Lamentable !
Véhicules, tableaux, chaises... Et pourquoi pas cuillères, torchons, serviettes... Et encore moutons, chèvres, paons... Pour la première fois peut-être dans l'histoire universelle des chefs d'Etat ayant quitté le pouvoir, un président de la République sorti du pouvoir tient une conférence de presse d'un niveau si dramatiquement bas.
Mais à l'entendre débiter toutes ces inepties indignes du statut qu'il revendique – mais là ce n'est point une surprise - on mesure avec un bonheur immense l'acte de souveraineté et de dignité qu'a eu le peuple sénégalais en dégageant du pouvoir Abdoulaye Wade et sa clique d'affairistes le 25 mars 2012. Cet homme a encore confirmé d'une éclatante manière, et à son grand détriment, qu'il n'aurait jamais dû être à la tête du Sénégal. Il n'en a ni la stature, ni la classe, ni l'aplomb. Ses propos du vendredi sont encore un scandale grossier qui jette l'humiliation et la honte sur ce pays et sur ses dirigeants, mais avant tout sur lui-même. Plus que jamais, le pouvoir actuel doit aller jusqu'au bout de la logique de transparence et de salubrité publique réclamée par la voix populaire.
Que vise Wade, en réalité, derrière cette sortie ubuesque à la limite d'une pièce de comédie mise en scène par un vieux artiste perdu par sa boulimie de puissance ? Trois objectifs. Remobiliser un électorat groggy par la raclée populaire du 25 mars. Affermir le cordon sanitaire autour de ses enfants et de sa femme. Et dissuader le pouvoir par rapport à toutes poursuites judiciaires qui seraient une menace pour sa personne immédiate. Au fond, ces trois éléments reviennent encore et toujours à ce grand égoïsme wadien qui renvoie tout à lui et aux siens. C'est un maître chanteur.
Il ne mérite qu'un seul égard : être combattu.
Au nom de l'Etat qu'il a incarné pendant douze ans, Abdoulaye Wade n'a pas honte de dire, de manière détournée, qu'il a fait du trafic d'influence le fondement de son action mercantiliste et affairiste à la tête du Sénégal. Le petit conte qu'il rapporte de son entretien téléphonique avec l'ambassadeur de Chine à Dakar pour quémander des véhicules, témoigne du système patrimonial et confusionniste qu'il a entretenu avec le pouvoir.
La bassesse politique et morale qu'il a servie contre Pape Diop est une autre facette que nous rappelle ecce homo qui n'aurait jamais dû présider aux destinées de notre pays. Aujourd'hui, après trente cinq ans au moins de compagnonnage avec l'actuel président du Sénat, il se rend subitement compte qu'il a cheminé avec un faussaire doublé d'un repris de justice ! Il ne s'agit pas uniquement de lâcheté, ce caractère qui est devenu si banal dans tous les champs politiques du monde ; c'est la nature intrinsèquement vicieuse de l'individu qui émerge. Cela aussi est une confirmation ! Cet homme là ne se donne aucune limite : par ses faiblesses, compromissions et calculs politiciens, il s'est interdit, alors qu'il avait le pouvoir, de «régler» les dossiers des «Licences de pêche» qu'il attribue à Ousmane Tanor Dieng, et du «Pétrole» de Moustapha Niasse. Il n'en a rien fait, parce qu'il s'est emprisonné dans les petites combines qu'il entretient à dessein.
Lamentable ! Voilà ce qu'a été le vendredi la sortie musclée d'Abdoulaye Wade. On lui reconnaît juste d'avoir été pétillant, posé, précis dans ses foucades. Mais il est resté égal à lui-même : un joueur devant l’Éternel. Hors du pouvoir, il devient un flibustier qui croit avoir encore à disposition des troupes d'assaut prêtes à l'aventure. Il vit en bulle après s'être malhonnêtement servi du Sénégal. Cet homme là, il ne mérite aucun autre égard que d'être combattu. Sinon, il restera ce pollueur politique vivant dont le Sénégal n'a point besoin.
MOMAR DIENG