Entre rébellion et incivisme
Pendant qu’Aftu se défausse sur les clients qui forcent le passage de leurs bus, Dakar Dem Dikk se veut un modèle dans le respect des nouvelles restrictions. Pour les ‘’Ndiaga Ndiaye’’ et les ‘’cars rapides’’, c’est surtout la continuité, hormis l’incivisme des clients qui ne respectent pas le port obligatoire du masque.
‘’Aujourd’hui, j’ai dû arrêter le chauffeur pour faire descendre certains passagers qui ont usé de force pour entrer dans le véhicule. Nous, nous respectons les 40 passagers exigés par le ministre’’, raconte Matar, receveur de la ligne 2 (Aftu) assis au garage Petersen près du véhicule. A quelques jets, se trouve le receveur de la ligne 32. Lui aussi tente de veiller scrupuleusement au respect de la mesure. Il explique : ‘’Depuis ce matin, j’essaie de respecter le nombre de 40 passagers qui doit être admis dans ce bus. Je regarde si les places assises sont occupées, ensuite, je compte si ceux qui sont debout ne dépassent pas 10.’’
Si ces deux jeunes hommes parviennent à faire respecter la limitation de places exigée par l’Etat, d’autres, par contre, semblent ne pas avoir été informés. Dans ce minibus de marque Tata, toutes les places assises étaient occupées depuis son départ à Petersen. Mais à chaque arrêt, d’autres passagers montent sans restriction. Ici, impossible de se frayer un passage. Les uns sont collés aux autres, comme si la mesure de limitation n’a jamais eu lieu. Bien installé dans son guichet, le receveur ne cesse, cependant, de rappeler aux clients leur obligation de bien mettre le masque, mais certains récalcitrants font fi de cette recommandation, en ne montrant aucun bout de tissu, pendant que d’autres font de leur masque un ‘’cache-menton’’.
Pour ce premier jour de l’entrée en vigueur de ces décisions du ministre des Transports terrestres, c’est le calvaire pour certains chauffeurs. Régulateur au garage Lat Dior, Ibrahima Mballo témoigne : ‘’La limitation à 40 du nombre de personnes admises dans les véhicules nous fatigue vraiment. On aurait dû seulement autoriser les places assises. Ce matin, il est arrivé que des clients fassent du forcing pour entrer dans le véhicule. Parfois, il est difficile de les en empêcher.’’ Un point de vue partagé par ce chauffeur de la ligne 34 qui raconte son vécu lors du premier jour d’entrée en vigueur des nouvelles restrictions : ‘’Une dame m’a supplié en pleurant pour que je la laisse entrer dans le véhicule. Le bus était plein, mais je l’ai finalement laissé s’asseoir à mes côtés, même si je conduisais difficilement.’’
En outre, les pensionnaires des bus Aftu regrettent les heures de couvre-feu qui ne manqueront pas d’impacter sur leurs revenus. Il est 16 h à Lat Dior. De nombreux véhicules attendent encore leur tour. ‘’Beaucoup ne partiront pas’’, constatent nos interlocuteurs pour le regretter.
Dakar Dem Dikk se plie aux règles
Pendant que les bus Aftu peinent à s’adapter aux nouvelles mesures, les habitués de DDD, eux, pensent qu’il y aura moins de difficultés dans ces moyens de transport public. Trouvée à l’arrêt bus El Malick à Sandaga en train d’attendre le bus qui doit la conduire aux Parcelles-Assainies, Aliah, une jeune femme, projette, de temps à autre, son regard pour guetter leur arrivée. D’après elle, ces bus ont toujours respecté les mesures barrières. ‘’’Dans les bus DDD, chauffeurs comme receveurs exigent aux clients le port du masque. En ce qui concerne le nombre de places, je sens qu’il y a moins de personnes dans les véhicules aujourd’hui’’, soutient-elle.
A côté d’elle, un autre passager est assis, les yeux rivés sur l’écran de son téléphone. A la question si les bus DDD respectent les mesures édictées par l’arrêté du ministre, Mamadou Aliou Barry abonde dans le même sens qu’Aliah. ‘’Dans les bus Dakar Dem Dikk, informe-t-il, les mesures sont respectées. Ce sont les receveurs qui exigent le port du masque. Et ce matin, j’ai aussi constaté que le nombre de passagers a diminué’’.
Les véhicules ‘’Ndiaga Ndiaye’’ et les ‘’cars rapides’’, des cas particuliers
Au garage Lat Dior où stationnent ces deux types de car, les chauffeurs ne voient pas un grand changement avec l’instauration de ces mesures. Aly est chauffeur de ‘’car rapide’’. Assis sur une brique et suivant minutieusement des mécaniciens qui entretiennent son véhicule, le chauffeur, comme ses pairs, ne se sent pas trop concerné. Il souligne : ‘’Rien n’a changé chez nous. On a juste interdit les places debout et ces places ont toujours été interdites. Chez nous, il n’y a que les places assises qui sont 23 au maximum. D’ailleurs, nos apprentis ont l’habitude d’interdire que les gens se mettent debout, parce que les policiers ont l’habitude de nous tracasser à cause de ça.’’
Dans les moyens de transport communément appelés ‘’Ndiaga Ndiaye’’, le constat est identique. Dans ces deux derniers cas, ce qui pose le plus problème, c’est le respect du port obligatoire du masque. Le chauffeur de ‘’car rapide’’ indexe l’indiscipline des clients. ‘’Beaucoup entrent dans le car avec le masque, mais ils le mettent au menton’’.
Un tour sur l’avenue Cheikh Anta Diop permet d’en avoir le cœur net. Dans ce véhicule ‘’Ndiaga Ndiaye’’, ceux qui ont mis convenablement leur masque se comptent sur les doigts d’une main. Quand certains l’ont au menton, d’autres le tiennent à la main, tandis que certains passagers n’en possèdent même pas.
IBRAHIMA MINTHE (STAGIAIRE)