Publié le 26 Jul 2025 - 19:42
AN 5 DÉCÈS BABACAR TOURÉ

La presse orpheline de BT

 

26 juillet 2020 - 26 juillet 2025. Voilà cinq ans que Babacar Touré nous a quittés, laissant derrière lui une presse orpheline. 

 

L’ange gardien ! Ainsi titrait ‘’EnQuête’’ au lendemain de la disparition de Babacar Touré, le 26 juillet 2020, en pleine pandémie de Covid-19. Votre journal venait ainsi de perdre un père bienveillant, un fervent défenseur, quelqu’un qui aura joué un rôle déterminant aussi bien dans la naissance du journal en 2011 que dans son évolution. Cinq ans après, nous pleurons encore notre inspirateur.

Co-fondateur du journal, Mahmoudou Wane témoigne :  “Babacar Touré nous a toujours accompagné, non seulement pour les conseils, mais aussi sur le plan financier. Il a même eu à nous aider à payer nos salaires. C’est vous dire combien il était généreux et bienveillant à notre égard.”

Cette générosité et cette bienveillance, BT l’a développée toute sa vie, aux côtés de ses amis et proches. Les témoignages sont unanimes. Mamadou Koumé, ancien président de l’ANPS, se rappelle quand, quatre semaines avant son décès, il avalait des centaines de kilomètres pour aller lui présenter ses condoléances à Louga, à la suite de la disparition de sa mère.

Issu de la même promotion (7e promo Cesti), M. Koumé d’ajouter : “Je garde de lui ses qualités humaines, notamment sa fidélité en amitié et son sens profond de la générosité. Je sais qu’il partageait et secourait dans la discrétion beaucoup de personnes.”

Naissance de Sud 

BT, c’est surtout Sud. Quand on parle de ce groupe, tous les esprits se tournent, en effet, vers lui en premier, même s’il l’avait mis en place avec d’autres grands noms de la presse, ses amis de tous les jours, dont Abdoulaye Ndiaga Sylla, Sidy Gaye, Ibrahima Fall, Ibrahima Bakhoum, Abdou Latif Coulibaly…

Non seulement il a eu l’idée, mais on lui doit aussi le nom, selon le doyen Ibrahima Bakhoum. L’objectif, dès le départ, était d’œuvrer au renforcement de la démocratie et de la liberté d’expression au-delà des frontières sénégalaises. 

Issu de la 6e promotion du Cesti, M. Bakhoum témoigne : “Sud a beaucoup aidé certains opposants des autres pays africains sur le plan de la communication. Parce que Babacar avait beaucoup d’amis chez les opposants africains.” 

L’aventure, rappelle Bakhoum, avait démarré avec “Sud magazine”, en février 1986 ; puis est venu “Sud Hebdo” qui va finalement disparaitre pour céder la place à “Sud quotidien”. “C’était en 1993, à la veille des élections. Comme c’était encore ‘Sud Hebdo’, on avait décidé de sortir quatre feuillets tous les jours pour les besoins des élections. Nous l’avions dénommé ‘Sud au quotidien’. Le succès était tellement retentissant que nous avons décidé de le maintenir. C’est devenu “Sud quotidien”. 

Babacar le capitaine 

Depuis, le journal s’est imposé dans le paysage médiatique sénégalais et africain. Babacar, cité comme pionnier de cette presse privée indépendante. Pour Mamadou Koumé, il y avait une équipe formidable qui a réussi à bâtir une des entreprises de presse les plus abouties. “’Sud’ était comme une équipe sportive.  Mais avec un capitaine nommé Babacar Touré qui était un personnage charismatique, qui savait mobiliser la rédaction et qui avait de l'entregent.  Il avait des relations à l'étranger, dans le milieu des affaires et au plus haut niveau du pouvoir politique. Tout cela, il l'avait construit patiemment et savamment”, témoigne Koumé qui se rappelle les contenus de haute facture produits par des journalistes de renom venus de divers horizons. “L'hebdomadaire, confie-t-il, avait déjà imprimé la marque de ce que deviendra le quotidien qui publiait des enquêtes, des dossiers et des reportages de grande qualité.  Avec un ton incisif reflétant la réalité des faits”.

De l’avis de M. Koumé, ceci était loin d’être évident, compte tenu du contexte de l’époque, mais Sud a su faire face et s’imposer dans un paysage complexe. Le doyen Bakhoum de revenir sur les heures de gloire du premier groupe de presse privé. Il est arrivé que le journal soit tiré à 60 000 exemplaires. Il faut aussi dire que c’était un contexte bouillant avec Wade qui cristallisait toutes les attentions et qui faisait beaucoup vendre”, souligne M. Bakhoum. 

Le rôle dans la longue marche vers l’alternance 

Les témoignages sont unanimes. Le groupe, conduit par son leader, a joué un rôle essentiel dans la construction de la démocratie. Dès le départ, souligne M. Koumé, le journal avait fait le pari de refléter le débat public. Il avait pris l’option “de dénoncer les travers de la vie politique et d'offrir une tribune à ceux qui n'avaient pas accès aux médias d'État et à la RTS. Les journalistes avaient déjà une renommée qui faisait  qu'ils étaient lus, scrutés et même attendus par un public qu'ils s'étaient rapidement constitué au fil des parutions”. 

Ses relations avec les pouvoirs n’ont pas toujours été faciles. Mais grâce aux rapports de BT et à son entregent, le journal a su surmonter toutes les épreuves. Un tel groupe, selon nos interlocuteurs, ne doit pas disparaitre.  Mamadou Koumé : “Sud ne doit pas disparaitre.  Sa contribution à la consolidation de la démocratie et de la liberté de presse est inestimable.  Le plus bel hommage qu'on peut rendre à Babacar Touré, à Ibrahima Fall, à Chérif El Valid Sèye et de nombreux autres journalistes qui ne sont plus de ce monde est de maintenir haut le flambeau. Nous devons tous nous mobiliser pour la pérennité du titre”, a plaidé le doyen Koumé, qui invite également les acteurs à revoir le “modèle économique de la presse”.  

Mor AMAR

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