Publié le 4 Jul 2023 - 01:02
CONDAMNATION DU LEADER DE PASTEF

De l’Europe au Sénégal, l’arrestation d’Ousmane Sonko se précise

 

La ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur faisait face à la Commission des affaires étrangères du Parlement européen, lundi dernier, à Bruxelles.

 

Devant la Commission des affaires étrangères du Parlement européen, à Bruxelles (Belgique), Aïssata Tall Sall a prononcé une ‘’importante déclaration’’ annoncée depuis la visite du président de la République Macky Sall au Portugal. La ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur s’est également exprimée sur la situation politique au Sénégal, laissant entendre une arrestation imminente du leader de l’opposition Ousmane Sonko, condamné à deux ans de prison ferme pour ‘’corruption de la jeunesse’’ et à une amende de 600 000 F CFA ou des 20 millions de dommages et intérêts à verser solidairement avec son co-accusé Ndèye Khady Ndiaye à Adji Sarr.

Face aux députés européens, la cheffe de la diplomatie s’est voulue claire : ‘’Le Sénégal, État de droit, ne peut accepter qu’un de ses citoyens organise le chaos et refuse de se soumettre à la loi, au droit et à la justice. Le Sénégal, État de droit, ne saurait tolérer à accepter qu’un de ses citoyens, quel que soit son statut et son rang, puisse se soustraire à l’exécution d’une décision de justice rendue souverainement par des juges indépendants.’’

Le Sénégal ne saurait accepter la soustraction à l’exécution d’une décision de justice

Acquitté du viol d'Adji Sarr, qui avait porté plainte contre lui en 2021, Ousmane Sonko a été condamné, le 1er juin dernier, à deux ans de prison ferme et à 600 000 F CFA d'amende par la Chambre criminelle du tribunal de Dakar. Deux jours auparavant, le maire de Ziguinchor, arrêté sur la route de sa ‘’Caravane de la liberté’’ vers Dakar, était assigné à résidence, en attendant le verdict de son procès. Depuis, la situation n’a pas évolué. Le leader de Pastef/Les patriotes est toujours bloqué chez lui, bientôt un mois après un jugement devant l’envoyer en prison.

À la veille de la célébration de la Tabaski, le président de la Chambre criminelle de Dakar a rendu sa décision dans le cadre du procès d’Ousmane Sonko. L’indisponibilité de ce document expliquait, en partie, selon le ministre de la Justice, la non-incarcération du maire de Ziguinchor. Immédiatement après le verdict, Ismaïla Madior Fall avait assuré qu’Ousmane Sonko pouvait être arrêté ‘’à tout moment’’.

 ‘’Il faut d’abord que la décision soit disponible, avait-il précisé quinze jours plus tard, alors qu’Ousmane Sonko n’avait toujours pas été arrêté. Une fois que la décision lui est notifiée, lui-même se constitue prisonnier ou le parquet va le cueillir’’.

La liberté du leader de Pastef est désormais indirectement entre les mains du président de la République, via son ministre de la Justice, via le parquet.

En effet, l’arrêt des juges ordonne une exécution provisoire de la condamnation, ce qui annule la suspension de peine qu'auraient pu entrainer les recours introduits par Adji Sarr, la plaignante, et Ndèye Khady Ndiaye, co-accusée d’Ousmane Sonko.

La liberté de Sonko entre les mains de Macky Sall

Non pas pour commenter l’actualité politico-judiciaire, le mis en cause s’est exprimé, pour la première fois depuis sa condamnation, à la veille de la Tabaski. Depuis son domicile, Ousmane Sonko a souhaité une bonne fête aux Sénégalais. Reposé, le maire de Ziguinchor a regretté le désengagement de certains compagnons par ‘’peur’’ ou ‘’d’autres raisons’’ à travers le rappel d’’histoires religieuses. Le tout, en réaffirmant sa foi au ‘’projet’’ plus que jamais intact. Ousmane Sonko a également donné rendez-vous aux Sénégalais après la fête pour évoquer la situation du pays.  

Malgré tout, la culpabilité du leader de Pastef  ne fait l’objet d’aucun doute, selon la ministre des Affaires étrangères. D’après Aïssata Tall Sall, qui a poursuivi son réquisitoire devant les députés européens, ce que le gouvernement du Sénégal reproche à son plus farouche opposant va bien au-delà de la décision de justice du 1er juin.

En effet, assure la ministre, ‘’ce qui s’est passé au Sénégal les 1er et 2 juin 2023 est sans précédent dans notre pays. À la suite de sa condamnation à deux ans ferme dans le cadre d’un procès l’opposant à une jeune fille dénommée Adji Sarr, qui l’avait accusé de viol, Ousmane Sonko, un des opposants sénégalais, a instigué et provoqué de violents troubles pour rejeter la décision de justice, alors même qu’il avait délibérément refusé de comparaitre pour se défendre. À son appel, des bandes organisées et armées ont semé le désordre, la violence et parfois la mort. Elles ont détruit et saccagé les biens publics et privés, le tout étant plus détaillé dans le livre blanc publié par le gouvernement du Sénégal’’.

Aïssata Tall Sall : ‘’Des forces tapies au sein de mouvement salafistes et de bandes entrainées et armées ont voulu s’emparer de notre pays’’

La ministre ne s’arrête pas là. ‘’Ces bandes organisées ont failli, si ce n’était pas la vigilance et le professionnalisme de nos forces de l’ordre, s’en attaquer à des infrastructures névralgiques, en sabotant les installations d’eau, d’électricité et de transport public à Dakar. L’objectif était clair : il s’agissait de mettre Dakar dans un état de chaos total et de rendre ainsi le pays ingouvernable’’, ajoute-t-elle.  

Si le président de la République, lors de la cérémonie de réception  du rapport issu des travaux du Dialogue national, a assimilé les actions violentes de ces deux jours de manifestation à du terrorisme, ce n’est pas le discours de la cheffe de la diplomatie sénégalaise qui va le démentir. Car, illustre Aïssata Tall Sall, ‘’nous le savons maintenant et nous le saurons davantage, des forces tapies au sein de mouvements salafistes et de bandes entrainées et armées ont voulu s’emparer de notre pays, mettre à terre la République, l’agresser dans ce qu’elle a de plus fondamentale et sacrée. C’est-à-dire un État debout et fort, une démocratie soutenue et ancrée, et surtout une stabilité politique et sociale que tous envient au Sénégal’’.

Cette entreprise est même de dimension internationale, d’après la diplomate qui a évoqué dans son discours les attaques informatiques du groupe Anonymous sur des sites gouvernementaux, ‘’paralysant ainsi tout leur fonctionnement. Il est clair que la violence des manifestations et leur caractère simultané relayaient une organisation planifiée et concertée’’.

Les députés européens évoquent leurs inquiétudes sur la démocratie au Sénégal

Selon le bilan officiel, les manifestations du début du mois de juin ont fait 16 morts. Et une enquête a été ouverte, selon la diplomate, qui ‘’suivra son cours jusqu’à son aboutissement. Les responsabilités seront situées et toutes les sanctions qui doivent en découler appliquées, sans faille et avec toute la rigueur requise par la loi’’.

Toutefois, Amnesty International a documenté, dans un rapport, au moins 23 morts lors de ces violences. Cela s’ajoute aux 14 décès notés lors des heurts de mars 2021 et pour lesquels une enquête n’a toujours pas été publiée.

Aïssata Tall Sall a été interpellée sur la démocratie au Sénégal. D’après un sénateur de la République tchèque, qui s’est dit intéressé par l’actualité politique au Sénégal, ‘’le flou autour de la candidature du président Macky Sall, malgré la limitation par la Constitution, éveille des tensions dans les institutions politiques et dans la société civile’’.

Citant les inquiétudes exprimées par l’ancienne Première ministre Aminata Touré, de la Commission de l’Union africaine et de la CEDEAO, l’ancien candidat à la présidentielle tchèque a demandé à la ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur de transmettre les inquiétudes des députés européens au président de la République sur le nombre élevé de prisonniers politiques, de journalistes arrêtés et de libertés confisquées dans un pays ‘’hélas, réputé pour la stabilité de son système démocratique’’.

Lamine Diouf

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