Des acteurs formés sur la prévention et la prise en charge
Le viol et la pédophilie sont des violences sexuelles très graves qui détruisent la vie des victimes, en particulier des femmes et des jeunes filles concernées. Des fléaux dont les couches vulnérables de la zone Nord ne sont pas épargnées. C'est dans ce cadre que l'Association des juristes sénégalaises organise un atelier de 48 heures de renforcement de capacités d'une trentaine d'acteurs de la région intervenant dans la prévention et sur la prise en charge des victimes de violences sexuelles.
Le Sénégal dispose d’un cadre juridique de répression des violences sous toutes leurs formes, dont leur effectivité peut concourir à leur prévention et leur éradication. Cependant, une certaine partie de la population sénégalaise ignore encore l’existence de cette loi et continue de faire des violences sexuelles une affaire privée. Une tendance que l'Association des juristes sénégalaises (AJS), en collaboration avec des organisations de défense des droits humains, tente de renverser et de briser la loi du silence.
Pour Aminata Samb, chargée de projet à l'AJS, leur organisation et ses partenaires financiers veulent contribuer à l'éradication des violences sexuelles par la sensibilisation, la vulgarisation et l'application effective de la loi criminalisant le viol et la pédophilie en zone urbaine et périurbaine. "Le projet intervient dans six régions du Sénégal. Nous avons ciblé Saint-Louis, parce qu'on nous a informés qu'il y a beaucoup de violences sexuelles dans la zone Nord. À Saint-Louis, nous n'avons pas les statistiques exactes parce qu'on ne dispose pas encore d'une boutique de droit sur place. Mais les échanges avec l'autorité administrative, lors de notre visite de courtoisie, ont confirmé la récurrence des faits. Il y a aussi l'AEMO qui reçoit des victimes de violences sexuelles pour une assistance. En juin dernier, nous avons tenu un atelier avec les journalistes et lors de cette activité, il a été fait cas de beaucoup de violences sexuelles qui se produisent à Saint-Louis. La boutique de droit la plus proche de Saint-Louis se trouve à Kébémer. Dans cette boutique de droit, les 50 % des cas enregistrés sont des victimes sexuelles. Ce qui veut dire que le fléau est bien ancré dans la zone Nord", a déclaré Aminata Samb.
Pourtant, à la suite de plusieurs mobilisations d’organismes de défense des droits des femmes et des enfants dénonçant des cas de violence suivis de meurtre, la loi n°2020-05 criminalisant le viol et la pédophilie a été promulguée. En plus des innovations apportées par la loi du 29 janvier 1999 modifiant quelques dispositions du Code pénal et définissant le viol, la loi n°2020-05 constitue une avancée majeure dans la protection et la promotion des droits des femmes et des enfants.
"L'objectif de telles activités, c'est d'accentuer la lutte par des actions de sensibilisation et de vulgarisation de cette loi. Donc, nous allons mobiliser la communauté, les décideurs, mais aussi la société civile pour que chacun, à son niveau, dise non aux violences sexuelles. Avec l'implication de tous, la pression sera maintenue pour que la loi criminalisant le viol et la pédophilie votée en 2002 soit appliquée à travers le Sénégal", a soutenu Aminata Samb.
Venu présider l'ouverture de la formation, le préfet de Saint-Louis a rappelé que la loi manque encore de vulgarisation auprès des populations. "Beaucoup de Sénégalais ignorent l'existence même de cette loi. Raison pour laquelle, si l'Association des juristes sénégalaises et ses partenaires, dont l'AEMO viennent pour vulgariser, informer et former les acteurs autour de ce texte juridique, nous ne pouvons que s'en féliciter. En tant qu’autorité administrative, mais également en tant que partie prenante, nous avons ce devoir de veiller à ce que les dispositions de la loi soient respectées, soient mises en application", a déclaré Mamadou Ndiaye.
IBRAHIMA BOCAR SENE SAINT-LOUIS