De quoi se plaignent les libéraux !
Cris d'orfraie, menaces de déballages, mises en scène, victimisation grotesque... La palette de subterfuges à laquelle recourent désespérément les caciques rescapés du Parti démocratique sénégalais (PDS) fait tantôt pleurer, tantôt rigoler. Pour qui connaît l'enfer d'où revient l'écrasante majorité du peuple sénégalais après la chute des Wade, il y a effectivement matière à se poser des questions sur la frénésie médiatique actuelle des libéraux aux prises avec les enquêtes sur des cas supposés d'enrichissement illicite. Au faîte de leur puissance, sous le manteau de supplétifs-complices du système prédateur, ils étaient les derniers à se poser des questions sur le sens d'une gouvernance dont le caractère infâme sautait aux yeux de tous, sauf des leurs. Comme des loups tenaillés par la faim matérielle, ils ont vite fait de se transformer en voleurs destructeurs de biens publics auxquels rien ne pouvait arriver. C'était normal, car comme dans un système mafieux, les bandes et clans du système, sous la supervision du condottiere débonnaire et calculateur là-haut perché, se neutralisaient entre eux, l'essentiel étant de perpétuer le gangstérisme d'Etat érigé en mode politique.
Aujourd'hui, la seule contrainte de manœuvre à laquelle le pouvoir est assujetti dans ces dossiers d'enrichissement illicite, c'est de respecter la présomption d'innocence des dignitaires libéraux concernés. On ne pourra pas accepter que, dans ce Sénégal des 23 juin et 25 mars, une justice politique transforme les dossiers judiciaires en règlements de comptes. Pour le reste, vivement que des têtes tombent, et pas du menu-fretin. Wade et les siens ont fait trop de mal à ce pays pauvre, dans une impunité ahurissante.
Hier seulement, l'un d'entre eux, profitant de sa position de «gérant» d'un plan destiné à sortir les populations des eaux inondées, exigeait froidement des entrepreneurs désireux d'accéder à ce marché de 52 milliards de francs Cfa, un «bonus» de 500 mille francs Cfa par maison construite. Deux autres (pour le moment absents de la liste des sept), avaient fait du Ministère de la Santé un foyer de racket contre les entrepreneurs, dans un système qui leur permit de rafler plusieurs centaines de millions de francs Cfa à leur profit. Les exploits d'un membre de la bande dans le domaine foncier sont, eux, inénarrables alors que pour un autre, les magouilles et astuces pour se remplir les poches à partir d'une Tour d'ivoire virtuelle nichée en haute mer ont écœuré, sans plus.
Des gens qui méritent la prison
Indéboulonnables sur leur planète, les Libéraux semblent avoir tout emporté avec eux. L'argent des mines ? Explosé. Le magot des licences de pêches ? Englouti dans les océans. Les financements présumés de l'agriculture ? Enterrés avec les mauvais engrais. La Sonacos ? Bradée à des amitiés mafieuses. Les ICS ? Mises à genou pour être mieux dépecées. Le foncier ? Partagé entre les clans du gang après avoir été l'un des poumons du blanchiment d'argent sale. L'Anoci ? Transformée en instrument de trafic d'influence pour la capture d'espèces sonnantes et trébuchantes et à propos de laquelle le chef n'a jamais voulu une enquête indépendante... Sans compter cette espèce de demi-dieu qui faisait se courber toutes les échines, dédaigneux et arrogant jusque envers lui-même, sûr de la surpuissance prodiguée par un père égoïste, et qui se voyait naguère à la tête de l'Etat et du pays, se payant même le luxe de se faufiler entre les «grands» du monde pour vendre une image, quelque part dans un de ces endroits paradisiaques de France. L'Etat était leur patrimoine, ils en ont usé comme tel...
Le pouvoir perdu, et sitôt revenus sur la terre ferme, ils se construisent subitement une carapace de victimes alors que, jamais dans l'histoire politique et judiciaire du Sénégal, régime n'a aussi intensément instrumentalisé la justice et le droit que celui d'Abdoulaye Wade. Les chantages à l'absolution judiciaire exercés contre des dignitaires socialistes au lendemain de la victoire de Wade en 2000 ont-ils été inventés ?
Après douze ans de règne, le Parti démocratique sénégalais manque gravement de crédibilité pour être en mesure de s'opposer à des entreprises de transparence publique. Sa chance unique pour que ses principaux dignitaires échappent au couperet de Dame justice réside dans les maladresses et autres calculs du pouvoir. Mais dans le fond, l'Etat du Sénégal, dans ses différents démembrements engagés dans la traque des biens volés, et avec le soutien indispensable de certains partenaires dont les Etats-Unis, est en mesure de présenter aux Sénégalais des éléments probants de délinquance économique et financière, des cas concrets d'enrichissement illicite. Et finalement, des gens qui méritent la prison.
Quoi que disent les libéraux, l'intime conviction populaire est que le régime de Wade a pillé le Sénégal à grande échelle. C'est pour cela que la plupart de nos compatriotes estiment aujourd'hui que de l'issue de cette croisade pour la transparence et la bonne gouvernance, dépend en grande partie l'avenir du pouvoir actuel.
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