Les acteurs listent les challenges du marché
Les infrastructures de stockage, la régulation du marché, la qualité des produits, etc., sont, entre autres, les défis qui empêchent la commercialisation à grande échelle de productions agricoles locales, afin qu’elles puissent contribuer pleinement au produit intérieur brut (PIB) du Sénégal. C’est ce qu’a rapporté hier le directeur de l’exploitation de l’Agence de régulation des marchés (ARM), Babacar Sembène, lors d’un atelier sur le sujet.
Au Sénégal, la production agricole augmente d’année en année et 80 à 90 % sont destinés à la consommation. Or, selon le directeur de l’exploitation de l’Agence de régulation des marchés (ARM), le marché a des règles auxquelles les producteurs sénégalais sont obligés à se conformer. ‘’Ce volet demande beaucoup d’investissements, de concertations, de sorte que les producteurs puissent y trouver leurs comptes. L’arachide, le riz, les produits horticoles, l’oignon, la pomme de terre, la tomate, sont des filières sur lesquelles le gouvernement a fait un focus pour booster la production. Au niveau de la balance commerciale, ce sont des produits qui pèsent lourd. Rien que ces cinq produits font 500 milliards de francs CFA. Si le gouvernement arrive à faire de sorte que ces produits soient disponibles à travers le pays, cela va impacter positivement sur la croissance du produit intérieur brut (PIB)’’, rapporte Babacar Sembène qui s’exprimait hier, lors d’un atelier du Conseil national de commercialisation des produits agricoles.
Le directeur de l’exploitation de l’ARM informe aussi qu’il ressort des concertations menées dans 9 régions du pays, des problèmes d’infrastructures de stockage, de la qualité de la banane comme à Tambacounda. A ce propos, M. Sembène rappelle que le Sénégal importe la banane de la Côte d’Ivoire. Etant un pays membre de l’Union économique et monétaire, ce sera très difficile pour lui de dire aux commerçants de ne pas importer de la banane de ce pays. ‘’Le problème qui se pose avec le maïs, c’est de travailler de sorte à aider les producteurs à avoir des contractualisations avec les industriels. Parce qu’il y a beaucoup d’importations de maïs au Sénégal qui tournent autour de 40 milliards de francs en moyenne par année. Uniquement pour la Sedima, ses besoins mensuels tournent autour de 6 000 tonnes. Il faut faire de sorte que ces producteurs puissent avoir des contrats avec les industriels afin d’assurer leur ravitaillement. Les importations de maïs proviennent de l’Argentine et du Brésil. Les variétés qu’ils utilisent sont différentes de celles qu’on cultive au Sénégal. Pour régler ce problème, il faut faire de sorte que la recherche soit axée sur les variétés dont les industriels ont besoin pour les satisfaire. Car c’est le marché qui détermine la production’’, soutient-il.
Il urge aussi, selon lui, de renforcer le stockage des produits horticoles. A ce propos également, le bras technique de l’ARM note qu’il y a des exigences. Car il y a des variétés qu’on ne peut pas stocker. ‘’On a eu l’expérience avec la pomme de terre. Donc, il faut vraiment que les acteurs puissent prendre en considération ces aspects du marché. En plus, le stockage coûte extrêmement cher, compte tenu du coût de l’électricité. Le manque d’information commerciale, phytosanitaire a été souligné de même que la forte concurrence des agro-business. Certes, c’est le gouvernement du Sénégal qui a fait un appel par rapport aux investisseurs, parce qu’il y a des opportunités d’investissements au Sénégal. A côté de cela, on veut protéger les petits producteurs’’, défend-il.
Inviter le secteur privé à investir dans les infrastructures de stockage
Ainsi, le directeur de l’exploitation de l’ARM trouve qu’il faut renforcer la modernisation du secteur à ce propos. ‘’On est arrivé à un moment où il faut qu’on prenne des mesures et changer notre mode de régulation. Parce que l’Etat a l’obligation d’accompagner les petits producteurs. C’est vrai qu’on a gagné le pari de la régulation entre l’importation et la production locale, mais il reste maintenant la régulation entre les acteurs, notamment entre les agro-business et les petits producteurs. Il faut faire de sorte que la surproduction puisse être stockée dans des magasins et essayer de différer la commercialisation. Il faut inviter le secteur privé à investir dans ces infrastructures-là. Il est également extrêmement nécessaire de faire une cartographie de la production au niveau national. Avec les services de l’agriculture, c’est un travail qui nous attend’’, renchérit-il.
Régler le problème de la commercialisation des productions agricoles doit se faire en amont, à travers la contractualisation, mais également la facilitation d’accès aux crédits, reconnait, pour sa part, la ministre du Commerce et des PME. ‘’Nous pensons qu’à partir de cette rencontre, un travail sera fait pour aider à régler le problème. Le gouvernement travaille à mettre en place des infrastructures de stockage très rapidement. Mais nous lançons surtout un appel au secteur privé, parce que les infrastructures de stockage et leur gestion doivent être une affaire du secteur privé pour veiller à ce que toute la chaine de valeur soit bien structurée et produise les résultats escomptés’’, ajoute Aminata Assome Diatta.
Concernant la régulation et notamment l’équation des agro-business, la ministre a rappelé que son département essaie souvent de leur demander de ne pas mettre le produit sur le marché. ‘’Mais, en toute sincérité, il y a un problème d’équité qui se pose. Autant on peut essayer de réguler l’importation de ces produits, autant c’est difficile entre deux Sénégalais de dire à l’un, il faut vendre et à l’autre, il ne le faut pas. Mais nous essayons toujours de trouver des terrains d’entente avec ces différents producteurs. Toutefois, une bonne disponibilité d’infrastructures de stockage, une bonne partie du problème pourrait être résolue’’, admet-elle.
MARIAMA DIEME