Publié le 3 Jun 2015 - 20:48
POLITIQUE CINEMATOGRAPHIQUE

Le Sénégal a-t-il appris de ses erreurs ? 

 

Nul ne peut douter de l’existence du cinéma sénégalais, mais nul ne peut affirmer l’existence d’une véritable industrie cinématographique. Et pourtant l’Etat du Sénégal a beaucoup fait pour le développement de son cinéma. Des instruments et structures ont été créés pour porter et accompagner ce secteur. L’on peut citer : la Société Nationale de la Cinématographie (SNC) en 1972, la Société Sénégalaise d’Importation, de Distribution et d’Exploitation Cinématographique (SIDEC) en 1973, le Fonds de Soutien de l’Industrie Cinématographique (FOSIC) en 1978, la Société Nouvelle de Promotion Cinématographique (SNPC) en 1984, la Société d’Importation, de Promotion et d’Exploitation Cinématographique (SIMPEC) en 1991.

Aucune de ces structures n’a pu atteindre les résultats attendus. Selon le cinéaste feu Momar THIAM, de la période allant d’après les indépendances aux années 90, l’Etat a injecté plus d’un milliard de Francs CFA dans le secteur de la cinématographie. Il s’ajoute que le Sénégal dispose de textes législatifs et réglementaires qui régissent le secteur. Il s’agit de la loi 2002-18 du 15 avril 2002. Dans cette loi existent cinq décrets d’application, dont celui du Fonds de Promotion de l’Industrie Cinématographique et Audiovisuelle (FOPICA). Lequel fonds est doté d’un milliard de FCFA par an durant cinq (5) années.

Malgré tous ces efforts, Le pays ne dispose toujours pas d’une véritable industrie cinématographique. En effet, l’Etat n’a jamais investi dans les industries techniques et la formation. Auparavant les cinéastes se formaient dans le tas, mais aujourd’hui, avec l’évolution de la technologie et l’avènement du numérique, la formation est un des piliers d’une industrie, de surcroit, de qualité. Rien ne peut remplacer une formation académique avec un cursus de deux à cinq ans sur les différents métiers du cinéma. 2 Pourquoi l’Etat peine t-il toujours à mettre sur pied un Institut de formation aux métiers de l’audiovisuel et du cinéma ? N’est-il pas une poursuite du vent de vouloir développer et faire rayonner son cinéma sans la formation ? Le Sénégal ne dispose pas non plus d’un laboratoire de postproduction numérique et d’un auditorium.

Et on se demande comment une partie de l’argent distribuée dans la première session du FOPICA va être récupérée ? D’autant plus qu’il n’existe ni de salles de cinéma adéquates qui attirent des foules, ni de dispositions qui forcent les télévisions à faire du préachat, d’achat de contenus auprès des producteurs sénégalais. La télévision est un partenaire sans commune mesure de toute industrie cinématographique. Le véritable problème de ce secteur est que le Sénégal n’a toujours pas posé les fondements, les bases, les piliers d’une industrie cinématographique. Le FOPICA peut bien servir à cela. Le milliard de la session 2015 peut bel et bien servir à créer un institut de formation. Les deux milliards de la session 2016 et 2017 devraient être destinés à la mise en place d’un laboratoire de postproduction numérique et d’un auditorium. Et le dernier milliard de 2018 pourra revenir à la production.

Un dernier pilier est fondamental, il nécessite une volonté politique soutenue et notoire. Il s’agit de l’autonomie du cinéma avec la création d’un Centre National du Cinéma et de l’audiovisuel. Ce dernier sera rattaché au Ministère de la Culture avec une autonomie financière et un conseil d’administration où il y aura les représentants des professionnels ainsi que le ministère de l’économie et des finances, la primature etc. L’idée selon laquelle, l’Etat ne doit plus aider la culture est révolue. Les peuples qui ne se battront pas pour faire voir leur image seront dans les méandres de l’oubli.

L’enjeu de l’image est identitaire, culturel et économique, le rôle de l’Etat n’est pas un des moindres. Il est à saluer la décision de l’Etat d’alimenter le FOPICA. Ce dernier doit valser avec le Plan Sénégal Emergent (PSE). Des générations entières passeront dans l’institut de formation aux métiers de l’audiovisuel et du cinéma et des centaines de films seront post-produits par an dans le laboratoire et l’auditorium. Ainsi avec l’obligation d’achat et de diffusion de produits locaux, les chaines de télévisions participeront à une meilleure connaissance et compréhension de nos cinéastes, car un pays émergent qui ne regarde que les images d’ailleurs est utopique et chimérique.

Thierno Diagne BA Animateur Culturel 

 

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