Publié le 28 Jul 2021 - 23:28
MARIE JOSEPHINE DIALLO, SECRETAIRE GENERALE DE L’ASSEMBLEE NATIONALE

L’expérience silencieuse 

 

C’est certainement la dernière personne que l’on remarque, en suivant une session de travaux parlementaires. Siégeant aux côtés du président de l’Assemblée nationale, Madame Marie Joséphine Diallo est celle qui en sait le plus sur les coulisses des décisions émanant des représentants du peuple.  

 

Discrétion. Timidité. Repli sur soi. Phobie de voir les projecteurs braqués sur soi. Difficile d’expliquer la réticence de la secrétaire générale de l’Assemblée nationale à l’idée d’apparaître dans les médias. Posant des questions sur madame Marie Joséphine Diallo, la réponse est souvent la même : ‘’Ce sera difficile de la faire parler. Cette dame est très réservée. Elle n’aime pas s’afficher dans les médias.’’ Au fur et à mesure que la palette d’interlocuteurs s’agrandit, ces informations se confirment. N’allez pas croire qu’elle fait peur. On ne le croit pas ! Il y a surtout ce respect que lui voue chaque personne qui la connait un tant soit peu et qui ne désire point l’exposer plus qu’elle ne le désire.

Pourtant, Marie Joséphine Diallo aurait tellement de choses à dire ! Elle qui a côtoyé cinq présidents de l’Assemblée nationale du Sénégal (Cheikh Abdoul Khadre Cissokho, Youssou Diagne, Pape Diop, Macky Sall, Mamadou Seck et Moustapha Niasse) depuis qu’elle a accédé à la fonction de secrétaire général de l’hémicycle, en 1996.

Mais comme disait l’ancien secrétaire perpétuel de l'Académie française, Etienne Lamy, ‘’le grand art en politique, ce n'est pas d'entendre ceux qui parlent, c'est d'entendre ceux qui se taisent’’. Et cette pensée, la secrétaire générale de l’Assemblée nationale du Sénégal a su se l’appliquer. Surtout à l’ère du numérique, quand il est de plus en plus difficile de cacher quoi que ce soit.

N’empêche, une personne s’est prêtée au jeu des témoignages. Plus pour rendre hommage à une grande dame qu’autre chose. Si des déformations professionnelles ou l’envie de plaire du président de l’Assemblée nationale auraient pu amener la secrétaire générale de l’hémicycle à disséminer quelques embuches sur le chemin des députés opposants, ‘’il n’en est rien’’, assure Cheikh Bamba Dièye.

Celui qui a connu Mme Joséphine Diallo, alors qu’il enfilait pour la première fois ses habits de représentant du peuple en 2007, retient d’elle ‘’sa grande discrétion, sa serviabilité et son professionnalisme’’. Mais pas que !

Occupant une position au cœur du dispositif de l’Assemblée nationale qui la place aux confluents de tous les antagonismes, elle reste positive et à équidistance des chapelles politiques. ‘’J’imagine bien que les années passées à l’Assemblée lui ont offert une grande expérience dans le management des députés d'opinion et de sensibilités différentes, analyse l’ancien maire de Saint-Louis. Dans la perception que je peux avoir de son activité, je puis dire qu'elle utilise efficacement sa connaissance du fonctionnement du Parlement pour bonifier ses rapports avec les députés et le personnel sous ses ordres. Je n’ai pas encore entendu un député de l’opposition se plaindre d’un déséquilibre ou d’un traitement partisan dont elle serait la source’’.

En tant que secrétaire générale, Marie Joséphine Diallo dirige et coordonne l’ensemble des services de l’Assemblée, tout en veillant à la bonne application des textes réglementaires et au bon fonctionnement des procédures. Un grand accomplissement pour celle qui, en rejoignant l’hémicycle en 1978, a débuté en travaillant au sein de la bibliothèque. Par la suite, elle a occupé différents postes, notamment directeur des services législatifs, secrétaire général adjoint, avant de se retrouver à la tête du secrétariat général.

Dans ses missions, elle est constamment sollicitée à travers des dossiers dont les plus récents concernent, entre autres, le vote de la loi sur le Code électoral, les modifications du Code pénal et du Code de procédure pénale ou encore la levée de l’immunité parlementaire d’Ousmane Sonko, en mars dernier. Autant d’épisodes lors desquels les positions qu’elle a tenues ont séduit le leader du Front pour le socialisme et la démocratie/Benno Jubël (FSD/BJ).

‘’Je suis teigneux comme opposant, parce que toujours sur le qui-vive, à l'affût de la moindre faille et prêt au combat. Malgré cela, elle a su entretenir avec moi des relations saines et respectueuses. Elle est toujours à l'écoute et est d’une grande disponibilité. Je l’appelle affectueusement «ma tante», pour l'excellence des relations qu'elle entretenait avec Cheikh Abdoulaye Dièye (son père), lorsqu'il fut député de 1998 à 2001. Elle me le rend bien, en m’appelant «mon neveu»’’, témoigne-t-il.  

Affectueuse, Marie Joséphine Diallo est surtout compétente. Et ses talents traversent les frontières. Depuis plus de dix ans, elle préside l’Association des secrétaires généraux des Parlements francophones (ASGPF), une organisation qui réunit les secrétaires généraux de tous les Parlements francophones du monde.   

Si Marie Joséphine Diallo fait pratiquement l’unanimité au sein des députés, des voix s’élèvent contre elle. Cela, depuis 2011, année à laquelle elle était censée aller à la retraite. Cela avait même provoqué, en 2014, certains remous à l’Assemblée nationale, nécessitant l’intervention de l’actuel président de l’institution. Expliquant que son prédécesseur Mamadou Seck avait choisi de la maintenir en place, vu ‘’sa compétence, sa rigueur, son sens de l’humain, sa connaissance des dossiers et des procédures’’, Moustapha Niasse a fait prévaloir une décision relevant des prérogatives du président de l’Assemblée nationale, pour la maintenir en place.

A 70 ans, la secrétaire générale reste encore utile au bon fonctionnement de l’hémicycle. Et si ‘’elle est encore là’’, pense Cheikh Bamba Dièye, ‘’c'est parce que ses différents employeurs ont été pleinement satisfaits de ses services’’.

Lamine Diouf

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