Publié le 27 Dec 2023 - 06:43
AFFAIRE NDIAGA DIOUF

La Cour suprême rejette le pourvoi en cassation de Barthélemy Dias

La Cour suprême a rejeté, hier, le pourvoi en cassation introduit par Barthélemy Dias, dans l’affaire Ndiaga Diouf. Le maire de Dakar perd une troisième fois dans cette affaire qui date depuis 12 ans. La cour confirme la peine de deux ans, dont six mois qui lui a été infligée. L’édile de la capitale doit également verser la somme de 25 millions de francs CFA à la famille du défunt.
MAGUETTE NDAO

Devant les magistrats, les avocats de Barthélemy Dias sont revenus sur les moyens qui ont motivé leur pourvoi en cassation. Maitre Demba Ciré Bathily a fustigé, dans le premier moyen, la violation de la loi pour refus d’application de l’article 22 de la Constitution. Il a ainsi évoqué une exception d’inconstitutionnalité, avec le refus du juge d’appliquer la loi.
En ce qui concerne le deuxième moyen, Me Bathily a relevé la violation de l’article 10 sur la motivation. À l’en croire, la Cour d’appel de Dakar a rejeté l’arrêt, sans aucune motivation. ‘’L’absence de motivation entraine l’annulation de la décision’’, a-t-il souligné. ‘’Les décisions de justice doivent être motivées, sous peine de nullité’’, a déclaré la robe noire.
Puis, Me Demba Ciré Bathily a soulevé un autre point intitulé : la contrariété. Ses collègues et lui reprochent au juge de ne pas avoir tiré les conséquences de ses propres constatations, en retenant la culpabilité de Barthélemy Dias. Ainsi, souligne-t-il, ‘’sur la base de ce qui a été débattu, le juge a fait des conclusions contradictoires’’.
Sur le moyen tenant à la contrariété, son confrère Me Koureyssi Ba a renchéri : ‘’L’aveu est divisible. L’aveu est laissé à la libre appréciation du juge du fond. Le juge a cette capacité d’être au-dessus des faits. Il ne peut pas fonder sa conviction sur des déclarations. Le procureur de l’époque avait fait un réquisitoire que le juge d’instruction avait suivi. Le prévenu est disculpé. Relaxons cet homme. Les faits le disent. Il a demandé un franc symbolique’’.

Il a poursuivi en rappelant qu’on n’a pas établi la preuve que les balles tirées de l’arme à feu que détenait son client sont identiques à celles retrouvées dans le corps de la victime. Il a sollicité, à cet effet, la relaxe de son client.

Du même avis que ses confrères, Me Ciré Clédor Ly a déclaré : ‘’Le juge n’a pas bien travaillé en appliquant la loi. Vous ne pouvez que casser et annuler cette décision. Le juge n’a pas été cohérent dans sa démarche intellectuelle. Il s’est contredit dans son raisonnement et ses conclusions. Il ne peut être que censuré. Son raisonnement est en porte-à-faux avec sa démarche. Cassez et renvoyez devant une autre cour d’affaires.’’

Pour sa part, Me Boris Pouye a soutenu : ‘’Je ne vois pas comment on pourrait rejeter cette exception d’inconstitutionnalité. La Cour d’appel est tenue de se prononcer là-dessus.’’

‘’J’ai tiré et je pense que j’ai tué quelqu’un et je présente mes condoléances’’
L’avocat du camp adverse, en l’occurrence Me Pape Mor Niang, a demandé à la cour de rejeter les moyens portant sur cette exception d’inconstitutionnalité qui n’a jamais été soulevée.
Sur la contrariété de la motivation, Me Niang a persisté et signé que cet arrêté a été bien motivé. ‘’Il y a une intime conviction du juge. Elle est basée sur des éléments qui ont été discutés devant la barre. Les aveux circonstanciés : ‘J’ai tiré et je pense que j’ai tué quelqu’un et je présente mes condoléances.’ C’est lui (Barth) qui l’a dit et il avait les armes’’, a relevé l’avocat.
Selon lui, les témoignages concordants et des relevés faits sur les lieux ont montré que Barth était le seul qui détenait des armes et qui a tiré. De l’avis de Me Niang, il n’y a pas lieu à douter de la culpabilité du prévenu Barthélemy Dias.

Prenant la parole pour ses réquisitions, l’avocat général a demandé le rejet du pourvoi dans tous ses moyens.
Son réquisitoire a été suivi par la cour qui a rejeté le pourvoi en cassation de Barthélemy Dias.
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MAIRIE DE DAKAR

Comment Barthélemy Dias sauve son fauteuil

Dans l’affaire Ndiaga Diouf, le maire de Dakar a été condamné pour ‘’coups mortels’’ et non pour ‘’crimes’’, ‘’faux en écritures’’ ou ‘’détournements de deniers publics’’, suivant les qualifications retenues en 2012 par le juge d’instruction d’alors Mahawa Sémou Diouf. Une lecture littérale du Code des collectivités locales sauve son fauteuil de maire.
Par Ass Birago DIAGNE

L’affaire aurait fait sourire, si la mort d’un homme n’était pas à son origine : Barthélemy Dias tombe désormais sous le coup du règlement intérieur de l’Assemblée nationale disposant, en son article 51, chapitre 13, que ‘’le député qui fait l’objet d’une condamnation pénale définitive est radié de la liste des députés de l’Assemblée nationale sur demande du ministre de la Justice’’ ; disposition mentionnée aussi dans la Constitution en son article 61.

Or, l’actuelle ministre de la Justice n’est personne n’autre que Me Aïssata Tall Sall, son avocate lors de son procès en appel en 2017. Le 22 décembre 2011, Ndiaga Diouf, était tué par balles, près de la mairie de Mermoz Sacré-Cœur dont Barthélemy Dias était l’édile. Ce dernier avait été rapidement interpellé, puis jugé et condamné. Des vidéos le montrant tirant vers le véhicule qui avait transporté la victime sur les lieux, en compagnie d’autres gros bras, ont fait le tour du Net. Ses avocats avaient prétendu démontrer que l’arme fatale à l’origine de la mort tragique de Ndiaga Diouf n’était pas celle de Barthélemy Dias et qu’un nervi du PDS s’était infiltré du côté de ses partisans. Cet homme – qui a été filmé, mais jamais retrouvé – serait à l’origine du tir meurtrier, avaient-ils assuré.

La Cour suprême vient donc de rejeter le pourvoi en cassation introduit par les avocats de Barthélemy Dias dans l’affaire Ndiaga Diouf, en confirmant la décision de la 3e Chambre correctionnelle de la Cour d’appel du tribunal de grande instance hors classe de Dakar, rendue le mercredi 21 septembre 2022, confirmant la peine de deux ans, dont six mois ferme (déjà purgée), avec des dommages et intérêts de 25 millions de francs CFA qu’il devrait payer à la famille du défunt. Ce que le maire de Dakar se refuse à faire, d’où ses multiples recours.

Aujourd’hui, le maintien de son siège à la place Soweto dépend du gouvernement, avec son ancienne avocate comme probable exécutante de la décision. Son mentor, Khalifa Sall, candidat à la Présidentielle du 25 février 2024, avait lui aussi perdu son siège de député en 2019, suite à sa condamnation dans l’affaire de la caisse d’avance de la mairie de Dakar, après que le ministre de la Justice d’alors, le Pr. Ismaïla Madior Fall a saisi l’Assemblée nationale pour le démettre.

Mais la comparaison avec Khalifa Sall s’arrête là. Car si ce dernier avait été révoqué de son mandat de maire de la capitale par décret présidentiel en août 2018, Barthélemy Dias, lui, rappelle que les faits qui lui ont valu sa condamnation ne figurent pas sur la liste des fautes énumérées par l’article 140 du Code des collectivités locales pouvant entraîner une révocation.
En effet, le maire de Dakar a été condamné pour ‘’coups mortels’’. Que dit le Code des collectivités locales à ce sujet ? L’article 135 : ‘’Lorsque le maire ou tout autre conseiller municipal est condamné pour crime, sa révocation est de droit. Les maires et adjoints, après avoir été entendus ou invités à fournir des explications écrites sur les faits qui leur sont reprochés, peuvent être suspendus par un arrêté du ministre chargé des Collectivités locales pour un temps qui n’excède pas un mois et qui ne peut être porté à trois mois que par décret. Ils ne peuvent être révoqués que par décret. L’arrêté de suspension et le décret de révocation doivent être motivés.’’

L’article 140 : ‘’Sans que la liste soit limitative, les fautes énumérées ci-dessous peuvent entraîner l’application des dispositions de l’article 135 du présent code : 1. Fait prévu et puni par la loi instituant la Cour des comptes, 2. Utilisation des deniers publics de la commune à des fins personnelles ou privées, 3. Prêts d’argent effectués sur les recettes de la commune, 4. Faux en écriture publique authentique visé au Code pénal, 5. Faux commis dans certains documents administratifs, dans les feuilles de route et certificats visés au Code pénal, 6. Concussion, 7. Spéculation sur l’affectation des terrains publics, les permis de construire ou de lotir, 8. Refus de signer ou de transmettre au représentant de l’État une délibération du conseil municipal. Dans les sept premiers cas, la sanction administrative ne fait pas obstacle aux poursuites judiciaires’’. En somme, la qualification des faits par le juge d’instruction de l’affaire Ndiaga Diouf - ‘’coups mortels’’ et non ‘’crime’’ - écarte l’éventualité que Barthélemy Dias perde son mandat de maire après la décision de la Cour suprême.

À en croire l’intéressé, l’enjeu est ailleurs, précisément à l’Assemblée nationale. La coalition qui soutient Khalifa Sall pour l’élection présidentielle compte parcimonieusement les 13 députés nécessaires à leur leader pour se passer du parrainage citoyen.

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