Dialogue Judiciaire...
Le Président Léopold Sédar Senghor doit s'étirer d'aise dans sa tombe de Bel-Air... Jamais il n'aurait pu imaginer qu'enfin nos hommes politiques, véritablement pleins de ressources, au propre comme au figuré, allaient plonger le Sénégal dans l'Antiquité Grecque, et ramener notre système judiciaire aux bons vieux temps de l'Ordalie, et où le sort des prévenus, quelle que soit leur renommée, ne dépendait que des Caprices des Dieux, qui de rien en faisaient tout un fromage. Les juges Sénégalais ont hier joué une sorte de "Return to Forever", en sortant de leurs "effets de Manchots", "un article de l'oie" vieux comme Hérode, mais surtout indigne et de l'Iliade et de l'Odyssée.
On ne peut pas dire que nos juges sont incultes, c'est évident, et ils ont de la lecture, pour être aller dénicher l'épisode où Mélétos accuse Socrate de corrompre la jeunesse, autrement dit, il lui reprochait d'enseigner aux jeunes le rejet de dieux. « Socrate, disait l'acte d'accusation, est coupable en ce qu'il corrompt la jeunesse, qu'il n'honore pas les dieux de la cité et leur substitue des divinités nouvelles. »
Plus on approchait de la scène finale du péplum ennuyeux, "Ousmane rencontre Adji Raby", plus leur scénario prenait l'eau, et avant que leur bateau ivre et surchargé de vulgaires turpitudes, ne s'écrase sur les récifs du ridicule, l'Amiral du Vaisseau dégaina piteusement son improbable "Joker", sorti des tréfonds de la mauvaise foi, et bafouilla, honteux : "Corruption de la Jeunesse"... 17 millions de Sénégalais furent tous en même temps pris d'un inextinguible fou-rire, rire jaune et nerveux tout de même comme pour dire, tristes et navrés : "Tout ça...pour ça?" Et puis, ne reculant devant aucune muflerie, la meilleure manière qu'ils ont trouvée pour masquer leur incurie et se départir de leur côté "pieds nickelés", c'est d'avoir la sottise de l'autruche qui enfouit sa tête dans le sable, et expose son croupion dodu au soleil en son zénith.
Comment? En mettant en branle le truc le plus ringard qui soit, et qu'on croyait réservé aux chinois, aux dictatures tropicales, à savoir la mise sous le boisseau de la totalité des réseaux sociaux. On se croirait en Afrique tout d'un coup !!!! "La case de Birama brûle-telle à ce point-là?" Ou alors quels coups tordus le pouvoir prépare-t-il pour vouloir couper toutes sortes d'expressions citoyennes, entre dépit, colère et détermination à se battre contre un mépris jeté avec violence et désinvolture irresponsables à la face des Sénégalais?
Durant deux années, les Sénégalais ont été les témoins hagards, puis stupéfaits d'une télénovela d'un goût douteux, dont les thèses qui criaient au complot étaient opposées à des convaincus qui avaient saisi là l'occasion de mettre hors course le leader des Patriotes, Ousmane Sonko qui a refusé de mettre sa tête sur le billot électoral d'une part et qui n'a laissé au président Macky Sall aucune autre issue que de devoir respecter sa promesse de ne pas être candidat en 2024.
Ce "Mortal Kombat" fit glisser inexorablement notre exemplaire démocratie, vers une "démocrature" rampante et son cortège d'arrestations et une "pornocratie" exhibée sans complexe ni pudeur, dans un pays où la majorité des hommes ne jubilent et n'exultent que pour ce qui réjouit leurs ventre et leurs bas-ventre. Deux années et 40 morts plus loin, les Sénégalais s'étaient fait une conviction où viol et menaces de mort insultaient nos intelligences, lesquelles intelligences tout de même concevaient, en regard des valses hésitations de l'accusé, et des renoncements à vouloir en éclaircir les zones d'ombres, que décidément un cabinet de Kinésithérapie ne saurait porter sérieusement l'appellation érogène de "Sweet Beauty"... Faut tout de même pas nous prendre pour des buses ou pour des perdreaux nés la semaine dernière.
Deux années à hurler au viol et au complot, traversées par les appétits obscènes de certains caciques d'un pouvoir qu'on aurait pu ériger en "Benno-Bokk-Adji Sarr"... Mais ne nous égarons pas sur des chemins empruntés par des mufles toujours pourtant à la tête de sociétés nationales importantes.
Ils inventèrent donc l’infraction de corruption de la jeunesse, ainsi définie : « quiconque aura attenté aux mœurs en excitant, favorisant ou facilitant habituellement la débauche ou la corruption de jeunesse de l'un ou l'autre sexe au-dessous de l’âge de vingt et un ans, ou, même occasionnellement, des mineurs de seize ans », sera puni d’une peine de 2 à 5 ans et d’une amende de 300 000 à 4 000.000 FCFA.
Cette sentence est un foutage de gueule de haute volée ... Quelle honte... À ce tarif-là ils vont devoir emprisonner tout le SÉNÉGAL, au vu de tous ceux qui sans vergogne ni honte, se font appeler "Daddy" par tant de jeunes nymphes avides de I-Phones 14, pour se saouler de ridicules selfies ... Corruption de jeunesse ... Guinness Book de la turpitude. C'est digne de Mickey, parce que nos énervés de la cinquantaine n'ont cure d’inscrire et de maintenir sciemment la jeunesse dans une situation de débauche et de perversité.
Les faits dont il s’agit, sont de nature à anéantir tous les efforts consentis par l’État, pour éduquer, former et encadrer la jeunesse sénégalaise, dans le sens des valeurs morales héritées de nos ancêtres, fondatrices de notre société et de notre nation, qui par ces temps de market-loving, sapent les fondements de notre société.
Banalisation des infractions financières des caciques du pouvoir contre banalisation des appels à l'insurrection.
Ce Sénégal est NOTRE Sénégal, au-dessus de chacun d'entre nous. Tant de morts pour un vaudeville politique, assaisonné par l'obstination d'un clan à vouloir s'arcbouter et s'accrocher aux ors qui symbolisent leur désuet et évanescent pouvoir, qu'ils ont, pour la plupart empli de la suffisance crasse et obscène qui en fait la kleptocratie la plus rustre de notre Histoire. Personne ne s'émeut de tous ces morts qui n'ont même pas droit à une identité posthume...
On les additionne, on les dispose dans les colonnes d'un bilan macabre, et il serait temps que la personne la plus indiquée pour stopper cette tragédie, au lieu de plastronner dans les dédales viciés d'un dialogue national au chevet d'un pays en deuil, vienne poser sa parole responsable d'un homme qui ne saurait mener les Sénégalais qui l'ont choisi il y a 12 ans pour les guider, autre part que vers les contours d'un Sénégal apaisé, dont les filles et fils ont bien d'autres choses à faire que de servir de chair à canon et de balises aux troubles ambitions d'hommes qui semblent oublier qu'ils ne sauraient être providentiels.
Sinon, nous sommes mûrs pour tomber joyeusement dans les sombres liens de "La Dictature de l'Ignorance". De "Sweet Beauté" à "Shit Beauté"... Le ver est dans le fruit... Le poison infuse... Il a le goût mortel de la Cigüe.
Jean Pierre Corréa