Quand Mody Niang appelle la police et la gendarmerie nationales à la désobéissance
Dans un article fleuve - le seul moyen dont il dispose pour se convaincre d’avoir bien travaillé - Mody Niang s’adresse sans détour sur opera.news et en s’exclamant - je le cite - « à nos magistrats, Forces de Sécurité et de Défense et chefs religieux ». Et pour se convaincre d’être entendu, M. Niang s’adonne une énième fois à ce qu’il ne sait toujours pas faire pour n’avoir pas été formé à se conformer à la démarche scientifique dont le respect passe inexorablement par la conquête des faits allégués sur les préjugés, la constatation desdits faits et leur construction par la pensée.
Il convient de mettre ici l’accent sur les trois phases auxquelles Gaston Bachelard arrime - titre de son œuvre culte - « la formation de l’esprit scientifique », pour montrer d’où sort l’impasse intellectuelle et morale qui a poussé l’ancien inspecteur de l’enseignement à demander avec gravité aux Forces de défense et de sécurité (FDS) de la République du Sénégal à se désengager de leur grande mission régalienne, de maintien de l’ordre et de protection des biens et des personnes, pour s’être dédouanées - Mody Niang les y encourage - de la reddition des comptes à laquelle tous les justiciables sont assujettis dans un État de droit.
S’agissant de la conquête (délicate) des faits sur les préjugés tenaces, Mody s’auto-immunise en se refusant à accepter que le chef de l’Etat n’est pas un « président-politicien ». Mais un président tout court comme tous ses homologues africains et du reste du monde. Dans la conception réductrice de Mody Niang, l’épithète « politicien » est la prénotion (préjugé) qui rend le chroniqueur prolixe incapable de conquérir les faits grâce auxquels il étaye sa démonstration pour convaincre. La sentence sans appel est on ne peut plus haineuse puisque le président Macky SALL ne peut en aucun cas se prévaloir du moindre actif en 10 ans pour n’avoir fait sur la période (2012-2022) que de la politique politicienne. Sur quels faits conquérir la prénotion dont Mody Niang use et qui dissimule mal son ignorance puisque l’épithète « politicien » n’est ni plus ni moins qu’une mauvaise traduction du terme « politician » qui est loin d’être péjoratif quand les political scientists anglo-saxons l’utilisent avec compétence.
Mais là ne s’arrête pas l’impasse intellectuelle du sniper puisque dans l’article que nous analysons, l’auteur refile trois ou quatre fois le travail de présentation des faits aux lecteurs en ces termes : « Nous laissons le soin à nos compatriotes (…) d’apprécier. » Autrement dit, c’est à ses « pauvres compatriotes » - expression dont il use pour les nommer - que Mody Niang fourgue le travail de documentation sur les faits. Nous attirons l’attention de Mody Niang sur le fait avéré que nos « pauvres compatriotes » sont riches de beaucoup de choses à la fois. Ils sont riches du grand pays qui les a vus naître, de leur formation et pratique spirituelles, de l’élégance dans le port, de leur travail, de leurs familles, de leurs quartiers, de leurs amis, de leurs voisins, de leur liberté d’exprimer leurs opinions et de leur souveraineté leur permettant de choisir, le moment venu, leur président par les urnes comme ils ont su le faire en février et mars 2000 et 2012 et en février 2019.
Aux préjugés et à l’absence de faits constitutifs du passif sur lequel porte son raisonnement charlatanesque, Mody Niang ajoute l’anti-intellectualisme de celui qui s’interdit toute construction par la pensée pour n’avoir jamais appris à forger des concepts sous le prime des outils que l’étude longue des sciences sociales confère aux adeptes de la philosophie, de l’histoire de la géographie, de la sociologie, de l’économie, de la science politique. etc.
Autant d’échecs de la pensée poussent M. Niang à sous-estimer la capacité de la hiérarchie dans la police, la gendarmerie, la justice et les foyers religieux à démêler ses écrits qui conduisent au plat unique qu’il sert aux mêmes convives depuis dix ans maintenant. Une vraie impasse intellectuelle !
L’impasse est surtout dans le dessert servi et dont voici les ingrédients inattendus : « Nous courons derrière la bonne gouvernance depuis le 1er mars 1962. N’est-il pas enfin temps que notre pays y accède ? Notre justice, nos Forces de Défense et de Sécurité comme l’ensemble de nos autres institutions n’ont pas le droit de nous en empêcher, en suivant le président-politicien et ses acolytes dans leur rêve fou qui pourrait brûler tout notre pays. »
Il ne fait aucun doute que « nos Forces de Défense et de Sécurité comme l’ensemble de nos autres institutions » ont, depuis la date indiquée du « 1er mars 1962 », joué de belle manière leur partition pour permettre à notre pays de s’enorgueillir de la stabilité et de la gouvernabilité qui lui valent l’image enviable d’un pays tranquille capable, en dernier ressort et en dépit des vicissitudes, de faire trancher les débats contradictoires qui rythment sa démocratie par le peuple souverain à travers le verdict des urnes dont Mody Niang salua lui-même, en mars 2000 et en mars 2012 au moins, les performances inédites.
Impasse morale
Dans une analyse rigoureuse de la dissolution, de Yoonu Askan Wi de l’ami commun Madièye MBODJ dans PASTEF ( Patriotes africains du Sénégal pour le Travail, l’Éthique et la Fraternité), qui n’a rien à envier à la démarche scientifique, le Secrétaire général du Rta-S/Péncoo Réew, Hadji Momar Samb, écrit : « Surfant sur les difficultés des populations confrontées à des pénuries en tout genre accumulées depuis des décennies, sur les erreurs et fautes du pouvoir, utilisant même les catastrophes naturelles (inondations, pandémie, etc.), le PASTEF tente d’aiguiser le sentiment de rejet du régime, sans jamais établir de manière objective et scientifique sa faillite fondée sur une évaluation des politiques publiques délivrées par le pouvoir de BBY. » Fait notoire : Mody Niang est un inconditionnel d’Ousmane Sonko et de sa faction insurrectionnelle et terroriste. Pourtant, l’ancien inspecteur de l’enseignement ne permettrait à aucun membre de son honorable progéniture, bien éduquée et bien instruite, de se comporter en politique comme M. Sonko en appelant la police et la gendarmerie nationales à la désobéissance quand il ne les menace pas de représailles populaires pour bons et loyaux services rendus à la République une et indivisible. En s’y hasardant avec Ousmane Sonko, Guy Marius Sagna et compagnies, Mody Niang ajoute une impasse morale à sa terrible déconvenue intellectuelle. Nous ne l’attendions pas sur ce terrain insalubre.
Abdoul Aziz DIOP
Essayiste
SEN APR
Conseiller spécial à la Présidence de la République