ELECTIONS LOCALES DANS LA REGION DE ZIGUINCHOR
BBY, l’UCS/Mbolo et Yewwi Askan Wi en terrain miné
Au-delà de l’équation Ousmane Sonko, les élections locales du 23 janvier prochain constituent un enjeu de taille qui mettra en jeu l’avenir et la carrière politique des têtes de liste de coalitions en Basse-Casamance.
Les élections locales qui se profilent à l’horizon seront âprement disputées dans la région de Ziguinchor où l’on s’attend à ce que les Patriotes du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), qui porte la coalition Yewwi Askan Wi (Yaw) réalise l’exploit de la Présidentielle de 2019.
Pour rappel, malgré les renforts d’Abdoulaye Baldé, Mamadou Lamine Keita et Tombon Guèye, respectivement maires de Ziguinchor, de Bignona et de Diembéring, Ousmane Sonko s’en est sorti avec une victoire sans appel de 57,25 %, contre seulement 38,72 % pour Benno Bokk Yaakaar (BBY). Aujourd’hui, on parle du ‘’phénomène Sonko’’. Cela s’explique dans son positionnement ‘’hors ou antisystème’’ et ‘’nationaliste’’. Ce qui n’était pas le cas pour l’ancien tout-puissant maire de Ziguinchor. En vérité, cette victoire du leader du Pastef, lors de la Présidentielle de 2019, sonne et résonne, encore et encore, comme le sacre d’une offre politique de rupture radicale face à des pratiques qui, dit-on, gangrènent la démocratie, la justice ou encore le développement du pays.
Mieux, lors des émeutes de mars dernier, toute la région s’est mobilisée pour le soutenir. Il en est sorti renforcé. Depuis, Ousmane Sonko apparait aux yeux de bon nombres de Casamançais, d’ici et d’ailleurs, comme présidentiable. La région s’attend à voir un de ses fils présider aux destinées de ce pays. Autant de facteurs qui poussent les observateurs du landerneau politique dans la région de Ziguinchor à soutenir que le leader de Yewwi Askan Wi sera encore ‘’le maitre de Ziguinchor’’. Surtout que BBY, après la Présidentielle, n’a pas, entre deux élections, procédé à un diagnostic sans complaisance de sa déroute ; diagnostic à partir duquel la mouvance présidentielle devait, après avoir tiré les conséquences de sa défaite, mettre en œuvre une stratégie globale et/ou spécifique, par endroits, de reconquête d’un pouvoir perdu.
Dès lors, l’on se demande sur quel levier devrait s’appuyer BBY pour renverser la tendance aux prochaines Locales ou, dans une moindre mesure, réaliser un score acceptable, c’est-à-dire moins humiliant que lors de la dernière Présidentielle. Le bilan de Macky Sall ? Le profil des candidats de Yewi Askan Wi ?
L’électorat rationnel en question
Même si Ousmane Sonko a une longueur d’avance sur ses adversaires les plus en vue que sont BBY et la coalition UCS/Mbolo que dirige le maire sortant de Ziguinchor, en politique, rien n’est gagné d’avance. Les élections sont une compétition électorale. Il s’agit, pour chaque candidat, d’aller à la rencontre des électeurs et de décliner sa vision ainsi que son projet de ville. Et puisqu’il s’agit de consultations locales, le profil des candidats, leur bilan, leur expérience et leur expertise dans la gestion des affaires des collectivités territoriales peuvent peser sur la balance.
En 2000, Abdoulaye Wade avait, haut la main, remporté l’élection présidentielle dans la région de Ziguinchor. Lors des Locales de 2002, Ziguinchor a renouvelé sa confiance à Robert Sagna dont la commune, deux ans auparavant, avait été mise sous administration provisoire par le régime Wade. Lors des dernières élections locales, celles de 2014, les opposants Abdoulaye Baldé (maire de Ziguinchor), Mamadou Lamine Keita (maire de Bignona) et Tombon Guèye (maire de Diembéring) ont laminé BBY qui, deux ans auparavant, avait largement gagné la Présidentielle en Basse-Casamance. Cela signifie, simplement, que dans la région de Ziguinchor, il existe un électorat rationnel. Il s’agit de l’électeur qui ne suit pas forcément les consignes de son parti ou de sa coalition, parce que les Locales sont une affaire de proximité. Est-ce que Bignona va plébisciter Mamadou Lamine Keita pour lequel la grande majorité de BBY est restée fidèle ? Difficile de répondre.
Toutefois, il demeure clair que le maire de Bignona va à ce rendez-vous avec la faveur des pronostics sur ses rivaux immédiats que sont Aubin Sagna et Bacary Diatta du Pastef. Le poulain d’Ousmane Sonko a un parcours politique vierge. C’est un jeune instituteur qui n’a aucune expérience de la gestion des affaires de la cité. Les Bignonois vont-ils mettre en avant le bilan jugé ‘’satisfaisant’’, l’expertise et l’expérience de Keita ou suivre les consignes du président du Pastef qui demande à voter non pour le profil, mais le candidat de la coalition ?
Dans la commune de Ziguinchor, les élections seront très ouvertes, selon certains observateurs de la scène politique. ‘’Je mettrai en place une grande coalition qui fera mal au camp d’en face (…) Le lion est réveillé (…) Le combat qui nous attend est immense. Le 23 janvier prochain, nous allons remporter les élections et vous allez savourer cette victoire jusqu’au petit matin’’, a promis Abdoulaye Baldé, tête de liste de la coalition UCS/Mbolo. Seulement, le maire de Ziguinchor, qui a réalisé que 3 % de son programme, selon Ousmane Sonko, peut, aussi, faire face à l’usure du temps, tout comme celui de Diembéring, Tombon Guèye.
Outre cette usure, il faut dire que le deuxième mandat du maire de Ziguinchor a été entaché par des problèmes liés au foncier. Avérée ou pas, cette question a rythmé et jalonné son deuxième mandat. Cependant, il faut noter qu’il a été renforcé par l’opératrice économique Ami Tamba, l’ancienne ministre Aminata Angélique Manga, le pharmacien Moussa Diédhiou qui est sorti des entrailles du Rassemblement pour le socialisme et la démocratie (RSD) de Robert Sagna. Quel doit être l’impact de cette somme de défections sur le niveau de mobilisation de BBY qui a bénéficié, par ailleurs, du renfort de taille de Seydou Sané, le président du Casa sport et 1er adjoint au maire Abdoulaye Baldé avec qui ils ont gagné les dernières Locales ?
HUBERT SAGNA (ZIGUINCHOR)
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