Un patron de télé qui n’apparaît presque jamais sur sa chaîne. Si si, cela existe, au Sénégal ! Et gare à ses employés qui oseraient le filmer même par inadvertance. C’est à la RDV que cela se passe et la consigne est suivie à la lettre. Point. Les autres patrons de chaîne qui confisquent leurs télés à des fins de propagande personnelle devraient en prendre de la graine. C’est le cas de Youssou Ndour qui a mobilisé pendant près d’une heure de temps d’antenne sur la TFM pour se livrer à un exercice que l’on pourrait qualifier de show politico-musical.

Un genre hybride mêlant variétés et politique : certaines chansons de son répertoire ont été interprétées par son neveu pour illustrer son discours d’opposant, ancien candidat recalé à la Présidentielle. Aberration : pas de journalistes (un choix de la rédaction ?) ou d’animateur pour conduire cette émission au numéro unique, mais un communicateur traditionnel pour éviter à l’émission de tomber dans un ennuyeux monologue aux allures de cours magistral de politique sénégalaise.

Du côté de Walfadjri, c’était tout le contraire. Les journalistes sont venus en grand nombre répondre à l’invitation du PDG, Sidy Lamine Niasse, dans un de ses exercices favoris : la conférence de presse, format tribunal de l’inquisition où le ''Mollah de Sacré-Cœur'' accuse tout le monde de tout et de rien. Il faudrait recenser le nombre qu’il en donne chaque année tellement Sidy affectionne ce genre.

Que l’on soit patron de télé, doublé de star de la musique et de chef d’entreprise, ou islamologue, journaliste et propriétaire d’un groupe de presse, dans les deux cas, cela aide de disposer d’une télévision toute acquise à sa cause pour faire sa promo personnelle. Les journalistes employés de ces groupes de presse pourraient être tenus de le faire. Après tout, il s’agit de leurs patrons ! Mais pour les autres ? Le boycott pourrait être de mise. Seulement, personne ne veut prendre le risque de passer à côté d’un déballage croustillant quand il s’agit du PDG de Walfadjri, et encore moins d’une fracassante sortie contre le régime libéral ou même contre les opposants, lorsqu’il s’agit de la nouvelle icône de la politique sénégalaise auprès des médias nationaux et internationaux.

Qu’en est-il du président-candidat Abdoulaye Wade ? Lui, fait encore plus fort, car il dispose de ''Sa'' presse et de ''Ses'' journalistes. Mieux que les deux autres patrons de groupe de presse, lui pourrait être assimilé à un magnat des médias, tous supports confondus : télévisions, quotidiens, magazines, radios et portails d’info sur le web.

Pour tous ces trois ''cas'', lorsque leurs supports de communication sont enclenchés tels des machines de guerre dévolues à leurs fins propres, c’est aux journalistes de savoir faire la part des choses pour services rendus à l’éthique et échapper ainsi à cette instrumentalisation à laquelle ils sont exposés. En attendant l’arrivée de SEN TV du groupe DMédias, en phase test depuis mercredi 21 mars 2012. Cette chaîne se veut tout simplement Télé Askan Wi ou la télé du Peuple. Mais, chut, attendons de voir !

Karo DIAGNE-NDAW