Autodidacte à double passion
Formé sur le tas, Cheikh Keita n'a rien à envier aux artistes plasticiens professionnels. Il a tissé sa toile, s'est imposé dans le milieu et force le respect. Calme de nature, timide de prime abord, il se montre sûr de ce qu'il veut. Ce fils de policier n'a du temps que pour sa famille avec laquelle il travaille au sein du groupe Takeifa en tant que guitariste. Il dit compter peu d'amis et est casanier.
S'il y en a qui sont nés pour être artiste, Cheikh Keita en fait partie. Il a quitté l'école en classe de troisième pour se consacrer à l'art. Pourtant, tout est parti d'un pur hasard. Son dessein premier n'était pas de se tourner vers l'art en quittant l'école mais plutôt de soutenir son grand frère dans ses activités. De père policier, le jeune Cheikh passe d'une localité à une autre au gré des mutations de son pater. A l’époque, il vivait à Kolda avec sa famille. Son frère engage alors quelqu’un qui devait les aider au sein de la petite entreprise familiale de menuiserie. L’employé en question avait pour hobby le sablage. Cheikh Keita est attiré par ce que fait l’artiste amateur. ''J’ai commencé à faire du sablage. A un moment, j’occupais tout mon temps avec cela'', confie-t-il. Le père, ayant décelé chez son rejeton un certain amour pour cet art, lui conseille de venir suivre une formation, même informelle, à Dakar. Versatile, cheikh verse dans la peinture en découvrant cet art.
Connu pour ses talents de guitariste au sein du groupe Takeifa, Cheikh Keita n'en est donc pas moins un brillant artiste peintre même s’il est autodidacte. C’est dans les ateliers d’Amadou Dédé Ly qu'il a aiguisé ses armes à la fin des années 1990. Usant d'une technique mixte avec de la peinture acrylique, il travaille le plus souvent avec des couleurs terre. Ainsi, l'orange, le beige et le marron sont ses tons de prédilection. ''Je me sens bien dans cette gamme'', explique-t-il. Cette attirance et cette aisance avec ces couleurs procèdent d'une influence du métier de sablage à ses débuts.
Autodidacte sur toute la ligne
Teint noir, taille moyenne, Cheikh Keita, aîné de la fratrie musicienne Takeifa, n’a rien de singulier physiquement. Mais, il est bien particulier dans l’exercice de son art. ''Ma technique est mixte ; j’ai travaillé pendant longtemps pour marquer ma différence'', dit-il. Cette originalité se sent à la vue de ses tableaux. ''J’utilise les mêmes matériaux que les autres artistes. Mais j’ai ma touche'', insiste l’élève d’Amadou Dédé Ly.
La petite chose qui accroche sur les œuvres de Cheikh Keita ne laisse pas indifférente l’ancienne directrice du Grand Théâtre national, Youma Fall. Au point qu'elle a pris l'initiative d'offrir au peintre et guitariste de 34 ans sa première vraie exposition. ''Youma Fall est venue une fois à Louga dans un restaurant où j’avais exposé quelques-unes des mes œuvres. Elle a demandé l’auteur des tableaux et on m’a appelé. Elle m’a fait part de sa volonté d’exposer mes tableaux à la Biennale off (de Dakar)'', se rappelle-t-il. C’était au début des années 2000. Depuis lors, le deuxième fils de la famille Keita passe d’expo en expo.
Primé dans divers concours internationaux, il ne pense pas encore au grand prix de la Biennale internationale de Dakar. ''Je n’ai jamais déposé d’œuvres pour le concours de la biennale. Ce sont les expositions off qui me charment. Je veux montrer pour l’instant mes œuvres'', soutient-il humblement.
S’illustrant dans deux genres totalement différents, Cheikh Keita mène une vie bien remplie. Entre son atelier et le studio aménagés dans sa demeure à la cité Soprim, à Dakar, Cheikh Keita allie ses deux passions. ''Je suis en studio quand je ne peins pas. Je peins quand je ne suis pas au studio'', schématise celui dont la vie se résume presque au travail. Et sans doute à sa jeune épouse. Cheikh a récemment quitté le cercle des célibataires pour celui des mariés. Il est d’autant plus facile pour Cheikh de se consacrer à sa désormais triple passion qu'il est casanier et se reconnaît peu d’amis. ''Ceux avec qui j’ai grandi ne vivent pas ici. J’ai peu d’amis donc je ne sors presque jamais.''
Médiateur des Takeifa
L'artiste à plusieurs cordes a en outre appris la guitare comme il s'y est pris avec la peinture. ''Quand Jac a commencé à s’intéresser à la musique, mon père a acheté beaucoup de guitares. Alors j’ai commencé d’une manière inconsciente à en jouer'', rapporte Cheikh. En pro, il est aujourd’hui le guitariste incontesté du groupe familial Takeifa, et son médiateur. ''Je suis celui qui tempère. Jac est un peu fou. Je suis l’aîné du groupe donc c’est mon rôle. On a des sensibilités musicales différentes, c’est pourquoi notre musique est aussi colorée'', révèle celui dont la timidité apparente tranche d'avec son explosivité sur scène.
BIGUÉ BOB
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