Adresse à Tamsir Jupiter Ndiaye
Tamsir !.. Je ne reviens ni sur les faits ni sur les gestes qui t’ont, hélas, converti en citoyen extraordinaire. Condamné, certes. Damné et réduit en pestiféré ?.. Je laisserai cela à nos (com)patriotes qui ont la manie de regarder par le rétroviseur et aux autres qui ne trouvent sens à leur vie que de revenir sur des détails - puants, voire tuants. J’y reviens. Avec la certitude de ne t'apprendre pas grand-chose. Surtout pas que le hasard existe uniquement en des livres (révélés, certes) mais des livres (de) profanes.
Ce sont autant de recueils de mots mis en ordre, que des érudits assermentés dénomment dictionnaires. Répertoires de vocables, d’images et idées d'appellations universellement contrôlées, ils ont noms : Larousse, Littré et Robert, quand on se situe en temps et espaces francophones. Harrap's, dans les sphères anglo-saxonnes, etc. Du côté du divin, le hasard n’existe point, Tamsir, et tu le sais ! Comme tu as assurance et extrême certitude que tout a été dit et transcrit et qu'on ne saurait, si ingénieux qu'on puisse être, ruser et semer son destin. Ah, ça y est ! Le vocable survient qui conforte mon dire : il était dit que tu tomberais dans la boue, que tu glisserais sur du stupre et qu'on te logerait à toutes les enseignes pouacres - réelles et virtuelles. Rends-en grâce à Allah qui, te soumettant à épreuves et te livrant à la pluriforme vindicte des hommes, te crée opportunité de voir et de savoir qui est qui dans les mondes que tu fréquentais et dans lesquels tu n'avais que des frères et des amis, sinon que des gens qui t'aimaient et que tu adorais sans calcul, c’est-à-dire avec une candeur presque d'enfant.
«Tout le monde triche...»
Aujourd’hui, tu dois être bien trop seul, je présume. Et tu dois en avoir bien appris de tes compagnons et compatriotes. Seul, mais édifié de tout et sur tout, n’est-ce pas ? Comme Maître Abdoulaye Wade que tu ne manquas jamais de griffer et au nom du seul principe qui ordonne qu'on ne caresse pas forcément que dans le sens du poil ceux et celles qu'on adore, hein ? Ahmadou Bamba (Thiobane) a raison : «Nous sommes tout sauf des anges et tout le monde triche». Ainsi, le mérite des uns par rapport aux autres se résumerait à l'aptitude, je veux dire à la chance des premiers, de ne se faire ou se laisser prendre le pied dans le trou ou la chatte en défaut sur la langue de l'autre. C’est aussi simple et aussi vrai que cela. Tu as, donc, été pris en faute, Tamsir. Tu le sais : d’être imparfait mais perfectible, voilà notre prédestination. Et c'est aussi cela qui nous rend si humain, m’a-t-on dit. Comme on m'a appris à croire et à m'assurer que notre existence est faite de choix et que pareille évidence demeure ce qui, principalement, nous distingue des animaux.
Comme des millions de mâles, j’ai fait le choix irrémissible de n'aller en contrerotation de la nature, au point d'en arriver à la certitude que s'il ne restait qu'un «jupon» au Sénégal, je serais des coureurs instinctivement en lice. Toi, tu as fait choix, libre et certainement réfléchi, d’être un homme de curiosité(s) ? C'est ton droit le plus absolu. Je te le concède. Au nom de la norme, du reste mal partagée, qui voudrait que le droit de pécher soit aussi un droit de l'Homme. Vois-tu, Tamsir, en ce point, nos sensations divergent amplement. Il n'empêche que tu seras toujours et tous les jours de ma famille de cœur et d'esprit. Et ça, je l'assume et avec d'excellentes raisons qu'il serait impossible d'égrener et d'étaler même en une longue lettre (ouverte), encore moins sur une feuille de papier journal. Tu comprends, lors, que je veuille abjurer le dire et l'écrire, n’est-ce pas ? Rends grâce à Allah de t'avoir fait chuter dans la fosse des vices abhorrants ! Je suis convaincu qu'IL ne veut, par ce fait affreux, que te salubrer l'âme et l'esprit et le corps et le cœur ! Oui, te déconstruire à fin te refaire pur et inaliénable en une ère où être vertueux serait presque comme un délit !
«Irradier tout penchant tordu»
Profite, donc, de ta réclusion pour, mentalement, faire le tour de tes prisons et irradier tout penchant tordu ! C’est te rappeler que tu as rendez-vous avec toi-même et qu'il n'est point question que tu rates ce virage de vie ! Tu le dois à la dame au regard si frais de jouvencelle qui s'est, légalement, engagée à t'accompagner - pour la rose et pour l’ortie ! Tu le dois aussi à cette fillette que j'ai vue en ta maison de famille et qui, pareille aux enfants de toutes les latitudes du monde, n’aura nullement requis de naître de ton sang, encore moins d'être l'héritière des dettes que tu laisseras à la Postérité et à l’Histoire ! Tu le dois à ton père et à ta maman que j'ai rencontrés sereins et souriants, nonobstant la peine lourde qui les a atteints et les tenaille au plus profond d’eux ! Tu le dois à ceux-là qui, à raison, t’apprécièrent et persistent à positivement t’aimer !
Tu me le dois, à moi aussi, très cher frangin ! Tu le dois à Saër (Ndiaye) ! Tu le dois à «Baay Cheikh, le saint homme de Darou Mouhty» ! Tu le dois à Serigne Moustapha Sy ibn Cheikh Tidiane Sy Al Maktoum ! Tu le dois à Abdou Mbacké et à Grand Cissé, à Mame Thierno et à Ami Diaw Cissé, la préfacière de ton premier livre ! Tu le dois à Bara Tall et à Me Madické Niang, à Massata Diack et à Pape Diop, à Souleymane Ndéné Ndiaye et à Penda Mbow, à Ousmane Tanor et au Doyen Mbow Amadou Makhtar, à Mme Aïda Mbodj et à Alioune Tine, à Abdoulaye Wilane et Moustapha Niasse, et à tous tes collègues et confrères : passeurs de savoirs, passeurs d’informations et passeurs d’idées et d’images ! Tu le dois aux filles et garçons de Liberté 3 qui te prenaient pour idole et immense fierté communale !
«Tu dois t'amender»
Tu le dois aux frangines et frangins de «Nouvel Horizon» ! Tu le dois à ceux-là que ton talent et ton aura dérangeaient ! À ces derniers, surtout, plus qu'à toutes autres gens, tu dois t'amender, à fin donner une formidable et plurielle leçon de vie. Eh oui, tu as désormais tout à prouver ! Prouver qu'on peut tomber et, par un franc repentir, recouvrer, auprès de tout un peuple, grandeur et considération non feintes ! Prouver que tu as capacité d'avoisiner la saine existence des sages et ce, nonobstant les faiblesses et failles qui particularisent les descendants de singes et cochons dénaturés que nous sommes, toutes et tous !.. Convaincu que tu as conscience d'avoir et de voir ton destin encore rayonnant et bien devant toi, je ne doute pas une fois que tu relèveras ce défi plus que capital !
Ceci est ma prière, mon frère. Ceci est mon espérance. Ne la désespère plus jamais ! Vis et remets tout à Allah ! IL demeure Omniscience et Sa Miséricorde, sans borne, reste - sans équivalence - ce qui nous garera des fers et feux des démons et autres monstres rouges dont on dit qu'ils paradent, incomptables, baveux et incorruptibles, en Enfer !
Elie-Charles Moreau