Une faute de non-transparence
Les supputations autour du limogeage du procureur spécial de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI) sont nombreuses, diverses, sans que l’on sache exactement ce qui a été reproché à Alioune Ndao. La nature ayant horreur du vide, l’opinion doit se contenter de ce que la presse a réussi à engranger comme «révélations» sur la question parce que du côté de l’Etat, c’est motus et bouche cousue. Soit une grosse faute de non-transparence.
La manière cavalière avec laquelle le ci-devant procureur de la Crei a été éjecté de son piédestal n’est pas seulement inélégante ou inappropriée à l’endroit d’un haut magistrat, comme ont pu le dire avec justesse des acteurs impliqués - ou non - dans le dossier de la traque des biens supposés mal acquis. Elle révèle le côté inquiétant d’une gestion «politique» entrevue. Lorsque tombe, en effet, un maillon essentiel du principe de reddition des comptes et de la lutte contre la mal gouvernance, il doit y avoir des explications. Or, il n’y en a pas.
Et c’est intolérable ! Le jeu de cache-cache auquel se livrent les autorités n’est pas digne de leurs engagements solennels devant les citoyens de la République à privilégier les intérêts supérieurs du pays au détriment des coteries de pouvoir. Qu’y-a-t-il de si dangereux, de si tragique dans le limogeage d’Alioune Ndao pour que l’opinion publique nationale soit si gravement privée d’informations officielles ? Et l’on retombe encore une fois dans l’arrogance, ce défaut génétique propre aux politiciens frappés par l’ivresse du pouvoir, l’illusion de la puissance, la capacité de pouvoir tout manipuler à leur guise.
Aujourd’hui comme hier, mais surtout aujourd’hui, les citoyens sénégalais ont dépassé le stade de l’infantilisation permanente pour être en mesure d’entendre, d’écouter et d’apprécier des dessous comme ceux de l’affaire Alioune Ndao. C’est en face que ça ne fonctionne pas car il y a une volonté de plus en plus difficile à cacher de tourner la page de la traque des biens mal acquis. Tout le problème se résume à en trouver le moyen le meilleur de faire passer la pilule dans l’opinion. Pour nos autorités, cela vaut bien un brin de non-transparence !
MOMAR DIENG