Les frustrés demandent une suspension du processus
Le collectif des candidats ‘’spoliés’’ conteste la décision du Conseil constitutionnel suite à la publication de la liste finale des 20 candidats à l’élection présidentielle. Il exige la suspension du processus électoral afin que certains candidats recalés puissent être inclus dans la course à la présidence.
Suite à la publication de la liste définitive des candidats à l’élection présidentielle, des candidats invalidés et certains candidats validés, qui se disent spoliés par leurs parrainages, se sont réunis pour exprimer leurs frustrations. Lors de la vérification des parrainages, plus de 900 000 électeurs sénégalais ont été considérés comme ne figurant pas sur le fichier électoral, selon le collectif. Un membre de ce collectif, Aly Ngouille Ndiaye, qui a validé sa candidature, a rejeté les explications du Conseil constitutionnel qui a invalidé la candidature de certains candidats à travers le filtre du parrainage.
"Je conteste fermement. En 2019, j'ai moi-même supervisé des élections. En effet, j'avais mis en place un dispositif très rigoureux. Après ces élections, les acteurs politiques se sont réunis avec le ministère de l'Intérieur. Il avait été convenu que dorénavant, le critère discriminant serait une condition non négociable pour le rejet d'un parrain sur le fichier", a-t-il souligné hier en conférence de presse.
Les exclus de la course demandent leur intégration, même si cela implique de repousser les élections.
De son côté, concernant son cas, Cheikh Tidiane Gadio note que son dossier a été déclaré irrecevable, parce que ses partisans et lui l'ont fait déposer par leur mandataire, alors que, selon le Conseil constitutionnel, le dossier doit être déposé par le candidat lui-même, son représentant ou un mandataire ayant le pouvoir de représentation. "Notre mandataire a effectivement un pouvoir de représentation, car il a été désigné comme représentant du candidat", affirme-t-il. En dénonçant l'utilisation des clés USB, il se demande "comment se fait-il que nous ayons retrouvé plus de 3 300 prénoms et plus de 1 600 noms de famille modifiés dans notre fichier original ? De plus, parmi les 1 600 noms de famille modifiés, on nous a présenté un nom de famille qui n'existait pas du tout dans notre fichier : Tine (700 à 800)".
Monsieur Gadio affirme que "les membres du Conseil constitutionnel, bien qu'assermentés, se sont transformés en ingénieurs informaticiens". Il considère la clé USB comme l'outil le moins fiable pour les informaticiens. "C'est un peu archaïque pour le Sénégal de travailler avec des clés USB", déplore-t-il.
Selon lui, "il est injuste de laisser passer une telle injustice. Il faut arrêter ce processus. Nous devons nous battre pour trouver une solution. Il est hors de question d'accepter l'inacceptable. Si nous acceptons ce qui s'est passé aujourd'hui, cela signifie que les élections de demain sont déjà jouées, tout est arrangé et les résultats sont presque connus. Et cela n'est pas bon pour le Sénégal".
Le docteur Abdourahmane Diouf est dans la même logique. Interpellant la Communauté économique des États de l’Afrique de l'Ouest et l’Union européenne, il estime que les élections ne doivent pas se tenir sans eux. ‘’Je ne suis pas dans la logique d’aller à des élections comme ça. Il faut qu’on nous réintègre… Nous n’acceptons pas qu’une victoire technique soit prononcée au soir du 25 février. Nous n'avons pas abdiqué. Nous considérons que nous sommes toujours candidats’’, a-t-il dit appelant à la mobilisation tout en se montrant ouvert au dialogue. ‘’C’est un coup d’État électronique qui a été exécuté par un Conseil constitutionnel censé faire du droit, mais qui a essayé de faire de l’informatique et qui s’est montré très faible dans ce domaine’’, a-t-il ajouté.
Pour sa part, Mimi Touré crie à ‘’un véritable scandale’’. Elle appelle aussi à une mobilisation pour des élections transparentes. "Sinon, ils n'arrêteront pas en si bon chemin", a-t-elle estimé, se disant plus que jamais motivée. ‘’Le Sénégal fait la rusée dans toute l’Afrique. C’était une décision politique orientée. Ça n’a rien à voir avec la loi’’, a fustigé Aminata Touré, catégorique. Bougane Guèye Dani est de son d'avis. Pour lui, ‘’la justice est au service de l'injustice". Et dans ce cas, il faut la combattre’’.
Quoi qu'il en soit, il est à noter que c'est la première fois que le Sénégal organise une élection présidentielle avec autant de candidats, malgré les exigences du parrainage. Vingt candidats ; un chiffre considéré comme pléthorique. Ils étaient cinq lors de l'élection présidentielle de 2019.
BABACAR SY SEYE