Six zoonoses priorisées
Au Sénégal, 21 maladies zoonotiques sont identifiées. Mais seulement six sont jugées prioritaires par le ministère de l’Élevage et de la Production animale. L’annonce est faite hier au cours d’une rencontre organisée depuis mercredi par l’USAID Breakthrough Action et la Direction générale de la Santé.
Une zoonose est une maladie ou une infection transmissible. Elle se transmet naturellement des animaux vertébrés aux humains et vice-versa (OIE). Mais très rarement des hommes aux animaux. Au Sénégal, six zoonoses sont prioritaires parmi les 21 identifiées. Il s’agit de la rage, de la grippe aviaire zoonotique, de la tuberculose bovine, de l’Anthrax ou charbon, de la fièvre de la vallée du Rift et des maladies à virus Ebola/Marburg.
Mais, précise le docteur Amadou Ndiaye du ministère de l'Élevage et des Productions animales, les six identifiées ne sont pas plus importantes que les autres. Le Dr Ndiaye faisait une présentation hier sur les zoonoses prioritaires au Sénégal, au cours d’un atelier sur le Règlement sanitaire international. La contamination de ces maladies, soutient-il, peut se faire par contact direct avec les fluides corporels d’animaux infectés (salive, urine, sang), les caresses, les morsures et les égratignures. Le contact peut être indirect dans les milieux où vivent les animaux ou avec des objets contaminés (nourriture, plat, sole). Il peut se faire par une piqûre d’insecte avec les tiques, les moustiques ou les puces. La consommation d’aliments contaminés ou mal préparés fait objet de contamination par le lait non pasteurisé, la viande, les œufs mal cuits, les fruits et les légumes crus contaminés.
S’agissant de la rage, elle infecte les animaux domestiques et sauvages. Selon le Dr Ndiaye, une fois déclarée chez un individu, il est condamné. ‘’Il n’existe aucun traitement à ce stade. Dans la population générale, les groupes les plus exposés sont les familles détentrices de chiens et les enfants. Elle est transmise habituellement lors d’une morsure, griffure ou léchage d’une plaie ou d’une muqueuse par un animal infecté, habituellement un chien, mais aussi un chat, un âne, un cheval, un singe, entre autres’’, explique le spécialiste.
Pour lui, les moyens de prévention sont multiples. Il y a la vaccination des animaux de compagnie régulièrement, la surveillance et la notification des cas suspects et des expositions.
Pour ce qui est de la fièvre de la vallée du Rift, elle affecte les buffles, les camelins, les bovins, les caprins et les ovins, ainsi que l’homme. Selon le docteur Amadou Ndiaye, la maladie se traduit chez les animaux par la fièvre, des avortements, une morbidité et une mortalité élevées. Elle sévit de façon enzootique au Sénégal. La maladie fait, précise-t-il, l’objet d’une surveillance passive et active, et d’une vaccination ciblée. Elle se transmet par les animaux sauvages et domestiques aux moustiques qui les transmettent à l’homme. ‘’Il faut surveiller les animaux sensibles et notifier immédiatement les cas suspects. Mais, surtout, éviter de manipuler les avortons ou prendre des précautions si la manipulation est nécessaire. La vaccination des animaux est nécessaire’’, renseigne-t-il.
Pour contrôler la maladie au Sénégal, une campagne annuelle de vaccination ciblée est menée dans les zones à risque.
‘’L’UEMOA a financé un programme de lutte contre la fièvre charbonneuse pour un montant de 750 000 000 F CFA’’
Concernant la grippe aviaire, elle affecte les oiseaux domestiques et les oiseaux sauvages, causant une mortalité très élevée. Elle se transmet, informe le Dr Ndiaye, par les selles et la salive d’oiseaux infectés, le déplacement de personnes portant des vêtements et des chaussures contaminés, des véhicules et des équipements contaminés, mais également par l’inhalation. Pour prévenir cette maladie, il ne faut pas installer des fermes avicoles à côté des agglomérations et des sites ornithologiques qui accueillent l’avifaune. Il faut également respecter les mesures de biosécurité et de biosureté. ‘’En raison de la mutation du virus et de la difficulté de disposer d’un vaccin efficace, l’option de la vaccination n’est pas retenue au Sénégal. Depuis l’avènement de la maladie, le Sénégal déroule un programme de prévention et de contrôle intégrant l’interdiction de l’importation des produits de l’aviculture et de matériels avicoles usagés en 2005’’, fait-il savoir.
Quant à la fièvre charbonneuse, elle est causée par Bacillus anthracis qui produit des toxines responsables des symptômes de la maladie. La maladie est endémique au Sénégal et elle fait l'objet d’une surveillance passive et d’une déclaration obligatoire. Elle se transmet par ingestion d’aliments ou inhalation de l’air contenant des spores.
D’ailleurs, renseigne-t-il, pour contrôler la fièvre charbonneuse dans les régions du sud du Sénégal, l’UEMOA a financé un programme de lutte contre la maladie pour un montant de 750 000 000 F CFA. La stratégie repose sur la vaccination des ovins, des caprins et des bovins, avec le carbovin produit par l’Isra. Pour ce qui est de la tuberculose bovine, elle est due à Mycobacterium bovis qui est étroitement apparentée à la bactérie responsable de la tuberculose humaine et aviaire. L’homme et les bovins sont infectés par inhalation de l'air contenant les germes d’un animal infecté, la consommation de lait cru et produits laitiers non pasteurisés.
S’agissant de la fièvre à virus Ebola, le docteur Amadou Ndiaye soutient qu’il faut juste une surveillance épidémiologique (faune sauvage et homme), éviter le contact avec les primates ou les chauves-souris sans mesures de biosécurité. Il faut aussi, dit-il, éviter la consommation de ces animaux et la vaccination dans les zones à risque élevé.
Pour mieux lutter contre ces maladies, le Dr Ndiaye souligne qu’il faut une approche ‘’One Health’’. ‘’Les zoonoses causent 2,7 milliards de cas et 2,7 millions de décès par an. Il est opportun de renforcer leur contrôle à travers la mise en place d’un programme global prenant en compte, entre autres, l’actualisation du cadre réglementaire. La modernisation des infrastructures et le renforcement des capacités des acteurs doivent être mis en œuvre’’, explique-t-il. Pour lui, le renforcement de la surveillance des maladies zoonotiques est nécessaire du même que le renforcement des capacités de diagnostic des zoonoses au laboratoire.
VIVIANE DIATTA