ASUTIC
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L’Association sénégalaise des utilisateurs de l’Internet (ASUTIC) invite l’Etat à recourir aux technologies de surveillance numérique pour stopper la transmission communautaire de la Covid-19. Elle insiste, toutefois, sur la nécessité de le faire dans le respect des droits humains, surtout ceux liés aux données personnelles. ‘’Pour lutter contre la Covid-19, de nombreux pays font recours aux technologies numériques de surveillance des populations.
Parmi celles-ci, le ‘’contact-tracing¬’’, appelé aussi ‘’backtraking¬» ou traçage numérique qui consiste à collecter et traiter les données des appels téléphoniques et de géolocalisation GPS des téléphones mobiles, pour retracer les mouvements des individus testés positifs à la Covid-19. Ainsi, il est possible, non seulement d’identifier les¬ cas contacts qui doivent être mis en quarantaine de toute urgence, mais aussi de détecter les zones à risque où le virus pourrait se propager’’, indique un communiqué de l’Asutic transmis à ‘’EnQuête’’. Aussi, souligne-t-on, les fondements juridiques ne font pas défaut au Sénégal pour justifier la mise en œuvre d’une telle technologie numérique.
Comme preuve, l’Asutic cite la loi n°2016-33 du 14 décembre 2016 relative aux services de renseignement, votée dans le cadre de la lutte antiterroriste et qui permet au gouvernement de surveiller la population pour notamment faire face aux menaces contre la sécurité et les intérêts fondamentaux de la nation. Ainsi, même si une crise sanitaire n’est pas mentionnée explicitement dans cette loi, selon l’Asutic, une menace contre les intérêts fondamentaux de la nation peut justifier le recours aux dispositifs techniques prévus par cette loi de 2016.
...Toutefois, l’Asutic indique n’avoir, à ce jour, aucune information officielle permettant d’affirmer l’utilisation ‘’de ces pouvoirs démesurés de surveillance des populations conférés par l’Assemblée nationale depuis 2016, dans le cadre de la lutte contre la Covid-19’’. Pour autant, considère-t-on, la communication par le ministère de la Santé et de l’Action sociale du nombre de cas contacts suivis, qui était de 1 875 au 15 avril 2020, révèle que la stratégie du traçage numérique a été adoptée par les autorités, en sus du suivi de contacts traditionnels.
A en croire les utilisateurs du net, il se pose désormais la question de la mise en place d’un tel dispositif de collecte et de traitement des données personnelles de géolocalisation à des fins de santé publique, sans risquer un impact disproportionné sur les droits humains, en particulier sur la confidentialité et la vie privée des citoyens. ‘’Il nous faut être particulièrement vigilant pour limiter le potentiel intrusif de ce dispositif pour préserver l’équilibre entre les droits individuels et l’intérêt général, mais surtout éviter le risque d’entrer dans une nouvelle ère de surveillance numérique invasive des citoyens’’, souligne le communiqué.
Les membres de l’Asutic invitent, toutefois, le gouvernement à se garder de penser que le numérique va tout résoudre et de s’inspirer du succès de pays démocratiques plutôt que de faire du copier-coller de mesures en provenance de pays totalitaires ayant des sociétés complètement différentes. En outre, ils déplorent le fait que les autorités étatiques n’informent jamais la population quant à ‘’la façon dont elles utilisent concrètement ce cadre légal de surveillance entretenue dans une totale opacité’’.