Victoire sans détours
Pour le camp Benno Bokk Yaakaar, la victoire est presque acquise. Mieux, l’affaire serait pliée dès le premier tour. Des chiffres sont même avancés pour entretenir l’enthousiasme des militants.
Chef d’une armée mexicaine, une des prouesses de Macky Sall est d’avoir cristallisé autour de sa personne des forces disparates et rivales. L’armada est en marche comme sur un échiquier russe. Avec assurance et détermination, le roi Macky mène ses troupes au pas de charge, à la conquête des électeurs. La reine Marème et sa cour sillonnent les fronts pour servir les munitions. Coriaces et expérimentés, les dinosaures de la trempe de Niasse ou Tanor, en véritables tours de garde, veillent sagement au grain. Déjà, en 2012, ils lui avaient généreusement balisé la voie royale par leurs divergences avant de se ranger, en républicains, derrière l’’’apériste’’. Les preux cavaliers parcourent les contrées, razziant les camps adverses et capturant les transhumants déroutés. Les fous, comme des fauves, exhibent à l’unisson leurs crocs, prêts à bouffer de l’opposant pour sécuriser le pont Levis qui mène au palais.
Parti plus vite que ses concurrents, Macky s’en va allégrement vers un second et dernier mandat. Ses concurrents n’ont pas vu le signal du départ, alors qu’ils étaient en train d’attacher leurs lacets, puis d’accorder leurs violons.
Adversaires dangereux écartés et mis hors d’état de nuire, candidats filtrés, Macky marque son territoire. En attendant de franchir l’arche de Triomphe, le président sortant exhibe déjà ses hauts faits d’armes. Le Fouta, dans l’escarcelle, est définitivement pacifié avec la capitulation de l’Amazone Aïssata Tall Sall. Le Sine et le Saloum sont ratissés dans les moindres recoins. La forteresse de Thiès est prête à céder avec l’intrépide Talla Sylla comme cheval de Troie. La Casamance vaillamment défendue par le soldat Sonko, fait acte d’allégeance depuis le ralliement de Baldé. La campagne minée est passée au peigne fin pour neutraliser les snipers embusqués. L’intérieur du pays au pas, le rouleau compresseur Apr continue de piéger les adversaires qui assiègent le palais de Dakar.
Macky, qui ne lésine pas sur les moyens, mobilise partout et draine des affluences monstres. Dopé par la marée marron qui déferle dans les rues et stades du pays, la victoire est en vue.
Fort d’un bilan élogieux et d’un programme qui tient la route, le président-candidat égrène les réalisations de son septennat. Kor Marème déroule une litanie de promesses pour le prochain quinquennat. Le peuple palpe avec satisfaction les infrastructures qui émergent et en redemande. Les citoyens, soucieux de stabilité, ferment, pour l’instant, les yeux sur les promesses non tenues d’une gouvernance sobre et vertueuse. Macky, en sursis, aura certainement cinq ans pour se faire pardonner des défaillances et rafistoler le ventre mou de son bilan.
Pendant que l’opposition marche pour garder le souffle au second tour, Macky court pour arracher la timbale dès le 24 février 2019.