L’entente directe, un mal nécessaire
Même si les marchés passés par entente directe sont souvent décriés, ils constituent une disposition prévue par le code général des marchés publics. D’après le chef de la division formation, étude et conseil de la direction centrale des marchés publics (DCMP), l’entente directe s’impose quand il y a ‘’urgence impérieuse’’, ‘’détention d’un droit d’exclusivité’’, ‘’marché complémentaire’’ ou ‘’secrets’’.
Le rapport 2013 de l’Autorité de régulation des marchés publics, comme à l’accoutumée, a suscité beaucoup de commentaires à cause de nombreux marchés passés par entente directe. Pourtant, cette disposition est prévue par le code général des marchés publics, si l’on en croit le chef de la division formation, étude et conseil de la direction centrale des marchés publics (DCMP). Selon Mamadou Lamine Sow, le nombre de marchés passés par entente directe n’a même pas atteint en 2013 le seuil de 20% du montant total des marchés souscrits.
Toutefois, dans l’entendement populaire, un marché passé par entente directe communément appelé marché de gré à gré cache souvent une nébuleuse. Mamadou Lamine Sow faisait une présentation sur le ‘’nouveau dispositif de la passation des marchés publics au Sénégal’’, lors d’un atelier organisé par le ministère de l’Intégration africaine, du NEPAD, de la Promotion de la bonne Gouvernance à l’intention des journalistes, hier à l’Ecole nationale d’Administration (ENA).
De ses explications, il ressort : ‘’’Si une urgence impérieuse’’ s’impose, on peut passer directement à une entente directe, mais à condition, dit-t-il, d’avoir ‘’l’autorisation’’ ou ‘’l’avis’’ de la Direction chargée du Contrôle des marchés publics’’. Par contre, prévient-il, il ne faut pas abuser de cette disposition car, dans les engagements pris devant les bailleurs, les marchés passés par entente directe ne doivent pas dépasser 20% du seuil de marchés attribués. Les marchés par entente directe ne favorisent pas la concurrence entre les soumissionnaires et certains en profitent pour enrichir des proches ou des amis.
En plus de l’urgence impérieuse, un marché peut être passé par entente directe s’il y a une ‘’détention d’un droit d’exclusivité’’, s’il s’agit d’un ‘’marché complémentaire’’ ou d’un ‘’marché de secrets’’. Si on fait recours à une entente directe dans le cadre d’un marché complémentaire, c’est pour éviter des problèmes surtout si c’est un marché de construction. Pour éviter des problèmes, mieux vaut, poursuit-il, donner le marché au soumissionnaire qui avait commencé les travaux. Mais la condition sine qua non pour passer à un marché complémentaire est qu’il faut que le ‘’marché soit techniquement profitable ou économiquement profitable’’.
Pour rappel, le prolongement de l’autoroute à péage de Diamniadio à l’aéroport international Blaise Diagne de Diass avait fait l’objet d’un marché complémentaire au profit de l’entreprise Eiffage qui avait construit le premier tronçon. Une décision qui avait suscité le tollé car plusieurs acteurs soupçonnaient, par là, un gré à gré qui ne favorise pas la concurrence.
Par ailleurs, même si l’entente directe est légale, le mode par défaut de passation des marchés publics, informe le spécialiste, c’est l’appel d’offres ouvert (AOO). L’AOO, dit-il doit être la règle parce qu’il réunit l’ensemble des principes fondateurs de la passation des marchés publics. ‘’Il permet la mise en œuvre de la concurrence. Il faut un appel à la concurrence pour recevoir toutes les offres, les évaluer et faire le meilleur choix’’, invite le chef de la division formation, étude et conseil de la DCMP.
Cependant, il arrive des circonstances impérieuses qui poussent les autorités contractantes à recourir à d’autres procédures de passation des marchés publics, notamment la demande d’appel d’offres restreint. En outre, pour recourir à un marché par appel d’offres restreint (AOR), il faut qu’une ‘’urgence simple’’ s’impose. Dans ce cas de figure, un appel restreint à candidatures peut être fait avec au moins trois candidatures après avis de la direction chargée du contrôle des marchés publics.
L’équation des collectivités locales Dans le dernier rapport de l’Autorité de régulation des marchés publics, beaucoup de collectivités locales ont été épinglées. Ce qui repose encore l’impérieuse question de la maîtrise de la passation des marchés publics par les communes, surtout avec l’acte 3 de la décentralisation. Toutefois, les collectivités locales notamment les petites communes n’ont pas les ressources humaines suffisantes pour mettre en place une bonne cellule de passation des marchés publics. Mais, de l’avis du chef de la division formation, étude et conseil de la DCMP, Mamadou Lamine Sow, des dispositions particulières ont été prises pour ces petites communes. Par exemple, ces communes qui n’ont pas suffisamment de ressources, peuvent faire la publicité de leurs marchés à travers des affichages pour rendre publique l’information au lieu d’acheter des espaces publicitaires dans les journaux de la place. En outre, pour régler cette question, le Directeur de la Réglementation et des affaires juridiques de l’ARMP propose la ‘’maîtrise d’ouvrage délégué’’. Mais cela ne pourra se régler, d’après Ely Manel Fall, qu’auprès d’une administration locale’’. ‘’Dans certaines communes, il n’y a pas de spécialistes de la passation des marchés. Il n’y a que le secrétaire et les conseillers. Il n’y a pas de personnel d’appui. Il faut un personnel d’appui qui prend en charge ce problème et pour ça, il faut une administration publique locale’’, conseille-t-il. |
A. NG. NDIAYE