Publié le 11 Jan 2014 - 19:43
PROFILS DE MEMBRES DE L'OFNAC

 Le Forum civil dénonce un précédent dangereux 

 

La violation des principes d'apolitisme, de neutralité et d'intégrité dans le choix des dix derniers membres de l'Office national contre la fraude et la corruption est un précédent dangereux pour la crédibilité d'une institution essentielle contre la mal gouvernance. 

 

Interrogeant «les critères qui ont été à la base de la nomination des autres membres de l’Office national contre la fraude et la corruption, et leur conformité aux principes conventionnels de Jakarta», le Forum civil dénonce, dans une déclaration rendue publique hier, «la violation du principe conventionnel de l’apolitisme, d’impartialité, de neutralité et d’intégrité de certains membres.»

C'est que, explique le document, «la présence de membres de (la coalition) Macky 2012, de l’Apr et d’un ancien du Pds qui vient à peine de quitter son ancien parti, parmi les membres de l'Ofnac», pourrait prêter à soupçon. De même d'ailleurs que «la nomination d’une personnalité citée dans l’affaire de la drogue au niveau de la police qui n’est pas encore totalement vidée.»

«Risque de neutralisation de suites pénales»

Selon la section nationale de Transparency international, «cet état de fait pourrait favoriser les conditions de neutralisation des suites pénales à donner à des dossiers concernant des membres de la majorité présidentielle et entraîner un traitement discriminatoire des autorités en cause.» Pire même, «il peut constituer un précédent dangereux pour le bon fonctionnement de ladite institution dont les prochaines actions pourraient être qualifiées de partisanes du fait de la forte présence d’un personnel politique lié à la majorité présidentielle actuelle».

Dès lors que «l’Ofnac délibère par vote», le Forum civil redoute que «la saisine du procureur puisse être bloquée par un vote des membres partisans.» En d'autres termes, «les garanties d’indépendance» de l'institution «pourraient être biaisées (si) le personnel reste toujours lié à l’administration.»

C'est pourquoi, le choix qui consisterait à «faire fi de tout ce qui précède peut laisser penser à une volonté de contrôler (l'Ofnac) par une composition qui ne respecte pas toutes les garanties d’intégrité et d’indépendance», avertissent Mouhamadou Mbodj et ses camarades. La conséquence à en redouter est que l'office «pourrait (n'être) (qu')un géant au pied d’argile dès lors que les conditions de son inefficacité sont contenues dans sa gouvernance interne

Ofnac, un faire-valoir ?

Pourtant, la création de cette institution de lutte contre la corruption avait été «ressentie comme une avancée très importante» dans le monde des militants de la bonne gouvernance. Mais le Forum civil déplore les retards accumulés dans le démarrage des missions de la structure.

«La loi portant création de l’Ofnac, si elle a été adoptée par l’Assemblée nationale depuis le 12 décembre 2012, (par contre) la présidente de ladite institution n’a été nommée que le 27 juillet 2013, le vice-président au mois d’octobre 2013 et enfin le reste des membres au début de l’année 2014.»

Plus d'un an pour «pour la mise en place de l’équipe (…) alors qu’un seul décret aurait pu servir à nommer tous les membres depuis les premières heures de création de ladite institution», est un autre regret exprimé par le Forum civil qui y trouve une explication.

Le Chef de l'Etat «(...) semble avoir hésité dans sa volonté initiale de mettre en place une institution investie de vrais pouvoirs d’investigation et d’auto-saisine capable de prévenir et de réprimer toute velléité de corruption», lit-on dans la déclaration.

Or, «à l’heure où notre pays se prépare pour la rencontre du groupe consultatif de Paris (…) la seule préoccupation des autorités gouvernementales devrait être la création des conditions d’efficacité de l’Ofnac.»

Autant d'impairs qui font croire au Forum civil que «le président de la République ne réalisera pas son ambition de placer son magistère sous le sceau de la gouvernance sobre et vertueuse si l’Ofnac devait être perçu comme un moyen de faire valoir».

ASSANE MBAYE

 

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