Comment Makacolibantang est sortie de la liste rouge

Parmi les zones figurant sur la liste rouge du paludisme, il y a la région de Tambacounda. Makacolibantang, qui se trouve dans cette région, est un modèle dans la lutte contre le paludisme, ayant réduit son taux de 279 ‰ en 2019 à 64 ‰ en 2021. Quelles sont les stratégies qui ont permis cette avancée ?
Makacolibantang, cette commune de la région de Tambacounda, est composée de 138 villages, avec une population de 52 984 habitants en 2023, selon le dernier recensement de l'Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD). Cette population est répartie, entre 27 287 hommes et 25 699 femmes, sur une superficie de 2 477 km², ce qui donne une densité de 21,3 habitants au kilomètre carré.
La particularité de cette partie de l'Orient sénégalais est qu'elle se distingue dans la lutte contre le paludisme, alors que la région, de même que Kolda et Kédougou, figure sur la liste rouge de cette maladie au plan national. Depuis 2009, grâce à l’appui de partenaires techniques et financiers (PTF), le Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP) élabore des stratégies visant à interrompre la transmission du paludisme.
Ces activités étaient à l’état pilote dans certains districts, notamment celui de Richard Toll. À partir de 2016, le Plan stratégique national (PSN) 2016-2020 a amorcé la marche vers l’élimination du paludisme au Sénégal, avec pour objectif de réduire la morbidité et la mortalité liées au paludisme d’au moins 75 % par rapport à 2015, tout en atteignant la pré-élimination dans la zone Nord. L’évaluation de ce PSN a révélé que les indicateurs avaient évolué favorablement à l’échelle nationale, avec une prévalence parasitaire diminuée de 3 % à 0,3 % entre 2013 et 2019, une mortalité liée au paludisme réduite de 51 % entre 2015 et 2019, et une diminution de la morbidité proportionnelle de 37,6 % pour la même période.
Le Sénégal, à travers le PNLP, a réaffirmé sa volonté d’atteindre l’élimination du paludisme en 2030, conformément aux recommandations de la stratégie technique mondiale 2016–2030 de l’OMS.
Cependant, l’évaluation des performances de l’année 2021 a révélé une évolution défavorable de la plupart des indicateurs clés. En effet, une augmentation de 6,97 % des décès liés au paludisme a été notée, avec 399 décès en 2021 contre 373 en 2020. De plus, les cas confirmés ont augmenté de 20,56 %, passant de 445 313 en 2020 à 536 850 en 2021, soit une incidence qui a varié de 26,8 ‰ à 31,2 ‰, correspondant à une variation de + 17 %.
Dans ce contexte, l’Association des journalistes en santé, population et développement (AJSPD), en partenariat avec la fondation Bill & Melinda Gates, a organisé une visite de presse pour documenter les bonnes pratiques sur le paludisme dans une zone cible à Tambacounda, principalement à Makacolibantang, qui se distingue dans la lutte contre le paludisme.
Selon le superviseur des soins de santé primaire du district sanitaire de Makacolibantang, malgré les rétentions d'information du syndicat de la santé, qui rendent difficile l'obtention de chiffres récents, des efforts ont été réalisés dans leur structure. Selon Malamine Thiam, en 2019, le taux de paludisme était de 279 ‰, 104 ‰ en 2020 et 64 ‰ en 2021. Cela signifie qu’en 2018, chez les moins de 5 ans, 3 254 cas ont été enregistrés, et chez les plus de 5 ans, 14 479 cas ainsi que 231 cas chez les femmes enceintes. En 2019, les chiffres étaient respectivement de 1 485 pour les moins de 5 ans, 10 029 pour les plus de 5 ans et 201 pour les femmes enceintes. En 2020, on comptait 1 312, 8 115 et 110, et en 2021, 796, 4 136 et 76.
Les stratégies adoptées
En outre, il a informé que Makacolibantang polarise 13 postes de santé. Pour atteindre ces résultats, il a listé plusieurs stratégies, dont la prise en charge des cas à domicile (PECADOM) gérée par des acteurs communautaires formés à cet effet, qui effectuent la prise en charge à domicile dans les villages où ils sont désignés.
Cette stratégie consiste à faire en sorte que le relais se déplace chaque semaine dans chaque ménage pour dépister les enfants fébriles. Une fois l'enfant dépisté, il est évalué pour déterminer s'il a le paludisme. Si c'est le cas, il est traité ; sinon, il est référé au poste de santé pour une prise en charge appropriée.
Il existe également la stratégie Peca-Dara, qui fonctionne de manière similaire, mais au niveau des ‘’dara’’ et des écoles, où la prise en charge est effectuée par des acteurs formés. En cas de signe de gravité, le cas est référé directement à la structure de santé appropriée.
La CPES (chimie préventive du paludisme saisonnier) cible chaque année les enfants âgés de 3 mois à 120 mois. "C'était une stratégie qui a fait ses preuves, car nous l'avons mise en œuvre de juillet à septembre. Pendant ces mois, nous avons observé une baisse significative des cas de paludisme chez cette population vulnérable. L'année dernière, face à des réticences et des refus concernant la CPES, nous avons couplé cette stratégie avec un dépistage actif du paludisme, permettant aux mères de faire dépister leurs enfants avec un test de diagnostic rapide. Si le cas est confirmé, la prise en charge est faite immédiatement", a précisé M. Thiam.
Toujours dans le cadre des stratégies, il a évoqué la pulvérisation des chambres éligibles pour détruire les anophèles présents à Makacolibantang. La pulvérisation est une stratégie pour contrer la transmission.
Il y a également le TPI (traitement préventif intermittent communautaire) dédié aux agents communautaires formés et la cartographie des femmes enceintes élaborée par les infirmiers-chefs de poste. Après cette cartographie, les relais sont désignés pour aller voir les femmes enceintes. "Tout cela, cumulé avec la distribution des Milda (moustiquaires imprégnées d'insecticide à longue durée d'action), a été déterminant pour atteindre ces résultats. Je souhaite également que le PNLP continue de chercher des partenaires pour soutenir ces stratégies", a indiqué M. Thiam.
Quatre décès de neuropalu enregistrés en 2024
Concernant les cas de neuropalu, M. Thiam a signalé que l'année dernière, quatre décès avaient été enregistrés, dont deux chez les moins de 5 ans et deux chez les plus de 5 ans. En 2023, le nombre de décès était également de quatre dans leur zone.
Parmi les contraintes, il a mentionné l'enclavement de la commune, surtout durant la saison des pluies, ainsi que le remplacement de l'USAID par d'autres partenaires, à la suite du retrait de cette agence. D'autres alternatives ont également été évoquées.
À la question de savoir comment ils comptent maintenir la cadence, il a répondu que des réflexions étaient en cours pour éviter de reculer et de retomber sur la liste rouge.
RÉGION DE TAMBACOUNDA, ENTRE 2019 ET 2024 565 486 cas de paludisme et 279 décès enregistrés Pour le directeur régional de la Santé de Tambacounda, malgré des données incomplètes, 77 497 cas de paludisme ont été enregistrés en 2022. Selon Bayal Sall, la région dispose d'un hôpital, de sept centres de santé publics, de 156 postes de santé publique, de 28 structures privées de soins, de 111 cases de santé et de 1 019 Pecadom, soit au total 1 322 structures sanitaires. Concernant l'évolution du nombre de cas de paludisme dans la région, on a enregistré 97 079 cas en 2019, 128 549 en 2020, 133 906 en 2021. Avec des données incomplètes, il y avait 77 417 cas en 2022, 62 103 en 2023 et 66 424 en 2024. Pour l'évolution du nombre de décès, les chiffres sont les suivants : 44 en 2019, 58 en 2020, 63 en 2021, 43 en 2022, 30 en 2023 et 41 en 2024. Les points forts de cette lutte, selon lui, sont l'appui des partenaires techniques et financiers, le renforcement des capacités de tous les acteurs à chaque niveau, la bonne disponibilité des intrants pour la prévention et la contractualisation avec les OCB et les radios communautaires pour la sensibilisation. Parmi les points faibles, il a évoqué le recours tardif aux soins par la population, l'appropriation de la lutte contre le paludisme par la communauté, et la recherche sur la faisabilité de la réduction de l'incidence palustre par l'administration de masse de médicaments (AMM) et l'utilisation des Milda dans les districts sanitaires de Tambacounda. D'après lui, le renforcement de la mise en œuvre du Traitement préventif intermittent (TPI) avec l'administration de la SP chez les femmes enceintes à partir de la deuxième dose est essentiel, tout comme la réduction de l'incidence palustre à moins de cinq cas pour 1 000 enfants et la réduction de la mortalité liée au paludisme à 0 cas. |
CH. THIAM