Divergences d’intérêt au profit du peuple sénégalais ?
Les émeutes de l’électricité du 27 juin 2011, la mobilisation du M23 et celle de la place de l’Obélisque, sur fond de demande sociale et de défense de nos institutions, n’ont-elles pas fini de démontrer la maturité politique du peuple sénégalais ? N’est-ce pas là encore une démonstration de toute la vitalité de notre démocratie ?
Aussi, n’est-il pas temps que les hommes politiques de ce pays comprennent que leurs manœuvres politiciennes ont fini de sécréter, à l’instar des grandes démocraties, une opinion publique forte, capable de décoder et d’apprécier les signaux qu’ils lui envoient tous les jours, pour enfin, jouer pleinement le rôle qui est le sien. Rôle de sentinelle et d’arbitre. A partir de cet instant, l’essentiel n’est-il pas que chacune des parties joue sa partition : que les opposants s’opposent de la forme la plus républicaine possible, et que les tenants du pouvoir s’attellent à satisfaire les attentes des populations, raison pour laquelle, ils ont été élus.
Aujourd’hui, le coût de la vie a atteint des proportions telles que les populations ne veulent plus entendre qu’un seul discours ; celui dont la substance est : diminution. En témoignent les réactions très hostiles, y compris celles de responsables de la mouvance présidentielle, aux déclarations de Moustapha Niasse et du Premier Ministre sur les capacités du gouvernement à faire baisser les prix de certaines denrées. Sous ce rapport, tenants du pouvoir comme opposants doivent comprendre, pour les premiers, qu’ils seront désormais jugés à l’aune de leurs capacités à résoudre les problèmes économiques auxquelles est confronté notre pays, et pour les seconds, que c’est à l’image de leurs comportements et de la pertinence de leurs propositions alternatives à faire avancer ce pays qu’ils seront appréciés par le peuple.
Les réponses apportées par certains responsables de l’APR, par ailleurs investis de pouvoir de décision, aux sorties de Monsieur Idrissa Seck et à la marche du PDS, ne nous semblent pas être les bonnes. A partir du moment où on ne peut dénier à ces opposants, aussi bien de Rewmi que du PDS, le droit de manifester et de critiquer, il appartient dès lors aux tenants du pouvoir d’apporter les réponses adéquates, au lieu de verser dans les attaques personnelles, dans les invectives ou injures. N’existe-t-il pas un adage qui dit : «d’un bon diagnostic sortent les bons remèdes». L’exemple du PDS est là tout frais dans les mémoires et demande à être médité. En effet, au sortir de leur défaite cuisante de 2009, qui sonnait déjà comme un avertissement, les responsables de ce parti, au lieu d’analyser froidement et objectivement la situation afin d’identifier les causes réelles de cette débâcle et d’apporter les correctifs nécessaires, ont préféré accuser les élus locaux pour leur gestion foncière, oubliant au passage, sciemment ou inconsciemment, que leur leader Maître Abdoulaye Wade a essuyé des brassards rouges partout dans le pays et était même interdit d’accès dans la banlieue. La défaite de la présidentielle n’était rien d’autre qu’un prolongement de celle des locales de 2009 dont les causes profondes avaient pour nom : incapacité à régler les problèmes liés à la demande sociale et à l’énergie, arrogance et gaspillage des derniers publics. Cela nous semble bien compris par le Président Macky Sall.
A la lumière des directives et discours du chef de l'Etat et la dimension empathique dont il fait montre à chacune de ses adresses à l’endroit du peuple, il n’est même pas permis de douter de sa volonté de prendre en charge et de régler la question de la demande sociale. Hormis certaines postures qui frisent l’arrogance de la part de quelques responsables de l’APR frileux aux sorties de Idrissa Seck et du PDS, les ruptures annoncées par le Président de la République sont perceptibles. A notre humble avis, là est le préalable à tout règlement de la demande sociale. Sans respect pour le peuple pour qui et avec qui, on gouverne, il n’est pas possible de gouverner dans la paix, gage de tout succès économique pour lequel, nous sommes loin du compte. En tant que libéral, le Président Macky Sall semble déjà installé dans cette troisième voie entre le libéralisme et le socialisme qui se veut humaniste, portée par le philosophe Emmanuel Mounier et qui alimente le débat politique en France. Cette troisième voie, selon Emmanuel Mounier, s’exclut de toute idéologie qui ne met pas l’homme au cœur de ses préoccupations : «une voie qui ne s’enferme pas dans la vaine poursuite d’un "bonheur" ramené à la maximisation du plaisir, de la puissance, de l’argent, du corps ou du confort» semble être celle empruntée par le Président Macky et son parti l’APR. Peut-être enfin, ce libéralisme teinté d’une dose d’humanisme tant prôné par son prédécesseur, qui n’a jamais vu le jour ou du moins n’a jamais été perçu comme un vecteur de la politique économique et sociale du PDS.
La traque des biens présumés mal acquis, est non seulement, une exigence des populations mais constitue également un préalable à toute gouvernance vertueuse, en ce sens qu’elle sert d’exemple et devrait permettre de retrouver tout ce magot dont notre pays a largement besoin, dissuadant ainsi ceux qui seraient tentés d’imiter les mauvais exemples. Dans cette dynamique, il appartient aux collaborateurs du Président de comprendre que la gouvernance étatique est surtout une question de gestion d’une équipe qu’un problème individuel et que la seule volonté du Président ne suffit pas.
Aux camarades de parti du Président, il revient de l’accompagner dans la paix et la quiétude en faisant preuve de tolérance à l’endroit des opposants sans qui, il n’est point de démocratie.
L’existence des partis comme le REWMI et le PDS est une exigence du peuple qui les perçoit, au même titre que la société civile, comme un contre pouvoir. Les intérêts du peuple sénégalais ne pourraient résider que dans une confrontation d’idées et d’actions entre l’APR et ces derniers, dans le respect, bien entendu, des lois et règlements qui régissent le fonctionnement de notre de démocratie.
Ce peuple, conscient de sa souveraineté, sera le seul et unique juge en 2017 si bien sûr, le mandat est ramené à cinq ans.
Mamadou FAYE
Hamo-Scat-Urbam