certes été réalisés, mais le sud du pays est à la traine avec des résultats mitigés.
Venu présider l’atelier de validation politique du Plan stratégique (SRMNIA-N) 2024-2028 et du Plan d’action national budgétisé de planification, le Directeur de la Santé de la mère et de l'enfant (DSME) a confié qu'en ce qui concerne la mortalité infantile, le Sénégal a un taux de mortalité chez les enfants de moins d'un an de 31 pour 1 000, avec des disparités régionales, surtout au sud du pays.
S’agissant de la mortalité infantile ou juvénile, le docteur Amadou Doucouré indique que le Sénégal est à un taux de 40 pour 1 000, avec également des disparités régionales, surtout au Sud. Car il existe des régions où le taux est acceptable, c'est-à-dire inférieur à la moyenne nationale, mais il reste encore des efforts à fournir dans toutes les régions.
Pour la mortalité maternelle et la grossesse, le Sénégal en est à 154 pour 1 000. Et le recensement général de l'habitat et de la population, ajoute-t-il, parle de 216 pour 1 000. ‘’Nous avons illustré cela en prenant en compte les décès issus du recensement général de la population. Vous voyez qu'il y a des efforts qui sont faits, mais il y a encore de réels défis. La problématique de la mortalité maternelle et néonatale est un combat de tous les jours. Concernant l'abandon, nous avons connu une légère régression, passant de 17,9 % à 17,5 %. Cependant, il existe des régions critiques comme Kédougou, Tambacounda, Matam et Saint-Louis, tandis que des régions comme Ziguinchor affichent un taux acceptable’’, renseigne le Dr Doucouré.
Le médecin rappelle que les hémorragies constituent encore aujourd'hui, même au niveau mondial, la première cause de mortalité maternelle. Même au Sénégal, c'est la même tendance, suivie par l'éclampsie et l'après-éclampsie. Cela signifie, selon lui, que si les efforts sont redoublés en ce qui concerne la présentation de l'éclampsie, de l'après-éclampsie, de l’hémorragie et du post-partum, le Sénégal pourra réaliser d'importants gains.
Par contre, ‘’aujourd'hui, concernant les décès infantiles juvéniles, la pneumonie et la diarrhée, d'après l'ADS 2023, constituent les principales causes de mortalité infantile. Il y a des défis persistants et je pense que ce plan doit adresser ces défis. La mortalité maternelle et la santé néonatale nécessitent d'importants efforts. Aujourd'hui encore, il faut que nos circuits sanitaires disposent de blocs dédiés aux soins néonatals. Il faut que dans les centres de santé, les équipes soient renforcées. La disponibilité des produits est essentielle. L'autre défi est la fidélisation du personnel spécialisé dans les régions de l'intérieur ainsi que la disponibilité des médicaments d'importance vitale, du sang et de ses produits dérivés. Il est également crucial de garantir la disponibilité et le partage de données de qualité pour améliorer la prise de décision’’, plaide le directeur de la Santé de la mère et de l'enfant.
Prise en charge de l'infertilité et de l'infécondité
Il souligne également que la prise en charge de l'infertilité et de l'infécondité est extrêmement importante, car ces domaines font partie de la santé de la reproduction et des 13 composantes de la santé reproductive, selon l'OMS. ‘’Des efforts sont en cours en termes de formation et de coaching. L'OMS reconnaît cette stratégie comme efficace pour lutter contre la mortalité maternelle, mais il reste encore beaucoup à faire. Je pense qu'il est crucial d'auditer l'ensemble des décès maternels, au moins 25 % des décès néonatals, et d'assurer la remontée de l'information au niveau central, tout en mettant en place des comités de suivi pour l'application des recommandations’’, indique le docteur Amadou Doucouré.
Concernant la santé néonatale, le défi, à ses yeux, est de créer des unités de néonatologie légères. ‘’Au niveau des structures de santé de type 2, nous devons disposer d'unités de néonatologie ainsi que des services de néonatologie dans les EPS, avec un personnel et un équipement qualifiés. La mise en place de coins pour les nouveau-nés respectant les normes dans les services de maternité est également essentielle. La systématisation des notifications des décès néonatals et des mort-nés, ainsi que la réalisation d'audits des décès néonatals sont nécessaires. Là encore, il faut garantir la disponibilité des produits et des soins essentiels’’, plaide-t-il.
Soulignant que le programme est performant, il indique que les progrès réalisés doivent être maintenus et accélérés. ‘’La mise en place et la pérennisation de l'oxygène de thérapie dans tous les districts sont une priorité. L'option du ministère de la Santé et de l'Action sociale, informe-t-il, est de créer des espaces pour adolescents dans les centres de santé ainsi que des bureaux pour jeunes dans les postes de santé. Le financement durable des activités de santé des adolescents, le renforcement des capacités des acteurs communautaires, la mise en place de blocs d'hygiène sensibles et la gestion de l'hygiène menstruelle dans les écoles ainsi que l'intégration des services hygiéniques dans le circuit de distribution, sont également des priorités. Enfin, il est crucial de signer le décret d'application de la loi SR, en attente depuis 2005’’, lance-t-il.
Selon le directeur de la Santé de la mère et de l'enfant, leur ambition est d'atteindre un taux de 110 % en 2030, de diminuer la mortalité infantile à 29,7 % et la mortalité maternelle à 20 %. Ce faisant, ils parviendront à l'amélioration de la santé de la mère, de l'enfant et du nouveau-né, en s’appuyant sur ‘’la bonne gouvernance, la transparence, l'engagement, le professionnalisme et le leadership à tous les niveaux’’.
CHEIKH THIAM