Des missiles français dans l'arsenal rwandais en 1994
Cette information révélée par l'ONU serait de nature à relancer le débat sur les auteurs de l’attentat de l'avion du président Habyarimana.
Quinze missiles Mistral, alors interdits à la vente, figuraient au sein de l'arsenal de l'armée rwandaise, à la veille du génocide, indique un document de l'ONU, versé jeudi 31 mai au dossier d'instruction sur l'attentat contre le président Habyarimana, affirme "Libération". La liste révélant la présence de ces missiles sol-air de fabrication française - découverte par une journaliste britannique dans les archives de l'ONU - a été remise jeudi aux juges Marc Trévidic et Nathalie Poux par les avocats des personnalités rwandaises mises en examen dans cette affaire par le juge Bruguière en 2006, précise le quotidien dans son édition à paraître vendredi.
Jeudi marquait l'expiration du délai offert à toutes les parties civiles pour commenter ou contester une expertise balistique rendue publique le 10 janvier. Celle-ci avait orienté l'enquête vers des tirs de missile depuis le camp de Kanombe, alors aux mains de l'armée, sans désigner les auteurs possibles de cette attaque.
Une révélation de nature à relancer le débat sur les auteurs de l’attentat
L'attentat du 6 avril 1994 contre l'avion du président Habyarimana est considéré comme le déclencheur du génocide rwandais, qui en cent jours a coûté la vie à 800.000 personnes selon l'ONU. Le gouvernement rwandais soutient depuis 2009 que les tirs sont partis du camp militaire de Kanombe, importante base des Forces armées rwandaises (FAR, loyalistes), jouxtant l'aéroport et la résidence présidentielle au sud-est. L'enquête française conduite initialement par le juge Jean-Louis Bruguière avait abouti à l'inverse au lancement en 2006 de mandats d'arrêts contre des proches du président Kagame qui dirigeait en 1994 la rébellion tutsie du Front patriotique rwandais (FPR).
Depuis 1994, les anciens officiers rwandais inculpés par le Tribunal pénal international pour le Rwanda n'ont cessé d'affirmer qu'aucun des leurs ne pouvait être mêlé à cet attentat car ils ne possédaient pas de missiles, rappelle "Libération". Selon le quotidien, la présence de ces armes dans les stocks de l'armée rwandaise à la veille du génocide ne confirme ni ne contredit l'enquête en cours du juge Trévidic. Elle n'est qu'un élément qui incite à se poser des questions "sur l'enfumage constant de ce dossier", comme le souligne Bernard Maingain, l'avocat des officiels rwandais mis en examen, cité par le quotidien.