Les élus exigent plus de transparence dans l’aide aux familles vulnérables
Le budget du ministère du Développement communautaire, de l’Equité sociale et territoriale s’élève à 101 504 105 410 F CFA pour l’année 2021. Plusieurs chantiers dont la refonte du Registre national unique attendent son nouveau responsable. Mais, selon les députés, l’homme est à la place qu’il faut, car ayant fait ses preuves au ministère de l’Elevage.
L’accès à l’eau potable et à l’électricité, combiné à l’enclavement de bon nombre de localités, constitue l’un des principaux obstacles au développement communautaire. Hier, la quarantaine de députés intervenant à l’occasion du vote du budget de la tutelle a insisté sur la nécessité d’un élargissement des programmes communautaires pour venir à bout de ces problématiques. Si les élus n’ont pas tari d’éloges à l’endroit du ministre Samba Ndiobène Ka, les plaintes ont toutefois tourné autour du redimensionnement du réseau hydraulique de la commune de Madina Wazina et du désenclavement de plusieurs localités dont le Walo et le département de Mbacké, où des femmes en travail souffrent le martyre, en raison de pénibles évacuations.
En outre, les produits vivriers de la zone, selon l’honorable Fatim Diop, peinent encore à être écoulés.
‘’Le Sénégal est indivisible, mais dans beaucoup de régions et de localités, il y a une concentration de projets de développement, tandis que d’autres sont laissés en rade. Il faut en tenir compte dans vos projets, parce que c’est un ensemble. Aujourd’hui, les infirmiers qui sont affectés dans ces localités partent parce qu’ils n’ont pas accès à l’eau ou parce que leurs villages sont enclavés. Les jeunes viennent en ville, parce leur village est enclavé et ils n’ont donc pas d’opportunités. C’est pour toutes ces raisons que je n’ai pas compris les critères de choix dans la seconde phase du PUDC (NDLR : Programme d’urgence de développement communautaire). Il faut que les régions de Tambacounda, Kédougou et particulièrement le département Goudiry soient pris en compte, je voudrais que vous pensiez à ces localités. Il y a des efforts à faire dans le cadre du PUDC, mais votre arrivée à la tête de ce ministère suscite en nous beaucoup d’espoir’’, renchérit le président du conseil départemental de Goudiry, Djimo Souaré.
Son collègue Mamadou Diaw ajoute qu’à Matam, ‘’les travaux du forage sont à l’arrêt ; les enseignants ne veulent plus y aller. Il y a des jours où les écoles sont fermées, parce qu’il n’y a pas d’eau. Cette doléance est vieille de trois ans. Promovilles (NDLR : Programme de modernisation des villes) est un excellent projet, mais on ne peut pas le confier à des entreprises sénégalaises qui bâclent le travail. Nous ne sommes pas du tout satisfaits du Promovilles’’.
RNU, BSF, CMU : les députés dénoncent plusieurs irrégularités
Par ailleurs, les défaillances du Registre national unique (RNU) et du système des bourses de sécurité familiale (BSF) n’ont pas échappé à l’analyse des élus locaux. A l’unanimité, ils exigent la révision d’un RNU rempli d’irrégularités. Cela, tout en demandant le remboursement effectif des dettes de l’Etat quant à la Couverture maladie universelle (CMU). De l’avis des députées Mame Diarra Fall, Awa Guèye et Fatim Diop, il faut passer à ‘’une refonte totale de ce registre’’. ‘’Ce registre est source de problèmes et il fait fi de la vision du chef de l’Etat, à savoir aider les populations vulnérables. Il est temps de penser à la refonte de ce registre. Il ne doit pas y avoir un quota politique. C’est un registre conçu, qui appartient aux populations et non à des politiciens. Aujourd’hui, on voit des familles entières qui bénéficient des bourses de sécurité familiale, de même que de jeunes fonctionnaires. Ce n’est pas normal. Il faudrait revoir la BSF. Aussi, de fausses informations sont souvent inscrites dans les cartes d’égalité des chances. A mon avis, il est important de prendre en compte les relais communautaires, dans le cadre de la CMU. Les politiques sociales sont très bonnes, mais dans l’application, il y a beaucoup de problèmes’’, soutient Juliette Zenga.
Et le président de l’Association des maires de Linguère, Yoro Sow, d’ajouter : ‘’On a constaté beaucoup de doublons et de fausses adresses au niveau des bourses de sécurité familiale. Il y a également beaucoup d’omissions. Nous avons vu les efforts que vous avez faits, dans le cadre du remboursement, mais les mutuelles sollicitent davantage d’appui financier, car ce sont de jeunes structures qui ont besoin d’être soutenues.’’
Un avis partagé par les non-alignés. ‘’J’ai été membre du comité de suivi quant à la distribution de l’aide alimentaire partout dans le Sénégal, mais on a remarqué que le RNU est dépassé. Monsieur le Ministre, le cas de l’Amérique, en cette période de Covid-19, montre bien que les faibles sont les plus exposés en cas de maladie. Donc, on insiste sur la CMU, car celui qui a les moyens ne craint rien, s’il tombe malade. C’est tout le contraire pour celui qui n’a pas les moyens’’, a déclaré le député Issa Sall.
La représentante du Walo demande, pour sa part, l’état des lieux du plan de résilience lancé par le Sénégal, face à la pandémie. Pour Marie Sow Ndiaye, un cash transfert est beaucoup plus pratique. ‘’Cela va permettre à chaque chef de famille de subvenir à ses besoins sans se déplacer. A-t-on vraiment besoin de faire le rang pour récupérer des vivres de première nécessité ? C’est bien d’aider, mais la manière laisse à désirer et je pense que le système de bourses familiales va jusqu’à bafouer la dignité humaine. Est-ce qu’il n’est pas temps de chercher à capaciter les bénéficiaires après un ou deux ans, afin qu’ils deviennent autonomes et n’aient plus besoin de la bourse ? Aujourd’hui, plusieurs hôpitaux refusent la CMU, cela pose problème’’.
A en croire les élus, le ministère du Développement communautaire devrait se préparer à faire face à une deuxième vague, en ce qui concerne la pandémie de Covid-19, en soutenant une fois de plus les populations vulnérables. Pour certains, il urge de repenser le cahier des charges de la CMU et de l’envisager sous forme d’une épargne à crédit. Ainsi, les bénéfices sur les crédits seront utilisés pour soutenir la prise en charge sanitaire. L’honorable Fatou Sène a, quant à elle, plaidé pour la prise en compte des spécificités des albinos très souvent marginalisés au Sénégal.
EMMANUELLA MARAME FAYE