Publié le 22 Jul 2024 - 11:15
TRAGÉDIE DE BOFFA BAYOTTE

Le procès en appel s’ouvre mercredi à Ziguinchor

 

Condamnés le 13 juin 2022 à la réclusion criminelle à perpétuité par la Chambre criminelle du tribunal de grande instance (TGI) de Ziguinchor, dans le cadre de la tragédie dite de Boffa Bayotte qui a fait 14 morts  et sept  blessés le 6 janvier 2018,  René Capain Bassène et Omar Ampoy Bodian feront face aux juges, le mercredi 24 juillet 2024. C’est un procès en appel à la Cour d’appel de Ziguinchor.

 

Mieux vaut tard que jamais ! Après deux ans de longue attente, de combats contre le stress, de  désespoir, d’isolement et de solitude, le journaliste René Capain Bassène et l’agent de poste Omar Ampoy Bodian vont, enfin, se présenter, le mercredi 24 juillet, à la barre de la Cour d’appel de Ziguinchor, après le procès ‘’inédit’’, en première instance,  ouvert  le 17 mars 2022, qui  a vu défiler à la barre de  la Chambre criminelle du TGI  de la capitale méridionale du pays, 29 avocats, dont quatre de la partie civile,  37  témoins et 16 accusés sur  25 détenus. Dix parmi eux avaient  bénéficié d’un non-lieu. Un autre avait obtenu  une liberté provisoire et s’est présenté le jour du procès. Certains étaient poursuivis pour  association de malfaiteurs, participation à un mouvement insurrectionnel, assassinat, tentative d’assassinat, séquestration ayant entrainé la mort, vol en réunion avec usage d’arme et de violence.  Les mêmes charges pesaient  sur le chef de guerre César Atoute Badiate, le chef du front Sud du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC) cité dans cette affaire. Il avait même fait l’objet d’un mandat d’arrêt international. Jugé par contumace, il a été condamné, le 13 juin 2022, au même titre que René Capain Bassène et Omar Ampoy Bodian à la réclusion criminelle à perpétuité. D’autres avaient  été poursuivis pour détention illégale d’arme de la première catégorie, complicité d’assassinat, complicité de tentative d’assassinat et complicité de séquestration ayant entrainé la mort, complicité de vol en réunion avec usage d’arme. Onze ont été acquittés et deux  ont bénéficié d’un  sursis.

Depuis, le procès en appel interjeté par la défense incarnée par Me Clédor Ciré Ly a plus que tardé à recevoir un écho favorable au niveau de la Cour d’appel de Ziguinchor. Loin des lenteurs et procédures judiciaires,  le retard accusé dans la tenue du procès en appel était lié à un problème d’effectif  au niveau de la cour d’appel.

Selon des sources concordantes, la plupart des juges qui y siègent avaient  connu cette affaire lors de l’instruction. L’ex-ministre de la Justice et  garde des Sceaux, Aïssata Tall Sall, avait même  été saisie de la question. Elle avait promis, selon toujours nos informations, de renforcer l’équipe des juges en place.

Retour sur le film de l’horreur

Pour rappel, le samedi 6 janvier 2018, un groupe d’une vingtaine de coupeurs de bois a été pris à partie par des assaillants armés, dans la forêt de Bayotte Est. Une attaque qui a fait 14 morts et sept blessés. Trois personnes avaient réussi à s’en sortir indemnes.  

À l’annonce de la nouvelle, la légion de gendarmerie Sud s’est déployée  dans la zone de l’incident, en même temps que les sapeurs-pompiers. Une enquête a été ouverte. Des premières auditions des témoins et constatations sur les décédés, il en  est ressorti que les victimes sont tombées dans une embuscade tendue depuis les premières heures de la matinée du 6 janvier 2018. Elles ont été ainsi regroupées, couchées par terre et sauvagement exécutées. L’identification des victimes par les gendarmes a permis d’établir le bilan cité supra. Tous les blessés en mesure d’être entendus ont été auditionnés, de même que les parents des victimes décédées. Vu la gravité et la sensibilité des faits, le Haut-Commandement de la gendarmerie nationale va  déployer la Section de recherches de Dakar pour appuyer les enquêteurs de la Légion sud. Un médecin légiste a été requis à l’hôpital Le Dantec de Dakar pour procéder à l’autopsie des corps. Le résultat a permis de ‘’déterminer formellement’’ les causes de la mort, les conditions dans lesquelles les victimes ont été exécutées, le calibre et le type d’arme utilisé. Les investigations menées ont permis l’interpellation de 22 personnes, toutes de nationalité sénégalaise. L’opération a été menée sous la houlette de la légion de gendarmerie Sud par la Section de recherches appuyée par le Groupement d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) et la Légion de gendarmerie d’intervention (LGI) déployés à Ziguinchor. Les unités de l’armée nationale, en manœuvre dans la zone, ont  aussi soutenu le bon déroulement de l’opération. ‘’Les premières auditions réalisées et les données techniques recueillies ont donné une tournure décisive à l’enquête (…) L’attaque du 6 janvier a été planifiée et exécutée par une personne dont nous tairons le nom’’, avait révélé le procureur de la République du tribunal de Ziguinchor. Il s’exprimait, le 25 janvier 2018, lors d’un point de presse conjoint avec le lieutenant-colonel Issa Diack, le chef de la Section de recherches de la gendarmerie nationale, pour faire le point sur l’enquête et les actions judiciaires qui en ont découlé.

‘’La synthèse des informations recueillies par la Section de recherches, avait-il soutenu, a vite mené vers des pistes qui convergent toutes vers des personnes d’une localité (Toubacouta) et vers le cantonnement d’une faction’’.

Poursuivant, il souligne que  ‘’l’enquête a permis d’identifier et de garder à vue celui qui aurait planifié toute l’opération (René Capain Bassène sans le citer) et 15 autres personnes supposées avoir pris une part active dans les faits (massacre de 14 personnes).  Il avait  annoncé, par la suite, l’ouverture d’une information judiciaire et la saisine du dossier par un juge d’instruction sur la base de plusieurs chefs d’inculpation.  Il s’agit d’association de malfaiteurs, participation à un mouvement insurrectionnel, assassinat, tentative d’assassinat, détention d’arme sans autorisation administrative, coups et blessures volontaires et vol en réunion.

Procès de la ‘’géolocalisation’’

Tout au long du  procès qui a été rendu possible grâce à une ‘’logistique extraordinaire’’ et qui a enregistré une forte présence des forces de défense et de sécurité (FDS), la gendarmerie notamment, tous les accusés ont choisi la dénégation comme ligne de défense.

Ils ont, outre les procès-verbaux de l’enquête préliminaire et les déclarations devant le juge d’instruction, balayé d’un revers de main l’ordonnance de renvoi du juge d’instruction. Ordonnance dans laquelle le journaliste René Capain Bassène était ‘’mouillé jusqu’au cou’’. Cette ordonnance de mise en accusation se fondait sur les mails, courriels, appels téléphoniques, communiqués, réunions à Toubacouta, rencontre avec César Atoute Badiate relative à cette affaire et témoignage des coaccusés. Elle s’adossait également sur les informations fournies par la Sonatel, dans le cadre de la géolocalisation des inculpés, la veille et le jour du massacre. Cette géolocalisation a été la ‘’préoccupation’’ centrale de la défense qui en avait même fait une ‘’exigence’’ et  de la partie civile. Elle a fait l’objet d’un débat nourri et houleux à l’ouverture du procès que Me Ciré Clédor Ly avait qualifié de celui de la ‘’géolocalisation’’ des ‘’intrusions du système informatique’’, des ‘’alibis’’ et du ‘’MFDC’’.

Autant d’ingrédients qui peuvent resurgir  lors du procès en appel qui s’ouvre le 24 juillet à Ziguinchor.

 

L’appel de la diaspora casamançaise

 

‘’À l’approche de l’audience sur la tuerie de Bofa-Bayotte prévue le 24 juillet 2024 à Ziguinchor, la diaspora casamançaise des Amériques et d’Europe (Casa Diaspora) souhaite réaffirmer son engagement en faveur d’une justice transparente et équitable. Ce procès représente une opportunité cruciale pour la justice sénégalaise de montrer son indépendance et son impartialité en délivrant un verdict basé sur des preuves concrètes et tangibles. Le massacre de Bofa-Bayotte, tragédie qui a secoué la région de la Casamance naturelle, nécessite une enquête rigoureuse pour établir les responsabilités de manière claire et impartiale. Les précédentes audiences ont laissé place à des doutes quant à l'équité du processus

judiciaire, notamment concernant la condamnation à perpétuité de René Capain Bassène, César Atoute Badiate et Ampoi Bodian sans des preuves suffisantes. Nous demandons que toutes les preuves présentées soient concrètes et vérifiables. Il est essentiel que la justice sénégalaise base ses verdicts sur des éléments factuels, éliminant ainsi tout doute quant à  l’impartialité du procès. La diaspora casamançaise insiste sur le respect des articles de la Déclaration universelle des Droits de l'homme, notamment l'article 10, garantissant à toute personne le droit à un procès équitable et public. Nous appelons à une stricte séparation des pouvoirs pour garantir que la justice ne soit pas influencée par des considérations politiques. Le procès doit se dérouler de manière transparente, équitable, sans pression ni ingérence externe et offrir ainsi aux familles des victimes de cet acte répréhensible la justice qu'elles attendent. Les vrais coupables doivent être retrouvés et punis, les innocents rétablis dans leur droit et dédommagés. En raison des précédentes irrégularités, nous espérons qu’une nouvelle enquête indépendante a été menée par des organismes impartiaux, pour s’assurer que tous les aspects de l’affaire sont correctement examinés. Nous sollicitons également l'attention de la communauté internationale, en particulier la Commission africaine des Droits de l'homme et des peuples et la Commission des Droits de l'homme de l'Organisation des Nations Unies pour surveiller de près ce procès et garantir que les droits fondamentaux des accusés soient respectés. La diaspora casamançaise (Casa Diaspora) des Amériques et d’Europe reste vigilante et déterminée à  veiller à ce que la justice soit rendue de manière équitable et transparente. Nous croyons fermement que seule une justice impartiale peut ramener la paix durable en Casamance’’.

 

HUBERT SAGNA (ZIGUINCHOR)

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