Publié le 27 Apr 2012 - 09:04
ICI, ON SE TUTOIE ! - ALIOUNE MBAYE NDER

''Macky, Wade et moi''

 

Accusé de transhumance du côté du nouveau président Macky Sall, après avoir dédié une chanson à Abdoulaye Wade, Alioune Mbaye Nder s'en défend et précise ses relations avec les deux hommes.

 

Nder, on te reprocherait d'avoir transhumé du côté du nouveau président Macky Sall, après avoir soutenu Wade en 2007 –tu lui as même rendu hommage à travers une chanson-, qu’en est-il exactement ?

 

Cela me met hors de moi, parce que les gens ne savent pas de quoi il retourne. Mais, c’est la vie, il faut faire avec. Je m’étais promis de ne rien dire à ce propos, par bonne foi et surtout, pour ne pas encore faire la Une de la presse en ma défaveur.

 

 

N’est-ce pas le cas ?

 

Oh non ! Non du tout ! Je ne crois pas que ce soit le cas. C’est juste que certains de vos confrères n’ont pas compris peut-être ma démarche, encore moins les vrais détails de l’histoire. Ce que beaucoup de personnes ignorent aujourd’hui - je l’ai dit à l’antenne de Zik Fm (NDLR, jeudi dernier, invité par Dj Bouba) - c’est que c’est le président Macky Sall, alors directeur de campagne du candidat Wade en 2007, qui m’a amené voir ce dernier et nous a présentés. Voilà la vraie information. Comment les choses se sont passées ? Le président Abdoulaye Wade devait recevoir le prix Houphouët Boigny à Paris et il était accompagné de beaucoup d’artistes… Ce qui m’étonne, c’est pourquoi on veut s’acharner sur moi, alors que d’autres collègues artistes ont plus et bien bouffé (sic) chez Wade ? Je m'interroge, et c’est ce qui me fait rire parfois. Je te jure, Pa Assane, toi tu me connais… C’est donc après avoir constaté que les autres avaient participé à la fête que je me suis dit, puisque c’est le président de la République qui a gagné un prix, il fallait lui rendre un hommage mérité. C’est ainsi que je suis allé, en compagnie de l’actuel président Macky Sall, alors directeur de campagne du président Wade, pour dire à celui-ci que je voulais organiser un gala à Sorano que j’appellerais ''Sargal Gorgui''. Ce n’est ni plus ni moins que cela qui m’a poussé à faire la chanson pour Wade. Je trouve cela très normal au vu de son statut de président de la République.

 

 

Et qu’as-tu dit à Macky Sall en son temps ?

 

Il m’a reçu chez lui par l’entremise de son frère qui est un ami à moi. Je lui ai fait part de mon désir de faire ce spectacle. Il m’a remercié et félicité pour mon projet. Ensuite, il m’a demandé ce qu'il pouvait faire dans ce sens. Je lui ai dit que j’avais besoin d’appui pour réussir la manifestation. Il m'a demande à combien j’avais estimé mon budget d’organisation. J'ai répondu que c’était juste 5 millions. Il a réagi instantanément et m’a remis 7 millions, c'est-à-dire 2 millions de plus, en me disant que j’aurais peut-être besoin de ce surplus et qu’il n’est pas évident qu’on se revoie rapidement. Ainsi, il a appelé le président Wade, séance tenante, pour l'informer de mon projet. Ce dernier était si content qu'il a demandé que nous le retrouvions immédiatement au Palais. Ce jour-là, j’étais en jean et quand Macky m’a dit d’y aller, je lui avais fait remarquer que je ne pouvais y aller habillé de la sorte. Il m’a répondu qu’on ne devait pas faire attendre le président et qu’il fallait y aller directement. Il a même ajouté : ''C’est moi-même qui conduis, aujourd’hui''. Voilà ce que je retiens aussi de Macky Sall, sa simplicité et son humanisme, un homme pragmatique et de parole. Son acte, ce jour, m’a beaucoup marqué. Et je crois, aujourd’hui, que là où il est, en tant que président nouvellement élu, c’est une bonne chose pour le Sénégal et les Sénégalais. Prions pour lui et ça ira Incha Allah.

 

 

Au vu de ce qui s’est passé par la suite, et avec le départ de Wade du pouvoir, regrettes-tu cette chanson ?

 

Oh non ! Pourquoi devrais-je le regretter. J’ai agi par conviction, par rapport à un événement ; que mon président a reçu un prix que j'ai jugé opportun d'honorer en chantant pour lui. Il n’y a rien de mal à cela, je pense. Maintenant, chacun a son avis là-dessus et son interprétation, je respecte cela, mais qu’on respecte aussi ma vision. Pa Assane, nous tous, disons la majorité d’entre nous, avions voté pour le vieux en 2000, en vue d’un changement effectif pour le bien du peuple sénégalais. Nous sommes tous responsables de ce qui s’est passé, si on doit tenir cela en compte. La vérité est que les urnes ont eu raison de Wade et de son camp, sur ses choix. Il en va ainsi de la démocratie et c’est bien pour nous tous aussi. Le contexte dans lequel j’avais fait cette chanson n’a rien à voir avec celui d'aujourd'hui, des élections de 2012. Il faut voir la réalité en face, la situation était devenue très grave et dangereuse, avec les événements regrettables qui ont précédé l’élection présidentielle. Je compatis avec les familles des défunts Mamadou Diop et autres. Je pense à eux. Aujourd’hui, la nation sénégalaise doit leur rendre un homme mérité. Mais, je n’ai rien à regretter. Au contraire, ce pourquoi j’avais fait cette chanson, en son temps, c’était la réalité. Aujourd’hui, on a dépassé cela, on passe à autre chose. La vie continue. Abdou Diouf est parti, Wade aussi ; je lui souhaite une retraite bien méritée et prie qu’il aille bien, parce qu’après tout, l’histoire retiendra toujours qu’il a été président de la République du Sénégal, quel que soit ce qui lui sera reproché. Ce qu’il faut souhaiter, c’est que Macky réussisse sa mission et que le peuple se glorifie de l’avoir élu, un soir de dimanche 25 mars 2012, comme président de la République du Sénégal. Lui aussi, partira et un autre viendra, ainsi de suite.

 

 

Où est-ce que t’en es avec ton produit ''Bul Yapp Sa Palax (ou dignité) ?

 

Le produit marche. Je me rends compte que, contrairement aux autres qui l’ont précédé, il a mis du temps avant que les mélomanes l’adoptent. Et actuellement, en soirée, les morceaux cartonnent, le public adore (il joue au Madison tous les mercredis et en acoustique, tous les jeudis, au restaurant Must - pub gratuite). Et je suis fier, aujourd’hui, de voir que celui qui a prédit que cet album allait faire son chemin et me valoir des lauriers est devenu ministre de la République.

 

 

Tu veux parler de Youssou Ndour ?

 

Oui. Voilà quelqu’un qui a un mérite inestimable. Ce gars est parvenu à rendre à la musique sénégalaise sa dignité, ainsi qu’à tous les hommes et femmes d’art. J’en profite, d’ailleurs, pour le féliciter et lui dire qu’il a mon soutien sans faille, pour l’aider à réussir sa mission. Car autant le président Macky Sall est très attendu, autant Youssou l’est aussi. Lors de l’enregistrement de ce produit, Youssou est venu jusqu’au studio et est resté deux heures avec nous, les musiciens et moi. Il y avait une très bonne ambiance. Quand il a fini d’écouter le produit, il m’a dit : ''Boy, tu en as pour 3 ou au moins 4 ans, parce que ça, c’est fort. Je suis content parce qu’on a retrouvé notre Nder''. Cela m’a beaucoup touché, venant d’une légende comme lui. En tout cas, il a l’occasion, aujourd’hui, de montrer son génie au monde entier, car il en a vraiment.

 

PA ASSANE SECK

 

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