La migration de main-d’œuvre mise en avant à Dakar
La réunion des experts de la CEDEAO, dédiée à la migration de main-d'œuvre en Afrique de l'Ouest, a été lancée hier à Dakar. Cette rencontre vise à aborder les défis et opportunités liés à la migration de main-d'œuvre, un phénomène essentiel pour le développement économique de la sous-région.
Des experts de la CEDEAO sont en conclave à Dakar du 10 au 11 septembre. Des pays tels que la Côte d’Ivoire, le Mali, le Togo, le Liberia, le Bénin, le Sénégal et bien d’autres ont répondu présents à cette rencontre. Le discours d’ouverture a été prononcé par le Directeur Général du Travail et de la Sécurité sociale, Karim Cissé. Il a souligné que cette rencontre vise à aborder les défis et opportunités liés à la migration de main-d'œuvre. « La migration de main-d'œuvre est une réalité historique et humaine qui, bien gérée, peut contribuer au développement économique et social de la sous-région. Cependant, mal encadrée, elle peut entraîner des tensions sociales et des violations des droits des travailleurs migrants », rappelle-t-il.
Il a également mis l’accent sur l’importance des migrations internes au sein de la CEDEAO. « Il est estimé que 90 % des 8,4 millions de migrants en Afrique de l’Ouest proviennent des pays membres de la CEDEAO. Cette forte mobilité est liée en grande partie à l’activité économique, notamment dans les secteurs agricole et informel », dit-il.
Toutefois, poursuit-il, « un défi de taille persiste : l'absence de données fiables et harmonisées pour une gestion efficace de ces migrations. Les données existantes sont souvent fragmentées, difficiles à comparer d'un pays à l'autre, ce qui complique l'élaboration de politiques adaptées. Cette rencontre des experts vise donc à combler ces lacunes en présentant des outils et des solutions pour améliorer la collecte et l'analyse des données migratoires. »
Dans le même sillon, le chef de la division des Affaires sociales à la Commission de la CEDEAO et chef de mission à Dakar, Alves Jorge Dalmada, a indiqué que cette réunion est également axée sur la validation de plusieurs instruments de gouvernance régionale, y compris un outil clé pour l'harmonisation du rapport sur la migration du travail. « Il y a beaucoup de problèmes qu'on est venu régler compte tenu de l'intégration régionale pour faire la promotion de la migration du travail. Nous allons faire le tour d'harmonisation sur le rapport régional dans notre région », dit-il.
Le chef de mission à Dakar souligne que la CEDEAO souhaite harmoniser les politiques migratoires entre ses États membres, notamment face à des défis comme la xénophobie et la discrimination. Selon lui, ces questions freinent l'intégration régionale et la mobilité professionnelle, d'où la nécessité d'un cadre réglementaire mieux coordonné. Il revient par ailleurs sur l'importance cruciale des statistiques. « Comme vous le savez, les statistiques sont les parents pauvres de l'instrument dans notre région, parce que les gens pensent que cela prend beaucoup d'argent. Donc, quand il existe des statistiques, elles sont souvent négligées en raison des coûts élevés associés à leur collecte et à leur maintenance. »
Un outil de rapport sur la migration de main-d’œuvre développé
Selon le commissaire au développement humain et affaires sociales de la CEDEAO, Fatou Sow Sarr, « le rapport sur les lacunes en matière de données sur la migration de main-d'œuvre en Afrique de l'Ouest montre un progrès. Cependant, il existe encore des obstacles majeurs tels que la fragmentation des données, le manque de fonds, les capacités limitées et l'incohérence des informations », précise-t-elle. Ainsi, en réponse, un outil de rapport sur la migration de main-d'œuvre a été créé, avec des indicateurs couvrant divers aspects pour mieux comprendre les tendances et impacts de la migration.
Elle cite les suivants : « Le volume et les flux de migrants, qui illustrent et nous aident à comprendre le nombre de personnes qui se déplacent dans la région, leurs pays d'origine et de destination, et les modèles de ces mouvements, sont essentiels. Ces données aident à identifier les couloirs de migration et à planifier les besoins des communautés d'origine et d'accueil des migrants. D’abord, le taux d'emploi et de chômage, un indicateur qui aide à suivre la situation d'emploi des migrants, ce qui est essentiel. Il nous permet d'évaluer si les migrants trouvent un emploi rémunérateur et contribuent à l'économie ou s'ils sont confrontés à des défis tels que le sous-emploi ou le chômage. Ensuite, les compétences et qualifications, qui montrent que le niveau de compétences et de qualifications des migrants est un indicateur clé et met en évidence la contribution potentielle qu'ils peuvent apporter aux économies de leurs pays d’accueil. »
À cela s’ajoute « les envois de fonds, le volume des envois de fonds des migrants, qui est un indicateur économique crucial reflétant la contribution financière des migrants à leur pays d'origine et soulignant l'importance de faciliter des voies sûres et rentables pour ces transferts. » La protection sociale et le bien-être sont des indicateurs liés à l'accès à la sécurité sociale, à la protection sociale, aux soins de santé et aux services de bien-être pour les migrants. Sans oublier la désagrégation par sexe, « cet indicateur nous aide à comprendre les dimensions de genre de la migration. Il est donc essentiel de s'assurer que les politiques sont inclusives et répondent aux besoins spécifiques des migrants masculins et féminins », a-t-elle conclu.
Des objectifs clés énoncés
La réunion des experts de la CEDEAO a des travaux centrés sur quatre grands objectifs. Le représentant du ministre, Karim Cissé, les a déclinés. Comme premier objectif, il est question de : « Présenter et valider l’outil régional de rapportage sur la migration de main-d’œuvre développé pour améliorer les systèmes de collecte et d’analyse des données. » Cet outil constituera une avancée majeure dans l’harmonisation des processus de collecte de données entre nos pays et permettra de mieux comprendre les tendances migratoires et leurs impacts économiques. Ensuite, vient la validation d’un outil régional de rapportage. Il a été indiqué pour cet objectif : « d’examiner et de valider les termes de référence des points focaux de la CEDEAO pour la migration de main-d’œuvre, qui joueront un rôle central dans l’opérationnalisation de cet instrument. Ces points focaux seront les relais nationaux chargés de faciliter la coordination entre les États membres et d’assurer une utilisation efficace et harmonisée de l’outil. »
Mais aussi « d’examiner les termes de référence des points focaux nationaux qui joueront un rôle clé dans l'opérationnalisation de cet outil, facilitant ainsi la coordination entre les États membres. Et pour finir, « établir une feuille de route pour l’opérationnalisation complète de cet outil et sa mise en œuvre dans l'ensemble de la sous-région, en lien avec la politique migratoire régionale 2018-2028 de la CEDEAO », a décliné M. Karim Cissé.
Ainsi, pour clore son discours, Karim Cissé a insisté sur l'importance de cette réunion pour améliorer la gestion des migrations de main-d'œuvre en Afrique de l’Ouest. « Je ne doute pas que vos contributions seront essentielles pour garantir que les outils que nous mettrons en place répondront aux besoins de nos pays et permettront une gestion plus efficace et plus humaine... »