Quels Défis pour le Sénégal et l’Afrique ?
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Le dernier rapport du Fonds Monétaire International (FMI), met en exergue un problème crucial pour de nombreux pays à travers le monde, la complexité qui entoure la dette publique. Une situation particulièrement préoccupante dans les pays africains, dont le Sénégal, où les défis de transparence sont omniprésents malgré certains progrès économiques. Cette situation nuit à la gestion des finances publiques et à la capacité des citoyens d’exiger des comptes.
D’après l’étude du FMI, menée auprès de 60 pays, la transparence de la dette publique demeure une question épineuse. Les pays sont souvent dépourvus de lois contraignantes qui imposent une communication complète et régulière sur la dette publique. Cette absence de mécanismes clairs et d’un suivi rigoureux entraîne des risques économiques majeurs.
Le Sénégal, bien qu’il ait fait des progrès dans sa gestion macroéconomique, illustre parfaitement cette réalité. La dette publique y est en grande partie limitée à l’administration centrale, et les emprunts contractés par d’autres entités publiques ne sont pas toujours pris en compte dans les rapports officiels. Ce manque de couverture intégrale, couplé à des problèmes d’infrastructure et de capacité institutionnelle, rend difficile la gestion transparente de la dette.
Un autre point soulevé par le rapport est l’utilisation excessive des clauses de confidentialité dans les contrats de dette. Ces clauses, qui sont de plus en plus présentes dans les accords de prêt, empêchent la divulgation d’informations essentielles. Cela permet à certaines conditions de prêt de rester dans l’ombre, réduisant ainsi la capacité de la société civile, des chercheurs et même des instances parlementaires à surveiller la gestion de la dette.
Le Sénégal n’est pas épargné par cette pratique. Les accords de prêts avec des bailleurs internationaux ou d’autres créanciers privés incluent souvent des termes confidentiels qui limitent l’accès aux informations relatives aux conditions de financement. Cela freine la capacité des citoyens et des institutions de contrôle à évaluer la viabilité de la dette et son impact sur l’économie nationale.
Le FMI souligne que la transparence ne peut être assurée sans la mise en place de mécanismes de contrôle solides. Le Parlement doit jouer un rôle clé dans la surveillance des informations relatives à la dette publique, notamment en ayant accès à des données confidentielles et en exerçant une pression sur les gestionnaires de la dette pour qu’ils rendent des comptes. De plus, les Institutions Supérieures de Contrôle (ISC), comme les chambres des comptes, doivent réaliser des audits indépendants et réguliers pour garantir une gestion transparente et responsable des ressources publiques.
Au Sénégal, comme dans d’autres pays africains, la mise en place de mécanismes de contrôle est encore insuffisante. Bien que des audits existent, leur portée reste limitée, et leur indépendance n’est pas toujours assurée. Renforcer le pouvoir de ces institutions et garantir un contrôle parlementaire efficace est essentiel pour assurer une gestion saine de la dette publique.
Les recommandations du FMI vont dans le sens d’une plus grande rigueur législative. Il est impératif que les pays adoptent des lois claires et contraignantes qui obligent la publication d’informations détaillées sur la dette, y compris la dette contractée par les collectivités locales et les entreprises publiques. Le Sénégal pourrait en bénéficier en renforçant son cadre juridique, notamment par l’adoption d’une législation contraignante sur la gestion des finances publiques, et en élargissant la couverture de la dette pour inclure toutes les entités du secteur public.
Les actions spécifiques pour améliorer la transparence au Sénégal incluent également la réduction des clauses de confidentialité abusives et la mise en place d’un contrôle parlementaire plus strict. Un tel cadre juridique renforcerait la confiance des investisseurs, tout en assurant que les citoyens aient accès à une information complète sur l’état des finances publiques.
La transparence de la dette publique est un enjeu vital pour la stabilité économique et la démocratie. Dans des pays comme le Sénégal, où la gestion des ressources publiques reste fragile, des réformes ambitieuses sont nécessaires pour éviter que l’opacité de la dette ne menace davantage la stabilité macroéconomique. Les autorités sénégalaises, avec le soutien d’acteurs internationaux, devraient prioriser la mise en place de mécanismes de transparence et de responsabilité pour permettre aux citoyens de jouer un rôle actif dans la gestion des finances publiques et d’assurer une croissance économique durable.
En fin de compte, la transparence de la dette n’est pas seulement une question technique ; elle est essentielle à la confiance publique et à la préservation des ressources pour les générations futures.
Par Zaynab SANGARÈ