Une Cour pour traquer les «délinquants à col blanc»
L’exercice était difficile, voire périlleux. Mais le Premier ministre Abdoul Mbaye aura réussi son ‘’test’’ en faisant sa déclaration de politique générale -bien que trop longue- devant les tirs nourris de l’opposition parlementaire. Très serein, courtois et parfois taquin, le chef du gouvernement s’est évertué durant 9 tours d’horloge (10 à 19 h 30) à convaincre l’Assemblée nationale de la vision du président de la République qui est un ‘’condensé’’ du programme Yoonu Yokkute et des conclusions des Assises nationales. A l’entame, le Premier ministre a naturellement dressé un ‘’tableau sombre’’ de la gestion de l’ancien régime congédié le 25 mars 2012 ‘’après tant d’attentes insatisfaites, d’espoirs déçus, de perspectives obstruées’’. M. Mbaye entend sonner ‘’la fin de l’arrogance et de l’impunité, la juste récompense de l’effort, du mérite et de la compétence’’. De ‘’nouvelles exigences’’ que le Premier ministre entend prendre en charge afin de restaurer ‘’la crédibilité de l’Etat’’.
Ainsi, a-t-il promis la création de la Cour de répression des crimes économiques et financiers. «Ai-je besoin d’évoquer devant vous les nombreuses fautes de gestion avérées qui ont pesé, jusqu’ici, sur la gestion des finances publiques, la conclusion de nombreux contrats publics ou transactions dans des conditions de non transparence ?’’, se demande-t-il. Le chef du gouvernement rappelle que ‘’c’est au nom du principe de transparence’’ que son ‘’gouvernement a décidé de dénouer tous les dossiers en souffrance et sur lesquels les corps de contrôle habilités avaient déjà formulé des directives précises’’ ; en l’occurrence les audits de 2008 pour lesquels les dignitaires de l’ancien régime ont été entendus par la section de recherche de la gendarmerie de Colobane. L’objectif final de cette mesure est, selon M. Mbaye, de restituer ‘’les avoirs détournés de leur destination initiale’’, et qui ‘’permettrait de constituer des ressources pour financer des projets prioritaires’’. A ce propos, l’ancien Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye a, dans son intervention, déploré la manière dont le régime de Macky Sall s’y emploie. Aussi, le maire de Guinguineo n’apprécie-t-il pas que les procès-verbaux des auditions se retrouvent sur la place publique. ‘’La Justice n’a pas besoin de faire du bruit pour montrer son efficacité’’, dit-il. Modou Diagne Fada se montre plus radical en défiant l’Etat de ramener ces ‘’biens mal acquis’’ dont on parle.
Un des changements que le gouvernement de Macky Sall entend apporter, c’est la réforme constitutionnelle. Dans ‘’sa volonté d’approfondir notre démocratie et de doter notre pays d’institutions fortes’’, le Premier ministre Abdoul Mbaye a exprimé la volonté du chef de l’Etat de faire remplacer le Conseil constitutionnel par une Cour constitutionnelle. Cette structure subira une mutation ‘’notamment en ce qui concerne sa composition et le mode de désignation de ses membres’’, annonce M. Mbaye. Cette volonté, poursuit le chef du gouvernement, se traduira également par la mise en place d’une Commission chargée du suivi de la mise en œuvre des recommandations des Assises nationales.
Une nouvelle carte judiciaire
Toutefois, sans ‘’une justice performante, sans une exécution diligente des décisions, sans la célérité des procédures’’, ces objectifs seraient compromis. Le Premier ministre a ainsi promis une ‘’justice moderne et indépendante’’. Le gouvernement d’Abdoul Mbaye entend promouvoir la qualité du service public de la Justice, par une amélioration des conditions de travail du personnel judiciaire, et un programme de construction, de réhabilitation et de modernisation des juridictions. Cette ‘’nouvelle carte judiciaire permettra de rapprocher la justice du justiciable’’ sans oublier ‘’le désengorgement des juridictions de Dakar et le rééquilibrage de l'activité judiciaire au profit des régions’’.
DAOUDA GBAYA
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