Deux personnes en garde à vue au commissariat de Dieuppeul
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L’affaire fait grand bruit et suscite une indignation unanime. Dans une vidéo, une dame est humiliée par trois individus qui la prennent pour une voleuse, alors qu’elle souffre de problèmes psychiques. Deux des présumés tortionnaires sont entre les mains de la police de Dieuppeul.
Depuis avant-hier soir, circule une vidéo montrant une dame en train d’être humiliée par des individus qui l’accusent de vol. Elle suscite, depuis lors, un tollé général où se mêlent indignation et condamnation. Les tortionnaires voulaient se faire de la pub en publiant la vidéo. Elle se retourne contre eux, puisqu’ils ont été arrêtés par les forces de l’ordre depuis hier.
I. Thiaw (37 ans) et B. Ndiaye, né en 1958, se trouvent entre les mains des limiers du commissariat de Dieuppeul. Selon nos informations, le premier nommé est celui qui tenait la dame dans la vidéo, alors que l’autre filmait la scène.
Lorsqu’elles ont eu connaissance de la vidéo, nos interlocuteurs soulignent que les plus hautes autorités de la police, à travers le commissaire central de Dakar, El Hadj Cheikh Dramé, ont tout fait pour mettre la main sur la vidéo, histoire de la visionner. Des nouvelles techniques de décryptage ont permis d’identifier le lieu où l’action s’est déroulée, avant-hier tard dans la nuit. Hier, en fin de matinée, l’enquête a été filée discrètement aux limiers de Dieuppeul. De fil en aiguille et de concert avec les techniciens en la matière, les deux mis en cause, qui sont facilement identifiables dans la vidéo, ont été localisés chez eux à Sacré-Cœur 3. Ils ont été cueillis à la suite d’une descente inopinée dans la journée et acheminés dans les locaux du commissariat pour les besoins de leurs auditions.
Ils sont, pour le moment, poursuivis pour collecte illicite, diffusion de données à caractère personnel et atteinte à la dignité humaine. L’enquête suit son cours. Une troisième personne est activement recherchée.
Dans la vidéo, on voit un homme palper les seins de la dame Fatou Ndoye, née en 1989. Maintenue au sol et interrogée, elle s’emmure dans un silence total, tout le temps que dure la scène. ‘’Regardez comme vous êtes belle. C’était mieux d’aller se prostituer que de voler. Montrons son visage pour que tout le pays sache que c’est une voleuse. Fouillons-la pour voir si elle n’a rien caché sous ses habits. Vous êtes un bandit, une voleuse. On va vous vilipender dans les réseaux sociaux. Si vous avez le courage, regardez-moi les yeux dans les yeux’’, dit l’une des voix.
Pendant que l’un palpe les seins de la dame, on entend une voix de femme dire à l’un des hommes de ne pas aller plus loin, afin de préserver sa dignité.
Depuis, les organisations de défense des Droits de l’homme et de la lutte pour la cause féminine ruent dans les brancards et demandent justice. D’ailleurs, l'AJS, Amnesty, Le collectif contre la violence faite aux femmes et Jamra, cosignataires d'une déclaration commune, s'engagent, après avoir saisi les autorités policières compétentes, à assurer gratuitement un accompagnement à cette famille très affectée par les épreuves que traverse présentement leur fille cadette.
La fille a un Bac+5 et souffre de problèmes psychiques
Selon des sources policières, la dame était cadre supérieur dans l’Administration sénégalaise. Elle souffre de troubles mentaux. Une information confirmée par le président de l’ONG Jamra. Selon Mame Matar Guèye, Jamra s'est entretenue longuement au téléphone avec le père de la fille qui appartient à une famille respectable. Après avoir brillamment bouclé ses études (Bac+5) et décroché un diplôme supérieur dans une grande école privée de la place, elle a réussi à un concours d'admission dans la Fonction publique sénégalaise. Elle bénéficiait, depuis le mois de ramadan dernier, d'une affectation dans un démembrement de l'État comme cadre administratif. ‘’C'est après avoir servi quelques mois à ce poste de responsabilité administrative qu'elle a commencé (pour la première fois) à être saisie de troubles mentaux qui lui ont valu de suivre un traitement approprié dans un service psychiatrique de la place. Un dossier médical en bonne et due forme, attestant de ses intermittentes confusions mentales, a d'ailleurs été remis à ses parents qui l'ont présenté au commissaire de la police de Dieuppeul’’, écrit M. Guèye.
Pour le président de Jamra, la fille reprendra sans délai son traitement médical, sous la surveillance stricte de ses parents.
CHEIKH THIAM