Marie Khémesse Ndiaye dévoile les stratégies innovantes du Sénégal
Le ministre de la Santé et de l'Action sociale a engagé le chantier de la réduction des inégalités d'accès aux prestations sociosanitaires. Hier, lors d’une réunion de haut niveau sur la lutte contre la tuberculose qui s’est tenue dans le cadre de cette 78e édition de l'Assemblée générale des Nations Unies, Marie Khémesse Ngom Ndiaye a dévoilé les stratégies mises en place par le Sénégal.
Les maladies non transmissibles (MNT) font partie des plus grands défis actuels de santé. Elles touchent tous les pays du monde et concernent les personnes de tous âges. Classées comme ‘’maladies à soins coûteux’’, elles constituent un poids lourd pour les individus et un fardeau difficile à supporter pour les familles, les communautés et l’État. Pourtant, la plupart de ces pathologies sont évitables, car leurs déterminants sont essentiellement d’ordre comportemental, alimentaire, socioculturel (mode de vie), environnemental, médical et économique.
Les maladies non transmissibles compromettent ainsi les progrès en cours pour l’atteinte des objectifs de développement durable (ODD) à l’horizon 2030, dont l’une des cibles consiste à réduire d’un tiers le taux de mortalité prématurée due à cette catégorie de maladies. Pour y remédier, l’État a érigé l’accès équitable à des services sociosanitaires de qualité au rang de priorité nationale.
Hier, lors de la 78e Assemblée générale des Nations Unies, réunion de haut niveau sur la lutte contre la tuberculose, le ministre de la Santé et de l'Action sociale a décliné le plan du Sénégal qui s’adosse sur le Plan Sénégal émergent (PSE) et le Plan national de développement sanitaire et social (PNDSS) 2019-2028. Marie Khémesse Ngom Ndiaye a souligné que le gouvernement du Sénégal a mis en place plusieurs stratégies innovantes pour réduire les inégalités d'accès aux prestations sociosanitaires. Elles ont été mises en œuvre, poursuit-elle, conformément au Plan stratégique national de lutte contre les maladies non transmissibles 2017-2022 sous-tendu par les résultats de l’enquête réalisée en 2015 sur les facteurs de risque et la prévalence des MNT (enquête STEPS).
Ensuite, l’évaluation de ce plan stratégique national a conduit à l’élaboration d’un plan d’accélération de la lutte contre les maladies non transmissibles 2023-2025 en cours de mise en œuvre.
En effet, ‘’les orientations stratégiques tournent autour de différents points tels que la diminution des facteurs de risque comportementaux, l’amélioration de l’égalité des chances dans l’accès à la prise en charge, la promotion et la prévention des MNT, le renforcement des compétences individuelles en matière de santé et de lutte contre les MNT", renseigne la ministre.
D'après elle, des enjeux majeurs sont aussi à considérer, à savoir la collaboration intrasectorielle multidisciplinaire et multisectorielle, la consolidation des environnements favorables à la santé, l’amélioration de la prise en charge des MNT, le renforcement de la recherche et du suivi-évaluation.
S’agissant de la prévention primaire, la vaccination gratuite des filles âgées de 9 à 14 ans contre le papillomavirus humain (fortement incriminé dans la survenue du cancer du col de l’utérus) a été introduite dans le Programme élargi de vaccination (PEV) depuis le 31 octobre 2018. Il y a aussi le vaccin contre l’hépatite B à la naissance introduit dans le PEV depuis 2013, en prévention du cancer du foie.
Le Sénégal a promulgué, révèle Marie Khémesse Ngom Ndiaye, la loi antitabac conformément aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et prépare la révision de cette loi pour intégrer les nouveaux produits du tabac.
Au titre toujours de la prévention, ajoute le Dr Ndiaye, un livret de recettes culinaires à base de produits locaux a été conçu et élaboré par le ministère de la Santé et de l’Action sociale. "Toutefois, il est important de souligner le caractère multisectoriel de la lutte contre les MNT. C’est à ce titre qu’un comité national multisectoriel de lutte contre les MNT a été mis en place depuis 2019. Cette collaboration a permis d’élaborer un module pour la promotion du comportement sain au niveau des écoles. Il s’agit de la promotion, dès le bas âge, de l’activité physique régulière et de l’alimentation saine, entre autres’’.
Elle ajoute : ‘’Dans le cadre de la décentralisation du dépistage des lésions précancéreuses et cancéreuses du col de l’utérus, il y a la formation des professionnels de santé et l’équipement des structures. Des unités de dépistage et de traitement des lésions précancéreuses du col de l’utérus ont été mises en place dans 71 structures sanitaires, dont 11 proposent un dépistage de haute performance avec la disponibilité de tests HPV (virus du papillome humain : pour dire que notre pays va ainsi au-delà des tests classiques basés sur l’utilisation du lugol). En outre, des cliniques du diabète et de l’hypertension artérielle ont été mises en place dans des centres de santé pour renforcer le dépistage et la prise en charge de proximité de ces affections".
Maladie rénale chronique et gratuité de la dialyse
Concernant la maladie rénale chronique, selon le MSAS, des mesures évolutives importantes sont prises par l’État du Sénégal par rapport à l’accessibilité géographique et la gratuité de la dialyse dans le service public.
Ainsi, de trois centres de dialyse en 2010, le Sénégal est passé à 23 centres de dialyse dans les structures publiques en 2023. Toutes les régions disposent d’au moins une unité. "Cette extension se poursuit dans les projets de construction de nouvelles structures à Mbour, Thiès, Tambacounda et Bakel’’, renseigne la ministre.
Elle ajoute que dans le domaine de l’accès aux médicaments, la subvention de la chimiothérapie pour un montant d’un milliard de francs CFA a permis de rendre gratuite la chimiothérapie pour le cancer du sein et du col de l’utérus, et de subventionner celle des autres types de cancers à hauteur de 40 à 50 %, selon le schéma thérapeutique. ‘’Il faut noter que pour l’exercice 2023, ce budget a connu une hausse de 500 millions. De plus, la subvention pour l’insuline est passée de 300 à 500 millions pour le traitement du diabète. Relativement à la disponibilité de la radiothérapie, quatre appareils ont été installés dans les structures sanitaires publiques, dont un à l’hôpital Cheikhoul Khadim de Touba. Ce dispositif est accompagné par l’allocation d’une subvention de 75 % des frais pour renforcer la protection sociale. Ceci permet actuellement aux malades de payer les séances à cent cinquante mille francs au lieu d’un million. C’est ainsi que pour une soutenabilité et un accès durable, nous exhortons les populations à plus d’adhésion dans les mutuelles de santé au nom de la solidarité agissante’’, lance-t-elle.
En outre, la ministre de la Santé se réjouit des évolutions majeures notées dans le diagnostic et la prise en charge des affections cardiovasculaires avec l’avènement de la coronarographie à Dakar et à Touba, en plus du renforcement du service de chirurgie cardiovasculaire et thoracique.
S’agissant de la formation continue à tous les niveaux de la pyramide sanitaire, Marie Khémesse Ngom Ndiaye renseigne que des guides de prise en charge ont été élaborés sur les maladies respiratoires chroniques (asthme, bronchopneumopathie chronique obstructive) et hématologiques, notamment la drépanocytose et l’hémophilie.
‘’Au titre de la prévention de maladies du sang, l’appel est lancé aux communautés pour une meilleure compréhension des risques liés aux mariages consanguins", prévient-elle.
L’autre question importante abordée par la ministre de la Santé a été celle des ressources humaines. À ce titre, elle renseigne qu’un recrutement important du personnel sociosanitaire a été opéré, avec 3 317 agents, entre 2021 et 2023. Dans la veine, elle souligne que les bourses de spécialisation ont été augmentées, passant de cent cinquante mille à trois cent mille francs CFA.
Ainsi, selon elle, le grand défi reste aujourd’hui une bonne répartition de ce personnel à travers le pays.
"Le développement de l’offre de services n’est pas en reste avec la réhabilitation des structures de base (centres de santé, postes de santé, laboratoires), la construction de nouveaux hôpitaux de référence avec des équipements aux normes standard et la construction du centre national d’oncologie de Diamniadio qui est un pôle d’excellence pour la prévention et la prise en charge des différentes formes de cancer. De plus, des services spéciaux de prise en charge des grands brûlés sont prévus dans les nouveaux hôpitaux de Dantec, Tivaouane et Saint-Louis pour renforcer le plateau technique déjà existant dans nos services de réanimation et d’urgence’’, liste-t-elle.
Les médicaments et les produits de santé occupent aussi une place importante dans ce dispositif. Marie Khémesse indique que la Pharmacie nationale d’approvisionnement (PNA) a été renforcée pour une meilleure disponibilité des médicaments à tous les niveaux de prestations.
En outre, dans le cadre de la Couverture sanitaire universelle, une attention particulière, fait remarquer la tutelle, est réservée aux couches vulnérables, en particulier celles vivant avec un handicap dont l’enrôlement dans les mutuelles de santé et les bourses de sécurité familiale a été facilité, depuis 2014, par l’instauration de la carte d’égalité des chances. Tandis que les couches vulnérables ont bénéficié des initiatives de gratuité des soins, notamment les enfants de moins de cinq ans, les personnes âgées de 60 ans et plus, les femmes enceintes devant subir une césarienne…
CHEIKH THIAM