Quand Macky Sall «gâtait» ses députés sous la table
Pour une Assemblée nationale de rupture, il ne faudrait plus recommencer ces dessous de table en espèces sonnantes et trébuchantes qui faisaient la joie de l'ex-patron de l'ex-groupe libéral, ainsi que des présidents de commission.
L’ancienne législature s’est tristement distinguée pour avoir voté des lois tout à fait contestables pendant douze ans d'unanimisme, ainsi que des pratiques assez éloignées de la transparence. Dans ce passif, Macky Sall tient sa part même si son éviction injustifiable du Perchoir en 2008 a joué en sa faveur.
On se souvient que l'actuel chef de l'Etat, alors président de l’Assemblée nationale (2007-2008), après avoir conduit avec succès la campagne de Me Wade à la présidentielle de 2007, avait «gâté» les présidents de commission en leur allouant de façon discrétionnaire 1 million de francs Cfa chacun pour «améliorer le fonctionnement des commissions», selon des informations contenues dans l'ouvrage de Mody Niang intitulé «Le clan des Wade : accaparement, mépris et vanité».
Mais cet argent va vite susciter polémique, puisque les présidents de commission sont accusés par leurs collègues d’avoir «détourné des dizaines de millions». Certains affirmaient, selon la même source, n’avoir jamais été mis au courant. «Voilà de nombreux mois que les présidents de commission reçoivent cet argent, s’écriait un parlementaire, ils n’ont jamais rendu compte. Plus grave, les députés n’ont pas été informés que de l’argent avait été mis à leur disposition.»
Les présidents de commission n’étaient pas les seuls bénéficiaires des largesses du président Sall. Le président du groupe parlementaire libéral d'alors, Doudou Wade, recevait pour sa part 3 millions francs Cfa par mois, selon toujours la même source. C'était pour «appuyer financièrement les députés libéraux qui en font la demande». Mais les destinataires n’y verront que du feu.
«Rames de papier et matériel de bureau»
Justifiant son acte, Macky Sall disait vouloir «donner un souffle nouveau» à l’Institution parlementaire. Un argument battu en brèche par Mody Niang, qui pense que «pour mettre les présidents de commission dans de bonnes conditions de travail, point n’est besoin quand même de leur remettre de l’argent en main propre». Car, poursuit l’écrivain, «l’Assemblée nationale est dotée de budget consistant, avec différents services compétents ayant pour mission de le gérer».
Les explications servies par les présidents de commission soutenant avoir utilisé cet argent à l’achat «de rames de papier, du matériel de bureau», sidèrent davantage l’auteur du «Clan des Wade». «Je suis presque sûr que les différentes lois qui régissent le fonctionnement de l’Assemblée nationale ne prévoient pas ce genre de gestion particulière destiné plutôt à enrichir facilement des collègues», peste l'inspecteur de l'Education à la retraite et observateur attentif des turpitudes politiciennes.
DAOUDA GBAYA