Tout est mis sur le dos du relâchement
Même si les résultats des analyses du Comité national de gestion des épidémies (CNGE) sur les causes de la deuxième vague du coronavirus ne sont pas encore établis, il ressort, pour le moment, d’après certains spécialistes, que le relâchement est la principale cause du regain noté.
Depuis quelques jours, des Sénégalais sont inquiets. La deuxième vague de Covid-19 tant redoutée par le gouvernement fait peur. Ce, d’autant que la population, surtout la majeure partie, croyait à la fin de la pandémie dans le pays. Cet espoir brisé fait que certains ne croient pas qu’il y a véritablement une deuxième vague.
Mais comment est-ce qu’on en est arrivé là ? C’est la question qui taraude. Le directeur général du Service national de l’éducation et de l’information pour la santé (Sneips) affirme que, pour le moment, ils sont en train d’analyser la situation pour en connaitre l’origine. Pour l’instant, trois thèses se dégagent. Il y a la reprise du trafic aérien qui peut être une cause de cette recrudescence de la maladie. Même si, explique le docteur Ousmane Guèye, le Sénégal, à un moment donné, a connu une réelle tendance baissière, alors que les autres Etats avaient une recrudescence.
‘’S’il y a des va-et-vient, inévitablement, on peut penser avoir des cas, même si on a remarqué qu’il n’y avait pas de cas importé. Quelqu’un peut venir avec un faux test, comme on l’a attesté récemment’’, soutient le médecin.
Autre facteur souligné par le directeur général du Sneips, c’est la nouveauté du virus. ‘’Ce coronavirus est nouveau. Les anciens ne donnaient pas un syndrome grippal. On a remarqué, précise-t-il, que pendant les phases de température, il y a une flambée de la grippe’’. Il considère ainsi que ‘’ce virus a une certaine virulence et un certain degré de propagation pendant cette période’’. Le troisième facteur, selon lui, est le relâchement noté chez la population sénégalaise dans le respect des gestes barrières. ‘’Tout le monde sait que les rassemblements existent. Les gens ne portent pas de masque. Les gens se donnent la main, alors qu’on parlait de distanciation physique. Les gestes barrières ne sont plus respectés’’, explique le Dr Guèye.
A son avis, ces trois facteurs combinés peuvent expliquer cette propagation du virus dans la communauté. ‘’Le relâchement est l’explication qu’on ne peut pas réfuter’’, insiste-t-il.
Embouchant la même trompette, le directeur de la Prévention, le docteur El Hadj Mamadou Ndiaye, met tout sur le dos du relâchement. Selon lui, la population a vécu comme si la maladie avait disparu, alors que ce n’était pas le cas. ‘’Nous avons toujours sensibilisé sur le port du masque. Mais, à un moment donné, personne ou peu de gens portaient le masque. Dans les marchés, la vie a repris son train normal. Tout le monde fait ce qu’il veut. Donc, cela ne pouvait pas être sans conséquence’’, analyse-t-il.
Il est d’avis que seul l’engagement de la population peut vaincre la maladie. ‘’La population s’était mobilisée comme un seul homme pour faire reculer le virus. C’est ce combat que nous devons reprendre. Le relâchement est la principale cause de cette situation. On continue tout de même d’étudier cette situation pour mieux la comprendre’’, informe le Dr Ndiaye.
‘’On ne change pas un cheval qui gagne’’
Cependant, le docteur Ousmane Guèye précise que la stratégie de lutte va rester la même. ‘’On ne change pas un cheval qui gagne. Les stratégies qui ont été menées depuis longtemps ont donné satisfaction. On va peut-être les intensifier et également travailler avec le ministère de l’Intérieur pour le respect des gestes barrières. Il faut que les gens aillent vers ça. Les rassemblements doivent être interdits’’, dit-il.
Pour sa part, spécialiste de l'immunologie et membre de l'Observatoire Covid-19 du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation, le professeur Tandakha Dièye soutient qu’il y aura forcément une deuxième vague. Car on ne peut pas empêcher le virus de circuler. Mais on peut le ralentir avec les mesures prises à l’aéroport et les mesures barrières quotidiennes. ‘’Nous sommes très proches de l’Europe et les mesures basées sur des tests virologiques ont des limites, du fait que la fenêtre virologique dure 14 jours environ. Si un test est négatif, cela peut signifier soit que la personne n’est pas contaminée, soit elle l’est, mais que le virus n’est pas encore dans la fenêtre virologique’’, clarifie le Pr. Dièye.
VIVIANE DIATTA