Le Guichet unique d’accès au financement lancé
La 3e édition du Forum de la PME sénégalaise a débuté, hier. À l'occasion de la cérémonie d'ouverture, le Guichet unique d'accès au financement (GUF-PME) a été lancé. Les acteurs publics et privés veulent faire passer le volume de financement des PME de 500 milliards en 2023 à 3 000 milliards en 2028.
Ouverte ce jeudi, la 3e édition du Forum de la PME sénégalaise, organisée par l'ADEPME (Agence de développement et d'encadrement des PME), se poursuivra jusqu'à ce 15 juillet. L'objectif de l'édition 2023 est de construire les conditions d’un financement ''massif et sécurisé'' des PME par le biais du Guichet unique d’accès au financement et de l’engagement des acteurs de l’écosystème d’accompagnement à travers les concertations nationales du financement. Ce guichet est une plateforme intégrée facilitant la mise en relation des MPME, des institutions financières et des SAE.
''Le Guichet unique de financement de la PME matérialise la mise en œuvre de cette ambition. Cette plateforme permet de labelliser les PME afin de corriger l’asymétrie d’information avec les banques. Elle se base sur le profilage des PME et à leur évaluation systématique avec eRating, qui est la première plateforme de notation financière des PME dans la sous-région. La plateforme se fonde également sur le Système intégré de gestion de l’information sur les PME’’, indique-t-on
Financement des PME : passer de 500 milliards en 2023 à 3 000 milliards en 2028
Les acteurs publics et privés partagent l’ambition de faire passer le volume de financement des PME de 500 milliards en 2023 à 3 000 milliards en 2028. ''Le Guichet unique, qui mobilise plus de 300 acteurs publics et privés, permet d’interconnecter le dispositif de financement des PME, grâce à une démarche codifiée, standardisée et certifiée suivant les référentiels internationaux ; ce qui en facilite la reconnaissance par le secteur financier'', a soutenu le Premier ministre qui a présidé le lancement officiel du GUF-PME.
Amadou Ba note que ce forum se tient également dans un contexte où le Sénégal a rénové son dispositif juridique et institutionnel en faveur de l’entreprise. Il a mentionné les réformes telles que la Stratégie nationale de développement du secteur privé ; le nouveau Code des investissements ; la loi sur le contenu local ; la loi sur les partenariats public-privé.
Saluant le soutien du ministère allemand de la Coopération et de la GIZ pour la mise en œuvre du projet “Acces”, Amadou Ba a sollicité de la part des Allemands la poursuite de ce soutien dans le cadre de la deuxième phase du projet pour l’opérationnalisation du Guichet unique de financement de la PME. En effet, le projet ''Acces'' contribue à faciliter et à accélérer la mise en relation des PME avec les institutions financières, pour permettre, d'une part, à davantage d'entreprises d'obtenir un financement, et d'autre part, aux institutions financières de développer leurs activités avec les PME sur le long terme.x
La couverture des besoins financiers par les banques
Dans le cadre d’un échange préparatoire à la cérémonie d'hier, le directeur de l'ADPME, Idrissa Diabira, avait fait un appel aux banquiers. Hier, le banquier Bocar Sy a donné sa vision des choses et les solutions à trouver. ''Les PME occupent une place centrale dans notre économie, mais relèvent malheureusement plus de 95 % du secteur informel'', dit-il. Ce qui fait de la formalisation le premier défi, d'après lui. ''C’est une grosse préoccupation qu’il faut savoir transformer en opportunité, du fait du manque de progression que confère ce niveau d’informel en termes de financement. Nous avons également un faible volume de financement des PME qui est lié à divers facteurs, dont l’absence d’états financiers ou qui ne sont pas fiables, ce qui implique une difficulté tronquée sur les performances ou contreperformances de la PME'', regrette-t-il.
En outre, Bocar Sy note une faible capacité à disposer de garantie, voire de fonds forts, d’où la pressante nécessité de mettre en place des mécanismes innovants et appropriés de garantie. Le banquier relève aussi une structuration et une gouvernance chaotique des PME, voire une absence d’éducation financière.
À cet effet, il y a aussi une méconnaissance des politiques financières innovantes telles que le factoring ou la finance verte. ''C’est autant d’opportunités à explorer'', dit-il. Avant d’ajouter : ‘’Nous avons également un système de notation innovant et adapté et un dispositif d’appui aux PME en difficulté, car c’est une chose de créer des PME, c’est une autre de les maintenir en vie. Et là le défi est énorme.''
Ainsi, il regrette le faible accès des PME à la commande publique avec des délais de règlement inadaptés pour le paiement des échéances des banques. ''Si tout ou partie de ces dispositions suscitées sont couvertes, alors les banques pourront renforcer la couverture des besoins financiers des PME, tout en se conformant aux dispositifs financiers et autres règles. Sur ce dispositif, il n’est pas adapté aux PME. Nos autorités, au premier rang desquels le chef de l’État parlent souvent de notation inadaptée de nos économies et de nos pays. Les règles prudentielles sont inapplicables aux PME du secteur informel. Et si nous voulons les accompagner, de leur naissance à leur développement, il y a certaines choses que nous devons revoir'', indique M. Sy.
Le banquier est d’avis que la PME n'agonise pas, même si elle a du mal à se retrouver dans le jeu du marché tel qu’on le souhaite.
Les banquiers réclament de bons dossiers à financer
À ses yeux, la PME doit être son premier bailleur par l'expertise de son dirigeant. ''Plus de 75 % des entreprises sont à l’origine des entreprises familiales. Le pourcentage de 10 % de nos prêts dévolus aux PME qui a été mis en exergue est à relativiser, compte tenu du faible niveau de formalisation et de banalisation des PME. De plus, des dirigeants de PME utilisent également souvent leur compte privé comme le compte d'activité de l'entreprise'', dénonce Bocar Sy, partageant ainsi les problèmes identifiés et relatifs à l’absence de compatibilité conforme et asymétrique de l'information. Ainsi, les banquiers demandent juste à avoir de bons dossiers à financer.
Ingénieur, industriel et administrateur de sociétés, le président de la Confédération nationale des employeurs du Sénégal, Adama Lam soutient, pour sa part, que la PME résiliente doit pouvoir s'appuyer sur des champions nationaux qui constituent un maillage territorial pour accomplir une enveloppe de commande durable. À l'en croire, pour combattre la pauvreté au Sénégal ou créer de la richesse, il faut augmenter le taux d'insertion des jeunes. ''Il n'y a pas meilleure solution que de donner la priorité à la PME'', affirme-t-il.
Pour lui, les nations émergentes se sont bâties à partir d'un pilier constitué d'une multiplication de plus en plus dense de petites activités de production et de services. ''La dernière enquête réalisée par l'ANSD en 2016 a montré que plus de 99 % du secteur privé est composé de PME, d'où la nécessité d'y prêter une plus grande attention. Celle-ci passera forcément par une oreille attentive et des actions concrètes et pragmatiques à l'endroit de la PME qui, non seulement crée de la valeur ajoutée, mais aussi constitue un vecteur d'emplois non négligeable pour les jeunes et les femmes'', indique le président de la Cnes.
À noter que le gouvernement promet d’accorder ''la plus haute importance'' aux recommandations qui sortiront des travaux sur le financement des PME.
BABACAR SY SEYE